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Pourquoi nous devrions arrêter de parler de temps d’écran pour nos enfants
©Reuters

Bad choice ?

Dès leur plus jeune âge, les enfants se voient accorder, par leurs parents, un "temps d'écran". Un terme très peu défini, qui correspond au nombre de minutes ou d'heures durant lesquelles l'enfant peut utiliser un ordinateur, une tablette...

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini est docteure en sociologie de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et et actuellement chercheuse invitée permanente au CREM de l'université de Lorraine.

 

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Atlantico : Le terme "temps d'écran" peut correspondre à tous types d'écrans et de contenus, il est donc très vaste. En quoi ceci peut-il être problématique ? Quelles confusions cela peut-il créer chez les enfants ?

Nathalie Nadaud-Albertini : Le terme « temps d’écran » est problématique, car il ne s’intéresse qu’à la durée et fait comme si les contenus en eux-mêmes étaient sans importance. On finit par associer « temps d’écran » à l’idée d’un temps mal investi, éloigné de la réalité, où l’esprit n’est pas sollicité et où la passivité domine.

Les enfants perçoivent cette association et finissent par se dire que le temps passé devant un écran est quelque chose de mal, que ce soit pour eux ou pour leurs parents. Par exemple, si un enfant voit un de ses parents en train de vérifier une recette sur son smartphone, au lieu de se dire qu’il se consacre à la préparation du repas au lieu de jouer avec lui, il pensera que le parent préfère perdre son temps plutôt que de s’occuper de lui.  

Le terme "temps d'écran" ne fait référence qu'à la durée, pourtant plus que la durée durant laquelle l'enfant utilise un ordinateur, un smartphone ou une tablette, n'est-ce pas le contenu qui importe ?

Oui, le contenu importe énormément. Ce n’est pas la même chose d’interagir en visioconférence avec des collègues ou des membres de sa famille, de lire la presse en ligne, de regarder un documentaire ou un contenu de pur divertissement, ou d’écrire à telle ou telle personne. Avec le terme « temps d’écran », on fait comme si tous les contenus se valaient et ne pouvaient nous apporter que du négatif. On en fait une sorte de boîte noire équivalant à une forme de mort de la pensée, de l’action et de l’interaction humaines. On fait comme si « le temps d’écran » était du temps retiré à notre vie personnelle, professionnelle et sociale.

De plus, tout dépend de ce que l’on fait du contenu. C’est là que le rôle de l’environnement et des parents est prépondérant. En effet, si le contenu est discuté, exploité, valorisé en le reliant à d’autres connaissances, en suscitant la curiosité et l’esprit critique chez l’enfant, le temps passé devant un écran sera profitable. En revanche, si on laisse l’enfant seul face au contenu, il sera plus difficile pour lui de l’exploiter au mieux.

Autrement dit, la différence de contenu importe. Et ce que l’on fait de ce contenu dans l’éducation donnée à l’enfant importe également.

Alors que "temps d'écran" ne prend pas en compte les problématiques actuelles liées aux écrans, les parents ne devraient-ils pas utiliser une autre terminologie ? Quelle expression privilégier et comment l'adapter à l'âge de l'enfant ? 

Au lieu d’utiliser le terme général et trop vague de « temps d’écran », il serait en effet plus judicieux d’utiliser une autre terminologie. Personnellement, j’opterais pour quelque chose de simple : désigner le contenu et l’action. Par exemple, « regarder un documentaire », « discuter en visioconférence avec des collègues ou des membres de la famille », « lire la presse », « lire un livre », « regarder tel film », « écrire à telle ou telle personne » etc. Cela permettrait de mieux rendre compte de la diversité des actions et des contenus et donc de mieux indiquer qu’ils font partie de la vie et ne sont pas nécessairement du temps perdu ou mal exploité.

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