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J'ai voté nul (et je ne veux pas 
que ça se reproduise)
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Vote blanc

Pour la première fois en 17 ans, en tant qu'électeur de droite, j'ai voté blanc, vote nul. Pour éviter que cela ne se reproduise, que d'autres fassent le même choix, ou reprennent la voie de l'abstention, la droite et le centre-droit doivent entamer maintenant leur recomposition.

 Koz

Koz

Koz est le pseudonyme d'Erwan Le Morhedec, avocat à la Cour. Il tient le blog koztoujours.fr depuis 2005, sur lequel il partage ses analyses sur l'actualité politique et religieuse

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Cette affichette, dans l'isoloir, n'avait jamais retenu mon attention. Dimanche, je l'ai lue avec l'application du débutant. Comment fait-on pour voter blanc ? C'est que le vote blanc n'est pas dans mes convictions. Règle n°1 : je vote. Règle n°2 : au deuxième tour, je départage. J'étais d'ailleurs de ceux qui sont opposés à la comptabilisation du vote blanc.

Aujourd'hui, j'ai respecté la règle n°1. En ayant une bonne idée de ce que j'allais y faire, j'ai fait le détour par le bureau de vote, et je suis dans l'isoloir avec mes deux bulletins. Chez moi, un divers droite sans grande ampleur contre un UMP. Bref, je suis derrière mon rideau, et je lis l'affichette. Alors, on fait comment ? Je rends une enveloppe vide ? Je barre un nom ? Je n'ai pas pensé au stylo et puis, barrer un nom....   En fin de compte, je reprends les bulletins dans la poubelle, et je mets les deux.

Je ne suis jamais resté aussi longtemps dans un isoloir

Mon vote est nul. J'ai fait sciemment la démarche d'exprimer une opinion qui ne sera pas prise en compte. Mon vote est nul, comme l'a été cette campagne, nulle comme l'orientation que prennent l'exécutif et l'UMP. Nul comme l'état de la droite.

Je lisais avant de voter que Nicolas Sarkozy n'attachait aucune importance à ce scrutin. " En 2012, les gens raisonnables iront voter " , aurait-il déclaré. C'est possible. J'irai voter, c'est vrai. Mais qui sait si je n'opposerai pas le même vote aux candidats que l'on me proposera ? Je ne me suis jamais abstenu depuis dix-sept ans que je suis en âge de voter. Je n'ai même jamais raté un premier tour. Aujourd'hui, je ne conçois aucune fierté de mon vote, je n'en conçois que de l'amertume. Ce vote est un crève-coeur, une transgression de dépit. Pas une transgression des valeurs des autres, non, une transgression des miennes. Certes, il a raison : il y a encore moins de chances que je m'abstienne aux présidentielles qu'à ces cantonales à l'enjeu très limité. Mais j'ai horreur qu'on joue de mon propre sens des responsabilités.

Lundi soir, dans mon département des Hauts-de-Seine, j'aurais voulu être électeur de Neuilly-sur-Seine ou de Levallois-Perret. Contribuer au score pharaonique et pourtant tellement démocratique de Jean-Christophe Fromantin. Contribuer au score d'Arnaud de Courson contre Isabelle Balkany. Pour une autre politique, un autre rapport à la politique, et pour une autre droite.

Mais assez geint : quel doit être l'avenir ? L'UMP a vécu. Elle était réunie autour d'un projet aussi électoraliste qu'inconsistant : une union pour une majorité. Elle n'est jamais parvenue, même symboliquement, à le dépasser. Aujourd'hui, l'UMP est un étouffoir pour toute une partie de la droite. Il y a près d'un an, on pouvait s'estimer à la croisée des chemins : soit reconquérir un centre, soit virer un peu plus encore à droite. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy choisi sa route. Il serait ravi des polémiques lancées par Claude Guéant ces derniers jours, nous dit-on. Lundi matin, Jean-François Copé prétend avoir "entendu le message" et reste englué dans la laïcité. Et quand Nicolas Sarkozy "met en garde ceux qui voudraient mettre en cause l'unité de l'UMP", il devrait s'appliquer cet avertissement le premier. Nul ne nous oblige à les suivre. Nul ne nous oblige à taire nos valeurs, à forcer nos principes, pour accepter ce que l'on refusait hier.

