Et si la Chine était en train de doubler la créativité d'une Silicon Valley en panne d'idées ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Tik Tok Weibo Chine Etats-Unis international réseaux sociaux silicon valley
Tik Tok Weibo Chine Etats-Unis international réseaux sociaux silicon valley
©Drew Angerer / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Réseaux sociaux

Alors que la créativité des sociétés de la Silicon Valley a eu une influence considérable à travers le monde, la Chine pourrait concurrencer ce modèle, notamment sur la question des réseaux sociaux. We Chat, TikTok et Weibo sont-ils une réelle menace pour l'hégémonie des firmes de la Silicon Valley ?

Jean-Paul Pinte

Jean-Paul Pinte

Jean-Paul Pinte est docteur en information scientifique et technique. Maître de conférences à l'Université Catholique de Lille et expert  en cybercriminalité, il intervient en tant qu'expert au Collège Européen de la Police (CEPOL) et dans de nombreux colloques en France et à l'International.

Titulaire d'un DEA en Veille et Intelligence Compétitive, il enseigne la veille stratégique dans plusieurs Masters depuis 2003 et est spécialiste de l'Intelligence économique.

Certifié par l'Edhec et l'Inhesj  en management des risques criminels et terroristes des entreprises en 2010, il a écrit de nombreux articles et ouvrages dans ces domaines.

Il est enfin l'auteur du blog Cybercriminalite.blog créé en 2005, Lieutenant colonel de la réserve citoyenne de la Gendarmerie Nationale et réserviste citoyen de l'Education Nationale.

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Atlantico.fr : Depuis 30 ans, la Silicon Valley façonne nos vies en étant quasi seule sur son secteur. Mais récemment des sociétés chinoises commencent à frapper en son cœur : les réseaux sociaux. We chat, Weibo et surtout Tik Tok représentent-t-ils des challengers réels à l’hégémonie des firmes de la Silicon Valley ? 

Jean-Paul Pinte : Depuis l'arrivée au pouvoir de Xi Jinping en 2012, la Chine a considérablement accéléré son rattrapage économique, au point de concurrencer désormais l'Amérique dans la course technologique mondiale. « La Chine est nettement en avance sur ses pairs occidentaux dans certains domaines, comme l'e-commerce et le live streaming qui font désormais partie du quotidien des Chinois, ou les paiements mobiles qui ont pratiquement supplanté les transactions en argent comptant », relève Rebecca Fannin, l'auteur du livre « Tech Titans of China ».

La Chine est ainsi le pays des réseaux sociaux avec une société basée sur le lien social et les contacts interpersonnels. Les consommateurs chinois en 2020 ne font plus confiance dans le gouvernement, ni dans la presse, ils font confiance en leurs réseaux.

Les chinois n’utilisent pas les réseaux sociaux comme Facebook, Twitter, Instagram, linkedln, …, ils ont leurs propres réseaux sociaux. Ainsi pour percer en Chine, il faut s’adapter et se rendre visibles sur ces derniers.

Toutes les marques l’ont déjà compris là-bas et adaptent leur stratégie marketing à des réseaux sociaux comme WeChat, Weibo, Douyin (Tik Tok), Zhihu, Little red book, …

Shenzhen continue de prospérer en tant que centre technologique de Chine et d’Asie et représente aujourd’hui sa Silicon Valley. La ville chinoise est déjà considérée comme une destination de luxe sophistiquée pour les consommateurs du continent, mais la « Silicon Valley of China » était jusqu’à récemment éclipsée par les villes internationales de Hong Kong, Beijing et Shanghai.

Le site l’Echo.be nous rappelle que ces cinq dernières années, l’Empire du Milieu a vu naître des géants technologiques qui sont en voie de marquer des points au nez et à la barbe de noms célèbres tels que Facebook, Apple et Tesla. En quelques années à peine, des entreprises comme Tencent – célèbre pour sa super-application WeChat – et Alibaba ont permis aux Chinois de payer et de voyager sans cash. La moitié des transports publics à Shenzhen sont équipés de moteurs électriques, grâce au constructeur automobile BYD. Ce n’est qu’une question de temps avant que ces entreprises changent également nos vies.

