Pourquoi nous devrions découvrir beaucoup plus d’astéroïdes proches de la Terre qu’auparavant

Atlantico.fr : Deux nouveau corps interstellaires ont été observés par les astronomes. Quelle est la nature de ces objets ? En quoi cela marque-t-il une découverte majeure ?

Olivier Sanguy : Il s’agit tout d’abord de ‘Oumuamua, découvert en octobre 2017 à l’aide d’un télescope automatique situé à Hawaii. On a au départ pensé que cet objet était une comète avant que des observations le définissent plutôt comme un astéroïde. Ensuite, en août 2019, l’astronome amateur de Crimée Gennadiy Borisov a découvert une comète qui porte son nom (et plus exactement 2I/Borisov). Dans les deux cas, l’analyse des trajectoires de ces objets a montré qu’ils ne provenaient pas de notre propre Système solaire, mais d’en-dehors. Ce sont donc un astéroïde et une comète qui ont été éjectés de leur système stellaire d’origine (qui n’est pas le même), puis qui ont vogué dans l’espace interstellaire avant de traverser notre Système solaire. Cette double découverte est majeure, car elle confirme par l’observation ce qu’on théorisait depuis des dizaines d’années, à savoir que des objets comme des astéroïdes ou des comètes peuvent s’échapper de leur système d’origine pour éventuellement visiter le nôtre.

En quoi ces corps interstellaires impactent-ils notre compréhension de la galaxie ? Une hypothèse controversée qualifiait Oumuamua -premier corps interstellaire découvert- de sonde extraterrestre, quelles sont les raisons d'une telle théorie folle ?

Ces objets peuvent plutôt nous donner des indications sur les autres systèmes stellaires. La composition de ‘Oumuamua et Borisov, déterminée par spectroscopie, montre une assez grande similitude avec les astéroïdes ou les comètes de notre Système solaire. Ce qui est assez logique, car les autres systèmes stellaires se sont formés avec les mêmes mécanismes que le nôtre. Pour l’hypothèse de la sonde extraterrestre, elle vient du fait que ‘Oumuamua présentait une altération de sa trajectoire, une très légère accélération, qui ne s’expliquait pas si ce n’était pas une comète. Or ce n’est pas une comète puisqu’on n’a pas détecté de dégazage (typique d’une comète). Ensuite, la forme de l’objet est très allongée, donc inhabituelle, avec des proportions qui évoquent une baguette de pain. Au final, des observations complémentaires expliquent son accélération par une poussée qui découle de la pression de radiation solaire ou par sa forme allongée et sa rotation qui impliquent une émission thermique particulière (la face chauffée par le Soleil d’un astéroïde crée une poussée lorsque la chaleur emmagasinée est libérée dans l’espace lorsqu’elle arrive dans l’équivalent de la nuit). Même si cette hypothèse a été émise par des scientifiques, elle était considérée comme la moins probable. Ceci dit, le SETI (le célèbre organisme de recherche de signaux extraterrestres) a tout de même procédé à une écoute radio de ‘Oumuamua, mais sans détecter un signal artificiel.

Les astronomes espèrent en observer davantage dans les années à venir ? Et si oui, pourquoi ?

Les astronomes avancent en effet que d’autres objets d’origine interstellaire devraient être détectés à l’avenir. L’estimation actuelle est qu’un objet de ce type, astéroïde ou comète, traverse notre Système solaire chaque année. C’est l’évolution technologique de nos moyens d’observation qui permet de repérer de tels objets qui sont souvent très peu lumineux et restent accessibles à nos télescopes que relativement peu de temps.