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Syrie : mais qui sont les chabihas, ces milices pro-Assad au rôle trouble ?
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Fantômes

En plus des troupes régulières, le régime de Bachar el-Assad peut compter sur des milices. Entre civils armés, troupes paramilitaires et bandits, les "chabihas" (fantômes en Français) comptent plusieurs dizaines de milliers d'hommes plus ou moins déterminés.

Fabrice Balanche

Fabrice Balanche

Fabrice Balanche est Visiting Fellow au Washington Institute et ancien directeur du Groupe de recherches et d’études sur la Méditerranée et le Moyen-Orient à la Maison de l’Orient.

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Atlantico : Depuis le début de la crise syrienne, observateurs et acteurs évoquent régulièrement les milices auxquelles Bachar el-Assad fait appel. Un nom revient souvent : les Chabihas. Qui sont ces miliciens ? Quel est leur rôle dans la guerre qui ravage le pays ?

Fabrice Balanche : En arabe, le mot « chabiha » veut dire fantôme. Le phénomène des chabihas date des années 1980. Ils sont apparus au moment où la famille Assad a eu des soucis avec les Frères musulmans. Ils entourent certains personnages emblématiques du régime comme Nizar el-Assad, l’un des cousins de Bachar, qui était une espèce de mafieux régnant sur la ville de Lattaquié. Il avait autour de lui des hommes de mains, des jeunes des quartiers et des villages : les chabihas.

Comme dans une mafia, ils servent à faire respecter le territoire de leur patron. Dès lors que le patron en question est au pouvoir, ils peuvent aussi servir ce même pouvoir politique, lorsqu’il faut aller arrêter des opposants politiques par exemple.

Il s’agit de plusieurs dizaines de milliers de personnes. Leurs effectifs sont variables et augmentent en temps de crise. Dans une situation comme celle d’aujourd’hui, vous pouvez trouver tel général ou tel colonel qui va aller recruter les jeunes désœuvrés pour rejoindre ces chabihas pour 300 à 400 euros par mois. Au début, on leur donnait des bâtons pour aller casser les manifestations. Maintenant, on leur donne des kalachnikovs pour mener des expéditions punitives que l’armée syrienne répugne à faire.

Comment s’articule les relations entre l’armée et les chabihas ? Travaillent-ils ensemble ? Ont-ils une hiérarchie commune ?

Officiellement, il n’y a pas de lien. La plupart des militaires les méprisent en public. Mais dans les coulisses, des officiers de l’armée régulière commandent des groupes de chabihas en plus de leurs brigades. Ils les utilisent en parallèle de leurs troupes lors d’opérations militaires.

Il n’y a pas de commandement ni de hiérarchie institutionnalisé pour diriger les chabihas. Ils sont tous plus ou moins liés à des chefs militaires.

Il faut en cela distinguer deux sortes de chabihas. Il y a des chabihas alaouites et des chabihas sunnites, notamment à Alep, où ils obéissaient à l’origine à des grandes familles mafieuses auxquelles le pouvoir de Damas avait délégué certains pouvoirs depuis les années 1980. Ces dernières faisaient la loi.

Lorsque les rebelles syriens ont repris certains quartiers d’Alep, ils ont exécuté des membres de ces clans et de ces chabihas.

Ces milices représentent-elles une force solide sur laquelle le régime peut compter coûte que coûte où leurs membres risquent-ils de fuir en cas de retournement de situation sur les terrains où ils opèrent ?

Il y a une multitude de cas de figures. Dans certains endroits, on trouve des gens qui ont rejoint les chabihas plus ou moins contraints et forcés. Il peut s’agir de dettes : un général a rendu un service à un moment donné donc il faut aujourd’hui répondre à son appel aux armes.

D’autres veulent fermement défendre le régime. On les trouve notamment au sein des populations alaouites. A Homs, on va trouver des chabihas qui sont parmi les plus déterminées. Ils se sont fait tirer dessus pendant des mois par les rebelles qui tenaient les quartiers sunnites. Quand le pouvoir a distribué des armes pour défendre aussi bien le régime que leurs quartiers, ils n’ont pas hésité. Eux, iront jusqu’au bout.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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