Selon un rapport du groupe de médias Hurun, un spécialiste du monde des affaires basé à Shanghai, la capitale chinoise dénombre 93 pépites technologiques, contre 68 pour San Francisco, où se trouve la Silicon Valley.

La capitale chinoise Pékin surpasse désormais la Silicon Valley en nombre de "licornes", ces jeunes entreprises à forte croissance et valorisées à plus d'un milliard de dollars, selon une étude publiée ce mardi. Fin mars, 586 compagnies de ce type étaient référencées dans le monde, d'après un rapport du groupe de médias Hurun, spécialiste du monde des affaires et basé à Shanghai (est de la Chine).

Ces entreprises représentaient au total 1.900 milliards de dollars (1.614 milliards d'euros) en termes de valorisation, soit le PIB de l'Italie, précise l'étude.

En nombre de licornes nous rappelle le site La Tribune, les États-Unis dominent d'une courte tête le podium mondial (233) juste devant la Chine (227).

Mais avec 93 pépites technologiques installées à Pékin, la capitale chinoise surpasse désormais San Francisco (68), où se trouve la Silicon Valley, selon Hurun. Shanghai arrive en troisième position avec 47 licornes référencées.

Preuve d’une guerre entamée il y a bien longtemps, l’application mobile TikTok est aujourd’hui encore accusée par le président américain Donald Trump de récolter des données personnelles et des informations pour le gouvernement chinois. Mais d’autres applications chinoises pourraient être interdites par les États-Unis, au nom de la sécurité nationale.

Il y a d’abord le réseau social WeChat qui propose des services divers, de la simple messagerie à la commande de repas à domicile, en passant par un service de paiement. Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a affirmé que son administration envisageait d’interdire cette application, comme l’a déjà fait le Gouvernemenr Indien.

Dans le collimateur des autorités américaines, il y a également le moteur de recherche Baidu, concurrent asiatique de Google, puis Weibo, l’équivalent chinois de Twitter et aussi AliExpress, l’application du géant chinois de la vente en ligne Alibaba. À cela s’ajoutent tous les logiciels de reconnaissance faciale.

Twitter, pour sa nouvelle mise à jour, reprend le concept de “stories” déjà utilisé par Snapchat et Instagram. Instagram, avec “reels”, semble plagier le concept de vidéo en boucle de Tik Tok.  La Silicon Valley est-elle en panne d’inspiration ?

Paradis de l’innovation, berceau de start-up dont la croissance fulgurante leur a rapidement permis de conquérir la planète, écosystème aujourd’hui encore sans équivalent dans le monde, l’histoire de la Silicon Valley est une success-story qui a largement profité à la croissance américaine et a permis aux États-Unis d’asseoir leur leadership dans un monde où la connaissance est un enjeu majeur de compétitivité économique. C’est ce que nous dit Martine Azuelos dans un article. Pourtant, si sa santé reste florissante, les défis auxquels la Silicon Valley doit aujourd’hui faire face laissent planer des incertitudes sur son avenir, car ils risquent de l’atteindre au cœur même de son écosystème dans un contexte où sa capacité à dynamiser la croissance nationale est mise en cause.

Dans un podcast dédié à la Silicon Valley Laetitia Vitaux et Nicolas Colin étudient depuis 10 ans cette région des Etats-Unis qui a vu naître le monde du digital et les plus grandes inventions.

Pour ces deux connaisseurs de la Silicon Valley, l’année 2020 est décisive à bien des égards. D’un côté, la pandémie et le confinement semblent accélérer (ou révéler) une transition numérique qui renforce les géants de la Silicon Valley. On n’a jamais autant regardé Netflix, ni autant eu recours à Amazon que pendant la période de confinement. La transformation de nos usages fait la part belle aux entreprises numériques.

