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JO de Londres : mais comment Roger Federer réussit-il à rester à un tel niveau ?
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C'est ce samedi que le Suisse entre dans la compétition. Trois semaines après sa victoire à Wimbledon, réussira-t-il à relever ce dernier défi, lui qui n'a jamais remporté la moindre médaille olympique ?

Denis  Grozdanovitch

Denis Grozdanovitch

Denis Grozdanovitch est écrivain et ancien joueur de tennis professionnel. Il a sorti récemment son dernier livre, La secrète mélancolie des marionnettes.

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Atlantico : Les JO de Londres sont-ils le dernier défi pour Roger Federer sachant qu’il a gagné tous les tournois du Grand Chelem, mais n'a jamais remportés les Jeux Olympiques ?

Denis Grozdanovitch : Les Jeux Olympiques me semblent tout à fait annexes. C’est peut être important pour lui mais ce n’est pas un tournoi majeur. Ce qui compte vraiment, ce sont les quatre tournois du Grand Chelem (Roland Garros, Wimbledon, US Open et Open d’Australie).

Au-delà de cela, Roger Federer est un joueur extraordinaire. Il possède une fluidité naturelle exceptionnelle liée à un pouvoir de concentration gigantesque. Nadal dit lui-même que quand Federer entre dans un état de « transe » dû à sa concentration, on ne peut plus rien faire « sauf le déconcentrer ».

Il possède également une fluidité gestuelle inouïe qui lui permet d’être toujours là, malgré ces 31 ans, sans se fatiguer. Il y a une autre raison très technique à cela, c’est le seul joueur qui défend en demi-volée. Il ne recule jamais. Ainsi, il se fatigue moins que les autres. Cela est dû à son habileté exceptionnelle : personne n’arrive à le faire à part lui.

C'est pour cette raison qu'il durera plus longtemps que les autres ?

J’ai toujours dit que Federer durerait plus longtemps que Nadal. Les joueurs très laborieux comme Nadal ou Djokovic se blessent fatalement. Ils se dépensent beaucoup plus que Roger Federer.

Federer a aussi inventé des coups. Il peut enchainer deux trois coups d’affilée, puis faire le point avec son coup droit décroisé qui sort au niveau de l’angle de carré de service. C’est un coup de génie qui prend tout le monde de court. Il a également réinventé l’amorti.  

Le paradoxe en tennis c’est qu’on peut être moins fort mais toutefois progresser si l’on arrive à se maintenir. Avec l’âge, ce que l’on améliore le plus, c’est l’anticipation. Federer peut encore progresser de manière à se maintenir, au moins dans les cinq meilleurs, et pendant encore longtemps.

Comment jugez-vous l'évolution de Federer depuis ses débuts ?

C’est un talent qui a éclaté d’un seul coup mais qui n’a pas beaucoup progressé. Nadal a beaucoup plus progressé dans son jeu. Cela s’explique par le fait que Federer est un prodige naturel. Je ne pense pas qu’il travaille beaucoup son tennis.

Ce qui est étonnant, c’est de voir comment il arrive à gagner des matchs même quand il joue mal. Il sait s’adapter.

Y’a-t-il des exemples de joueurs qui se soient maintenus à un tel niveau aussi longtemps ?

Les deux plus étonnants sont Ken Rosewall et Jimmy Connors. Mais le meilleur, à mes yeux, a été Pancho Gonzales. C’était numéro un mondial pendant quinze ans et il n’a été battu par personne. Il avait arrêté la compétition à l’âge de 35 ans et à 45 ans il a rejoué Roland Garros. Il est malgré tout arrivé jusqu’en demi-finale. C’était une autre époque mais cela reste très impressionnant.

Federer n’est-il pas un peu responsable d’un certain désintérêt pour le tennis ? C’est un personnage moins « haut en couleur » que ne l’ont été Connors ou McEnroe…

Il a, c’est vrai, un côté aristocratique. Mais c'est justement ce qu'il me plaît !McEnroe était amusant, mais du point du vue de la gestuelle, il était moins beau à voir que Federer.

A-t-on une chance de voir un jour un Federer français ?

Le gros problème en France, c’est le mental. Cela s’explique de deux manières.  Premièrement, d’un point de vue sociologique, on vit un peu trop bien pour avoir la volonté d’être le meilleur. On se contente vite d’être parmi les meilleurs et on mène la belle vie. Il faut savoir que les grands joueurs comme Nadal et Federer n’ont pas de vie en dehors du tennis.

En outre, la fédération française a fait beaucoup de mauvais choix. Le mental n’existe pas. L’indigence des entraineurs est assez terrible.

Et puis, Federer a dit une chose fondamentale : « Je pense que personne au monde ne s’amuse plus sur un terrain que moi ». C’est un profond amoureux du tennis. C’est peut-être cela qui manque à certains : l’amour du jeu.

Mais alors comment expliquer que Federer n’ait jamais gagné les JO ?

C’est peut-être un manque d’intérêt de sa part. Il se démotive un peu sans le vouloir.

Reste qu'il ne s'agit pas là de son dernier défi. Pour marquer encore davantage l'histoire du tennis, il doit gagner les quatre tournois du Grand Chelem la même année.

¨Propos recueillis par Aymeric Goetschy

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