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Tunisie : Non, les émeutes que connaît le pays n’auront pas la peau de sa stabilité politique
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Printemps arabes

Les salafistes reprochent surtout à Ennahda, le parti au pouvoir, de ne pas adopter de programme véritablement islamiste et sa politique de compromis.

Béligh Nabli

Béligh Nabli

Béligh Nabli est directeur de recherches à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS).

Il dirige également l’Observatoire des mutations politiques dans le monde arabe qui analyse la première Révolution du XXIe siècle et son impact géopolitique sur le monde arabe.
 
 
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Atlantico : De nouveaux mouvements de violences secouent actuellement la Tunisie. Qui se cache derrière ?

Béligh Nabli : Les principaux meneurs de troubles sont essentiellement les personnes issues de la mouvance salafiste. Ils s’opposent à la minorité « libérale » composée d’artistes, d’intellectuels, de journalistes et de diplômés dont ils remettent en doute leur propres fois.

Le second acteur est le parti Ennahda, actuellement au pouvoir. Considéré par les salafistes comme trop conciliant avec le reste de la société, il exerce son mandat dans le cadre d’une coalition composée de deux autres forces politiques de centre gauche incarnées par le président de la République et le président de l’Assemblée constituante. Les salafistes reprochent aux islamistes d’Ennahda de ne pas adopter de programme véritablement islamiste et notamment la consécration constitutionnelle de la charria comme source du droit positif tunisien.

Cela signifie t-il que le pays s’engage dans un affrontement entre diverses minorités ?

Ennahda se retrouve au centre du jeu politique et au lieu de jouer une carte qui consisterait à prendre des décisions de façon unilatérale et radicale, il essai de trouver des solutions de compromis. Une politique plutôt utopique et difficile à tenir.

Pourquoi ? Parce que leurs réactions sont à la fois équilibrées et contradictoires. Par exemple, le parti condamne les violences, notamment avec le ministre de l’Intérieur qui interdit la manifestation de ce vendredi lancée par les salafistes et islamistes en autorisant d’ouvrir le feu contre les fauteurs de trouble... Dans le même temps, le ministre des Affaires religieuses a évoqué l’idée de consacrer sous forme législative toute atteinte au sacré, ce qui vise indirectement les œuvres artistiques ayant déclenché les protestations. Il y a donc eu deux réactions contradictoires au sein du même gouvernement quant aux récentes violences.

Face à ces islamistes salafistes, Ennahda peut asseoir sa stature de parti de responsabilité politique en renvoyant dos à dos les deux extrêmes que sont les islamistes salafistes et les extrémistes « blasphématoires ». Mais il faut également tenir compte du nombre de personnes issues des couches populaires manipulées par l’ancien parti au pouvoir de Ben Ali.

Ces violences et cette contestation du parti Ennahda ne manifestent t-ils pas le non respect du vote des Tunisiens ?

La sécurité était jusqu’à présent rétablie. La population tunisienne souhaite avant tout l’affirmation de l’ordre public. Ce à quoi nous assistons aujourd’hui est une irruption, même si cela n’est pas la première.

Mais il ne faut pas s’inquiéter de ces protestations violentes et massives car la population veut retrouver une situation stable en terme de sécurité publique. Elle est convaincue de l’adéquation entre ordre public et croissance économique afin de faire revenir les investissements privés et le tourisme. Cela se manifeste notamment par l’agenda politique actuel qui relève davantage de l’urgence politique et social que de la question religieuse.

D’ailleurs, mises à part des zones de tensions autour de la frontière libyenne, la tendance lourde est celle d’un retour au calme, à la stabilité et à la sécurité. Mais celle-ci est confrontée au caractère incontrôlable des groupuscules salafistes qui, à tout moment, peuvent créer des irruptions locales et violentes.

Quel est le rôle des forces policières, dont la population était défiante, dans ce nouveau climat ?

Le ministère de l’Intérieur a prévenu que les forces de l’ordre avaient le droit de tirer contre les fauteurs de troubles. Il faut rappeler que la Tunisie vit toujours dans une situation d’état d’urgence et qu’un couvre feu à été rétabli. Rached Ghannouchi, le chef d’Ennahda, demande la levé de ce dernier précisément parce que la période estivale et touristique commence.

Les forces de l’ordre, représentés par la police nationale, sont engagées dans un processus de réconciliation avec la population. Cette volonté a été chapeautée par le ministère de l’Intérieur qui est aujourd’hui en première ligne pour protéger la population. La police a donc désormais l’opportunité de pouvoir rejoindre le processus révolutionnaire.

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