Mais d’un autre côté, l’année 2020 marque un retour de bâton sans précédent contre les géants de la Silicon Valley. Certains, comme Facebook, sont accusés de complicité avec Donald Trump. La période semble consolider la vision de ces entreprises comme le “nouvel empire du mal”. Accusées de nourrir le racisme, de reproduire le sexisme, et d’alimenter un capitalisme de surveillance délétère, les grandes entreprises numériques sont au coeur des guerres culturelles américaines. À cela s’ajoutent une multitude d’autres problèmes. La fragmentation du monde et la montée en puissance de la Chine ont fait perdre à certaines de ses entreprises une partie de leurs ambitions de conquête du monde. Devront-elles se replier exclusivement sur le marché américain et abandonner l’Asie et le reste du monde ?

Dans cette guerre des réseaux et des technologies après Instagram qui a copié la plupart des fonctionnalités de Snapchat, voilà que Twitter commence à s’y mettre.  Twitter voudrait aussi rattraper son retard sur Snapchat, Facebook et Instagram. Au Brésil, par exemple, le réseau social à l’oiseau bleu teste une fonction « Fleet », un autre nom pour « story ».

Selon le site Journal du geek, Twitter était en avance sur son temps lorsqu’il a introduit le hashtag, il est un peu à la traîne concernant la mécanique des « stories », popularisée par Snapchat, Facebook et Instagram. Pour compenser ce retard, le réseau social à l’oiseau bleu teste actuellement une fonction similaire au Brésil, « l’un de ses marchés les plus bavards », qui pourrait bientôt se propager à travers le monde.

Avec Fleet, Twitter opère un rattrapage sur ses concurrents autant qu’un retour aux sources.

“Il est essentiel que les gens se sentent inspirés et aient les outils et les capacités nécessaires pour parler et créer du contenu afin que le reste d’entre nous reste informé de nos intérêts”, a déclaré Kayvon Beykpour, responsable produit de Twitter, lors d’un appel à la presse.

Twitter a ainsi annoncé qu’elle déployait à l’échelle mondiale un format appelé Fleets qui permet aux utilisateurs de partager du texte, des photos et des vidéos qui disparaissent après 24 heures. Les utilisateurs de médias sociaux ont publié plus de contenu éphémère après que Snapchat a introduit Stories, un format qui a été copié par d’autres sites de médias sociaux, notamment Facebook, Instagram, LinkedIn et Pinterest.

La Chine va-t-elle façonner la technologie du futur ? Ou la Silicon Valley peut-elle se renouveler ?

Aujourd’hui la Chine menace les géants de la technologie…

Un chiffre repris dans le site Capital.fr suffit à prendre la mesure de la révolution en cours au pays des baguettes : en dix ans, les dépenses de R&D y ont augmenté de 900% et elles devraient atteindre les 400 milliards de dollars en 2020. "C’est vertigineux !", confirme Antoine Mynard, directeur du bureau du CNRS à Pékin. Les grandes revues scientifiques mondiales sont désormais remplies d’études rédigées par des chercheurs chinois, et la liste des inventions et des avancées scientifiques made in China ne cesse de s’allonger.

Selon l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle), le pays occupe désormais le deuxième rang mondial pour le nombre de brevets déposés, juste derrière les Etats-Unis, mais devant le Japon. Si la patrie de Xi Jinping continue à ce rythme-là, elle devrait carrément ravir la médaille d’or aux Etats-Unis d’ici trois ans. "Avant on regardait en direction de la Silicon Valley, maintenant nous avons les yeux rivés sur la Chine : elle est passée de suiveuse à leader", confirme Thomas Serval, fondateur de Baracoda, un groupe industriel français concevant des objets connectés.