L'étiquette UMP est devenue un handicap

Nicolas Sarkozy est convaincu que la société s'est droitisée. Pourtant, dans mon entourage, très majoritairement à droite, je n'ai jamais connu autant d'abstentionnistes, autant de votes blancs, autant d'indécision, de mécontentement et de malaise. L'étiquette UMP est devenue un handicap et la disgrâce un avantage.

Les partis de centre-droit, les partis de droite sociale, doivent quitter l'UMP. L'argument selon lequel il vaudrait mieux être à l'intérieur du parti pour y faire entendre une voix différente, pour peser sur les décisions, ne tient plus. Quel bilan les représentants de cette droite peuvent-ils tirer aujourd'hui de leur participation à l'UMP ? En quoi ont-ils pesé ? Ont-ils infléchi le positionnement du président, celui de l'UMP ? S'ils s'interrogent sur leur visibilité demain, hors de l'UMP, s'ils craignent que leur voix soit étranglée, qu'ils considèrent simplement la situation actuelle : aujourd'hui, leur voix est étouffée, mais en interne, elle n'a même pas une chance d'être entendue dans le pays. Pire encore : les voilà contraints de porter les couleurs d'une politique avec laquelle ils sont en désaccord.

Nicolas Sarkozy n'accorde aucune importance aux scrutins locaux, sacrifiés à l'enjeu présidentiel. Ce faisant, il est également en train de sacrifier le tissu de représentation de la famille centre-droit. Et, en 2012, après les présidentielles et les législatives, la question qui se posera pourra aussi être tout simplement celle des conditions de la survie.

On fait de la politique parce que l'on a un message à porter

Une clarification est donc nécessaire, et urgente. Se fera-t-elle au préjudice de la victoire dans les urnes ? Si, à terme, l'UMP ainsi délestée s'alliait avec le Front National, composant un bloc de droite dure fort et militant, cette droite pourrait être prise en étau. Et l'on sait de surcroît que la pondération  du discours n'est pas la meilleure stratégie médiatique. Peut-être... Mais il serait grand temps de retrouver l'honneur de la politique, qui ne se fait pas pour une union électorale mais pour l'affirmation de convictions, qui ne se fait pas en sondant l'électorat pour se précipiter sur son chemin présumé mais en incarnant une voie et, osons-le, une doctrine. On fait de la politique parce que l'on a un message à porter et non des postes à occuper.

S'il fallait convaincre encore les réticents, on trouvera des voix dans ce réservoir de mécontentement, chez ces électeurs abstentionnistes, chez ceux qui, en votant, n'ont fait que "leur devoir" là où ils brûlent de s'enthousiasmer. Et pour ne citer que quelques exemples, à Neuilly, à Levallois, à Rueil-Malmaison, ou encore à Versailles (avec Olivier de la Faire, PCD), opposés à un candidat UMP, ce sont les candidats Divers Droite qui l'ont emporté.

André Rossinot, pour le parti radical, a donné un mois à l'UMP pour se réformer, pour "faire vivre en son sein la diversité". Il est des ultimatums qui ne visent qu'à clarifier les responsabilités d'une issue inévitable. Celui-ci en est un. Ou doit l'être.

Un autre parti associé s'interroge depuis longtemps, se voyant comme "un caillou dans la chaussure du président", c'est le Parti Chrétien-Démocrate.Comme il l'indique, "les électeurs cherchent une droite cohérente et porteuse de valeurs". Samedi, lors de son Conseil National, il se dit avec insistance que le PCD pourrait officialiser une première prise de distance avec l'UMP.

Cette démarche doit aller à son terme.

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