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Libye : "Combien de morts pour qu'on intervienne ?"
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Urgence en Libye

Le coup de gueule de Romain Goupil. Militant du devoir d'ingérence, le réalisateur a signé l'appel publié dans le Monde en faveur d'une intervention militaire occidentale en Libye.

Romain Goupil

Romain Goupil

Romain Goupil est cinéaste.
Connu pour son engagement politique proche de l'extrême gauche en mai 68, il en a tiré le film "Mourir à 30 ans".
Membre du comité éditorial de la revue Le meilleur des mondes, Romain Goupil s'est distingué en 2003 pour avoir soutenu l'intervention militaire américaine en Irak.
Son dernier film, Les Mains en l'air, est sorti en 2010.

Romain Goupil vient de cosigner un appel pour une intervention urgente en Libye, paru dans Le Monde du 16 mars 2011.

Voir la bio »

Atlantico : Pourquoi ceux qui étaient contre l’intervention en Irak sont aujourd’hui favorables à une intervention en Libye ?

Romain Goupil : La vraie question c’est celle du droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU. Ce processus n’est plus à la hauteur du monde d’aujourd’hui. Comment est-ce possible que cinq membres aient un droit de veto ? Nous savons que la Chine et la Russie vont s’opposer à l’intervention en Libye. Comment, en 2011, est-il possible que cinq pays puissent bloquer toute intervention de la communauté internationale, alors  que dans le même temps, ce droit de veto permet à la Russie et à la Chine de massacrer impunément en Tchétchénie et au Tibet.

Pour répondre plus directement à votre question, disons qu’il y a un effet retard. Parfois, malheureusement, l’histoire laisse des traces. Il faut se souvenir de la façon dont on a laissé se dérouler le génocide au Rwanda, comment l’ONU n’a pas réagi pour le massacre des Kurdes via des armes chimiques, comment on n’a pas soutenu 14 des 18  provinces entrées en sécession contre Saddam Hussein en 1991, comment la communauté internationale a tardé pour intervenir face à Milosevic. Combien de temps devra-t-il s’écouler avant que Kadhafi ne passe devant une Cour pénale internationale, avant que l’on intervienne ? Mais combien faut-il donc de milliers de morts et de gens torturés ?   

Selon vous, que doit faire la France en Libye ?

Elle doit reconnaître les insurgés. Ca elle l’a fait. Elle doit également trouver un accord en partie ou totalité avec l’Europe, avec les Anglais, les Allemands, les Américains pour faire pression. Mais cela n'apparaît pas comme une évidence pour d'autre pays et cela prend du temps.

Cela dit, souvenons-nous qu’Americains, Anglais, Allemands et Français sont intervenus au Kosovo, en contournant l’ONU. Ce n’était pas légal vis-à-vis des lois internationales, mais c’était nécessaire pour protéger un peuple.

La France doit continuer de faire peser tous ses efforts diplomatiques pour convaincre les autres. C’est une question d’honneur. Elle ne peut pas intervenir seule. Elle n’en a pas les moyens sans au moins l’accord des Américains. Et puis, ce serait idéaliste et même absurde, car contreproductif politiquement. Un pays seul qui décide d’attaquer un autre pays c’est une déclaration de guerre.

Les pays arabes ont-il un rôle à jouer dans la région ?

La Ligue arabe, l’Organisation des Etats islamiques, et le Conseil de coopération des Etats du Golfe - trois organismes qui représentent les pays arabes - se sont prononcés pour une « no fly zone ».  Si une coalition occidentale parvenait à s’organiser, ils appuieraient cette coalition. 

Maintenant on peut se demander pourquoi ils n’interviennent pas par eux-mêmes. Le moins qu’on puisse dire qu’ils se sont bien accommodés jusqu’ici de ces régimes là pendant des années… Peut-être leur demande-t-on un peu trop en peu de temps. Le signe qu’ils ont donné de participer à une coalition est déjà une avancée.

Un dernier mot sur la politique française menée en Libye ? Reconnaitre les insurgés envoyait un signal fort…

Cela aurait été plus intéressant si Nicolas Sarkozy avait été appuyé dés le début par l’Allemagne et l’Angleterre. Mais des fois il faut un peu forcer le destin… Je pense que c’était ce qu’il fallait faire, mais pas tout seul. Il aurait fallu réussir à convaincre et entrainer d’autres pays européen. Malheureusement, ce n’est pas ce qui s’est passé. La France a raison, mais elle est isolée.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Giraud

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