Les chinois sont, par exemple, particulièrement bien placés dans la course à l’intelligence artificielle (13 milliards d’euros sur la table depuis 2016 pour booster ce secteur).

Après avoir mis le paquet sur les activités de recherche, développé à grande échelle la formation de ses ingénieurs, incité les cerveaux partis à l’étranger à revenir au pays et arrosé les entreprises pour qu’elles rachètent des pépites technologiques, les autorités ont accéléré la cadence en 2015 avec le lancement du plan "Made in China 2025". Objectif : hâter l’automatisation des usines et développer des secteurs stratégiques pour se sevrer de la dépendance aux technologies étrangères.

Deuxième raison de la fantastique percée chinoise toujours selon le site Capital.fr: le pays dispose d’un tissu industriel extrêmement puissant, dynamique et doté de capacités financières considérables. A commencer par ses géants du Web, les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi), les équivalents chinois des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Contrairement à ceux de l’Union européenne, les dirigeants chinois ont en effet choisi de bloquer une partie des plates-formes américaines à la frontière, ce qui a permis de faire émerger des entreprises locales, capables d’investir beaucoup d’argent dans les technologies du futur grâce à leur montagne de cash.

La France accuse un grand retard par rapport à la Chine et aux USA et faudra t-il pour autant se résigner à n’avoir qu’un avenir de Disneyland pour touristes américains et… chinois ? Pas forcément. D’abord parce que, même si la Chine a progressé à pas de géants, elle ne nous a pas encore totalement rattrapés dans certains secteurs. Par exemple, son futur avion Comac C919 reste en grande partie dépendant de technologies étrangères, notamment françaises. De plus, il n’est pas dit que les Etats-Unis laissent Pékin passer à la vitesse supérieure sans réagir. "Ils viennent de se rendre compte de la formidable avancée chinoise en matière de technologie et ils vont tout faire pour la retarder", remarque David Baverez (investisseur, installé à Hong Kong depuis 2011). De fait, la guerre commerciale menée par Donald Trump vise en priorité les secteurs considérés comme clés par le gouvernement chinois.

Dans les avancées technologiques à venir pour la Chine il faut noter Alibaba, l’Amazon chinois : "L’activité principale du groupe reste bien sûr l’e-commerce, mais l’entreprise a élargi son champ au paiement, au “new retail” (le nouveau commerce, NDLR), à la logistique, au cloud, à la “smart city” ou au véhicule autonome", détaille Jean-Cyrille Girardin, responsable des partenariats stratégiques d’Alipay (la solution de paiement du groupe) en Europe.

Alors qu’en France nous avons encore du mal avec le paiement sans contact, ils sont, par exemple, déjà en train de se convertir massivement à celui par mobile. Au point d’avoir quasiment évincé le cash de leur pays. "En Chine, la population est passée à ce qu’il y a de plus innovant en sautant l’étape de la carte de crédit", souligne Chunyan Li. "De plus, ce sont les jeunes, plus portés sur l’achat de nouvelles technologies, qui ont de l’argent là-bas, et non les plus âgés comme en Occident", rappelle David Baverez, essayiste et investisseur basé à Hong Kong.

Enfin quelques chiffres qui nous donnent une idée de ce qui se préfigure en Chine :

- Déjà 176 millions de caméras de reconnaissance biométrique.

- Déjà 81 trillions de yuans dépensés en paiement mobile.

- Bientôt 200 milliards de yuans dans les circuits intégrés.

- Bientôt un marché de 500 milliards de dollars pour les voitures autonomes.

- Bientôt 200 banques et institutions adopteront la communication quantique.

- Déjà 130 milliards investis par an dans la green tech.

- Bientôt 1.000 magasins dans le "new retail".

- Déjà 50% des capacités de production des batteries.

- Déjà plus de 80% du marché mondial des drones civils.

- Déjà 500 "villes intelligentes" réparties dans tout le pays.

- Bientôt 1.650 milliards investis dans la 5G

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