Petit rappel historique de ce que deviennent les popularités gonflées par des chocs d’actualité (et ceux qui ont su capitaliser dessus)<!-- --> | Atlantico.fr
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La gestion des attentats de Charlie Hebdo par le président a valu à sa cote de popularité un gain historique de 21 points, selon le baromètre Ifop du mois de janvier
La gestion des attentats de Charlie Hebdo par le président a valu à sa cote de popularité un gain historique de 21 points, selon le baromètre Ifop du mois de janvier
©Reuters

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La gestion des attentats de Charlie Hebdo par le président a valu à sa cote de popularité un gain historique de 21 points, selon le baromètre Ifop du mois de janvier. Pour autant, la capitalisation durable d'opinions favorables à partir d'évènements contextuels a le plus souvent été un exercice délicat au cours de la Vème République.

Jean Garrigues

Jean Garrigues

Jean Garrigues est historien, spécialiste d'histoire politique.

Il est professeur d'histoire contemporaine à l' Université d'Orléans et à Sciences Po Paris.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages comme Histoire du Parlement de 1789 à nos jours (Armand Colin, 2007), La France de la Ve République 1958-2008  (Armand Colin, 2008) et Les hommes providentiels : histoire d’une fascination française (Seuil, 2012). Son dernier livre, Le monde selon Clemenceau est paru en 2014 aux éditions Tallandier. 

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Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet

Jérôme Fourquet est directeur du Département opinion publique à l’Ifop.

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Elections législatives de 1968

Jean Garrigues : Il faut évoquer la véritable résurrection gaullienne de juin 1968 où l’on a observé un sursaut de défense républicaine, avec une manifestation importante sur les champs Elysées. Alors que rien ne laissait songer que cette séquence difficile, après les évènements de mai 68 pourrait lui profiter, la dissolution de l’Assemblée nationale, puis les élections qui ont suivi ont été un véritable raz de marée en faveur des candidats gaullistes, et un moment de grâce pour le restaurateur de l’ordre après la "chienlit" qu'a vécu le pays.

Pour autant, ce moment n’a pas duré. Le fossé intergénérationnel à la source des troubles de mai 68 a refait surface et le Général de Gaulle a été battu –de peu il est vrai- au référendum qui a suivi. Le moment de grâce gaulliste aura donc été éphémère, De Gaulle n’aura pas su capitaliser sur l'image acquise au gré des évènements.

Victoire de la France - Coupe du monde de football 1998

Cliquez sur les graphiques pour les agrandir / Données Ifop

Jérôme Fourquet : L'effet de la victoire de l'équipe de France se ressent sur 3 mois avant de retrouver un niveau légèrement supérieur. Il faut dire que la situation est là très différente puisque le gouvernement est en cohabitation avec Lionel Jospin. Si certaines décisions impopulaires étaient prises, le Premier ministre en première ligne était là pour les encaisser. Jacques Chirac n'était donc pas usé par l’exercice du pouvoir comme les autres présidents. Le regain de moral lié à un évènement sportif de cet ampleur a une marque également plus durable, ce qui a bien entendu des conséquences sur la santé économique du pays.

Engagement militaire en Irak - Janvier 1991

Jérôme Fourquet : Pour cette séquence de première guerre du Golfe, la montée de Mitterrand ne se fera que de manière progressive, c'est à dire durant deux mois. On peut l'expliquer par la temporalité de ce phénomène puisqu’il ne s’agit pas d’un évènement soudain, mais de l’entrée d’une coalition en guerre, où les opérations de de campagne s’étalent dans le temps. La progression est néanmoins très importante, avec 19 points gagnés en deux mois. Points que F. Mitterand mettra 3 mois à reperdre pour revenir à un niveau équivalent à l'avant-guerre.

Non-engagement en Irak - février 2003

Jérôme Fourquet : Deuxième guerre du golfe, mais avec Jacques Chirac cette-fois. Une fulgurante ascension dans les sondages dans un contexte où le président est beaucoup plus populaire que Mitterrand par exemple. Une érosion qui ramène finalement la popularité du président au statu quo ante plus rapidement encore que pour Mitterrand en 1991.

Crise économique de 2008

Jérôme Fourquet : La séquence s'étale ici sur 4 mois. Le rebond n’est que de 6 points, mais correspond à la période très critique consécutive à la faillite de la banque Lehman Brother et le déclenchement de la crise boursière et financière. La réaction de Nicolas Sarkozy symbolisée par le discours de Toulon où il affirme que l’Etat de portera garant en toute circonstance et qu’aucun épargnant français ne perdra un euro, ainsi que son dynamisme à l’international pour coordonner la risposte à cette tempête avec les autres dirigeants lui vaut un satisfecit dans l’opinion qui est le bienvenu, sa posture n'étant pas à la réjouissance avant ces évènements.

Atlantico : Que nous peuvent nous dire ces différents exemples sur la capitalisation d'une ascension dans les cotes de popularité pour un Président ? Et que peut-on présager de celle de François Hollande ?

Jérôme Fourquet : Il n’y a pas de cas de figure unique, mais on peut voir que les effets durent généralement entre deux et quatre mois. Le rebond de François Hollande est à la hauteur des évènements que nous avons connus, et a malgré tout vocation à s’éroder avec le temps. La question pour ses exécutifs est de savoir comment profiter au mieux de cette séquence pour rendre possible un certain nombre d’actions politiques, un certain nombre de lancement de chantiers par exemple.

Jean Garrigues : Il y a toujours une dimension éphémère dans ces évènements imprévisibles, mais la chute peut être évidemment plus ou moins forte. Il me semble pourtant que s’il continue sur cette lancée, François Hollande peut espérer capitaliser durablement sur cette ascension dans les sondages, car il a brisé le cercle vicieux de l’impopularité. La dynamique est redevenue positive, et les dénigrements à son égard ne pourront plus être du même ordre. En tout cas, ces critiques n'auront probablement plus la même tonalité, ni évidemment la même portée. 

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