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Pourquoi Donald Trump a eu raison de gracier son ancien conseiller à la sécurité nationale
©Brendan Smialowski / AFP

Pardon présidentiel

Si la décision du président scandalise une bonne partie de la presse américaine et internationale, l'examen du cas de Michael Flynn montre qu'il a fait face à un acharnement du FBI auquel autre citoyen ne travaillant pas avec Trump n'aurait eu droit.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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Atlantico : Donald Trump a décidé de gracier son ancien conseiller à la Sécurité nationale Michael Flynn, qui avait plaidé coupable en 2017 d’avoir menti au FBI dans l’affaire des soupçons de collusion entre Trump et la Russie. Pourriez-vous rappeler les contours de l’affaire ?

Gérald Olivier : Michael Flynn est la principale victime collatérale de la tentative de déstabilisation menée contre Donald Trump par certains hauts fonctionnaires au sein de l’appareil d’Etat américain, avant son élection en 2016 et après sa prise de fonction en 2017. Si un candidat ou président démocrate avait été la cible d’une attaque comparable, l’affaire aurait eu un retentissement planétaire. S’agissant de Trump et de ses proches, les médias ont fermé les yeux, et plusieurs années après les faits on continue de confondre les victimes avec les coupables.

Michael Flynn est pour moi une vraie victime, habillé en faux coupable, jeté en pâture aux médias, dans le but de nuire à Donald Trump.

Flynn est un général de l’armée américaine avec vingt-cinq ans de service dans le renseignement militaire, y compris en Afghanistan et en Irak. Il fut directeur du renseignement pour le département de la Défense dans l'administration Obama de 2012 à 2015 et Donald Trump en avait fait son Conseiller à la sécurité nationale. Il occupa le poste moins d’un mois en 2017 avant de démissionner sous le coup d’une inculpation par le FBI et de soupçons d’intelligence avec l’ennemi, à savoir la Russie. Flynn s’était retiré humilié, dénoncé comme un mouton noir, y compris par l’ancien président Obama.

Toutefois les enquêtes menées depuis, et en particulier la longue enquête (deux ans) du procureur indépendant Robert Mueller sur une possible collusion entre la campagne de Donald Trump et la Russie en 2016, ont démontré que Flynn avait été victime d’un coup monté, que le FBI l’avait piégé, et que les soupçons ayant déclenché une enquête à son encontre était basé sur de fausses accusations. Non seulement l’ensemble du dossier s’est révélé vide, mais il est apparu que d’innombrables irrégularités avaient été commises par les agents du FBI durant l’enquête (agents qui ont été limogés depuis). Certains ont même parlé d’abus de pouvoir pouvant remonter jusqu’au sommet de l’exécutif. Donald Trump a toujours dénoncé une « chasse aux sorcières » et les faits lui ont donné raison.

Aujourd’hui en pardonnant le général Flynn, il met un terme final à l’affaire et démontre sa loyauté envers ce général déchu.

Pour comprendre l’affaire dans le détail, il faut remonter à 2016 – 2017 et se rappeler que l’élection de Donald Trump s’est déroulée sur fond de soupçons de collusion avec la Russie. Des pirates informatiques russes avaient pénétré les ordinateurs du parti Démocrate. Donald Trump disait du bien de Poutine et lui demandait de publier les fameux emails perdus par Hillary Clinton. C’était de la provocation. Mais comme certains membres de son équipe avaient travaillé pour des intérêts russes, les Démocrates ont dénoncé des liens illicites. Un dossier, concocté par un ex-espion britannique, Christopher Steele, est apparu. Contenant des accusations salasses sur Donald Trump. Laissant entendre que Trump serait « compromis » c’est-à-dire que Moscou aurait des dossiers susceptibles de le faire chanter. Ce qui serait gravissime, si c’était vraiment le cas. Ces soupçons ont amené le FBI à ouvrir une enquête confidentielle, et à placer certains proches de Trump sur écoute. Ces écoutes ont été maintenues au-delà de l’élection et de la victoire de Trump. L'un des personnages régulièrement écoutés est l'ambassadeur russe à Washington, Sergueï Kislyak.

Lorsque Trump, nouveau président élu, constitue son équipe, les personnes qu’il désigne ici et là prennent des contacts avec leurs futurs homologues, comme cela se passe à chaque transition. Dans ce cadre, Michael Flynn s’entretient avec l’ambassadeur Kislyak. A l'époque l'administration Obama avait appliqué des sanctions contre la Russie pour justement punir Moscou de son interférence dans la campagne électorale américaine ! Dans leur conversation Michael Flynn avait demandé à l'ambassadeur russe de recommander au président Poutine de ne pas imposer de représailles, pour ne pas engendrer de tensions artificielles à un mois de la transition du pouvoir.

Cette conversation a été enregistrée par le FBI et sa nature et son contenu ont été communiqués au président Obama. Or, Obama connaît Flynn et s’en méfie. Il ne partage pas sa vision du monde. Leur collaboration n’a jamais été bonne. Flynn estimait Obama trop laxiste face aux avancées de l’Etat islamique. Obama le jugeait trop proche des Russes et a fini par le limoger. Le 5 janvier 2017 à quelques jours de la fin de son mandat Obama réunit ses proches collaborateurs, dont Joe Biden, alors vice-président, et James Comey, alors directeur du FBI pour évoquer l’affaire Flynn.

A cette date le fameux dossier Steele a été démystifié. La CIA a produit plusieurs notes indiquant qu’il s’agissait d’un document de désinformation préparé et payé par le parti Démocrate pour nuire à Trump et favoriser l’élection d’Hillary Clinton. Néanmoins personne au sein de l’administration Obama n’est intervenu pour faire cesser les enquêtes ou les écoutes. Et lors de la fameuse réunion du 5 janvier 2017 Obama autorise Comey à faire interroger Flynn, et demande que les éléments réunis contre lui ne soient pas communiqués à Donald Trump.

Quelques jours plus tard, Michael Flynn est interrogé par deux agents du FBI. Officiellement à titre de témoin. Il n’est pas informé de son droit à avoir un avocat présent, ni du fait qu’il est la cible réelle de l’entretien, ni bien sûr du fait que le FBI connaît déjà le contenu de sa conversation avec Kislyak. C'est un triple piège dans lequel il tombe la tête la première… Il nie avoir discuté des sanctions avec Kilsyak, sujet qui dépassait le cadre d’une simple prise de contact, et se trouve immédiatement confronté à son mensonge ! Le FBI le convainc de coopérer pour éviter des poursuites plus pénibles… Il accepte !

Sa démission sème le chaos dans l’administration Trump et le doute dans l’électorat américain. Trump passe pour un incompétent mal entouré. Il vacille déjà quelques jours après sa prise de fonction. Ce qu’il ne sait pas alors mais que l’on sait depuis est que tout cela est calculé et voulu. La vraie cible du FBI n’est pas Flynn, c’est Trump. Certains agents l’ont même noté sur leur calepin à l’époque. Flynn n’est qu’un pion. Il est pris dans un engrenage qui va le broyer, mais il n’est pas l’objectif réel. L’objectif réel est Donald Trump parce que certains au sein de l’appareil d’Etat estiment qu’il n’est pas à sa place et sont prêts à tout pour l’en déloger.

Il faudra plus de deux ans d’enquête pour que toute cette machination soit mise à jour.

En mai 2020, le département de la justice abandonne les poursuites contre Flynn. Mais Emmet Sullivan, un juge de la cour fédérale de Washington DC a repris le dossier. Le pardon de Donald Trump permet de mettre un terme à cette opération. Cette grâce est-elle justifiée ?  

Absolument. Ce que l'on sait aujourd'hui, c'est que toute la procédure du FBI a été truquée. Son entretien avec l’ambassadeur russe ne justifiait pas l’interrogatoire du FBI dans lequel il a été piégé en n'étant pas informés de ses droits. On sait aujourd’hui d’après les notes de certains agents du FBI qu’ils avaient des doutes sur ce qu’ils faisaient et sur ce que leurs supérieurs attendaient d’eux. Il a été également prouvé que certains agents avaient falsifié leurs propres notes.  Ce sont les raisons qui ont poussé le DOJ, le « Department of Justice », à abandonner les poursuites au printemps.

Par ailleurs, les soupçons de collusion entre la campagne Trump et la Russie n’ont débouché sur aucune inculpation. La fameuse enquête de Robert Mueller, qui a duré deux ans, a coûté cinquante millions de dollars et a vu défiler cinq cents témoins, s’est achevée sur une triple exonération : ni collusion, ni complot, ni obstruction de justice, selon les fameuses conclusions du rapport.

Le dossier Steele a également été totalement démystifié. Les accusations venaient d’un ex-agent russe devenu pilier de bar à Washington sans la moindre pièce à conviction. La CIA, par l'intermédiaire de John Brennan, avait communiqué cette information au président Obama dès le printemps 2016. On savait déjà à l'époque que les soupçons qui justifiaient l'enquête sur les proches de Trump étaient infondés.

L’enquête s'est néanmoins poursuivie pour nuire à Trump et favoriser l’élection d’Hillary Clinton, sachant qu’une fois Clinton élue chacun pourrait se féliciter d’avoir contribué à sa victoire, et les petites incartades au règlement seraient vite oubliées… rien de tout ce que l’on sait n’était destiné à sortir.

Le problème est que cette machination démocrate a coûté sa carrière et sa réputation au général Flynn… C’est donc un juste rattrapage de la part de Donald Trump.

Historiquement, les pardons présidentiels sont-ils systématiques ou même fréquents?

Le pardon présidentiel en dit souvent plus sur celui qui pardonne que celui qui est pardonné. Donald Trump a pardonné à un officier de carrière qui a dédié sa vie aux Etats-Unis, juste avant la célébration nationale de Thanksgiving qui est la grande fête familiale aux Etats-Unis. Lorsque Bill Clinton a quitté la Maison blanche, en janvier 2001, il a pardonné à Mark Rich, un grand financier en exil condamné à de nombreuses reprises pour fraude fiscale. Il se trouve que juste avant ce pardon, l’épouse de Mark Rich avait fait d’énormes contributions financières à la fondation Clinton et au parti Démocrate. C'était donc un renvoi d'ascenseur, une preuve de la corruption du clan Clinton. En janvier 2017, lors de son dernier jour en tant que président, Obama a pardonné entre autres un certain Oscar Lopez Rivera, un terroriste portoricain d’extrême gauche qui était dans les années 70 à la tête de l'armée de libération nationale du Porto Rico. A ce titre il avait organisé plus d’une centaine d’attentats aux Etats-Unis dont un à New York en 1975 ayant fait quatre morts. Cela montre combien Obama était un idéologue avec un faible pour les radicaux d'extrême-gauche, même ceux ayant fait couler du sang américain !

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