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Pourrions-nous encore survivre sans GPS ? (Et non, on ne vous parle pas que de facilité d’orientation)
©Josep LAGO / AFP

Dépendance

Les GPS occupent une part majeure dans la vie quotidienne, notamment pour se déplacer. Sommes-nous devenus dépendants aux GPS ?

François Jeanne-Beylot

François Jeanne-Beylot

François JEANNE-BEYLOT est spécialiste de la recherche d'information, l'intelligence économique, la veille et l'influence. Dès 2000, il créé la société Troover qui accompagne toujours aujourd'hui ses clients et France et Europe et en Afrique dans la recherche d'information structurée, l'intelligence économique et la veille sur Internet (www.troover.com). En parallèle, il a créé en 2007 la société InMédiatic (www.inmediatic.net), dédiée à la gestion de notoriété et d'influence sur Internet. Longtemps associée à différentes agences de RP puis de communication, InMédiatic est aujourd'hui une filiale à 100 % de Troover en faisant un des rares cabinets à proposer des prestations conjointes et coordonnées de veille et d'influence en ligne, allant de la formation à l'externalisation en passant par toutes les étapes de l'accompagnement.

Il a rédigé ou participé à la rédaction de plusieurs ouvrages, il est professeur associé à l'École de Guerre Économique de Paris, intervenant fondateur de l'École Panafricaine d'Intelligence Économique et stratégique de Dakar et intervenant régulier de plusieurs autres écoles, conférences et colloques en tant que spécialiste d'Internet, de l'intelligence économique digitale et de l'influence.

Très présent en Afrique, il est l'initiateur et le coordinateur des Assises Africaines de l'Intelligence Économique qui sont devenues, depuis 2016, le rendez-vous incontournables des professionnels de l'IE en Afrique. Il est également Rédacteur en chef du Portail Africain de l'Intelligence Économique qui publie notamment plusieurs lettres de veille en France et en Afrique.

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Atlantico.fr : Les GPS ont une part très importante dans la vie de chaque individu et participent à l'organisation d'un bon nombre de choses dans notre société. Ils nous permettent de nous déplacer, aux armées de localiser des zones minées lors des conflits etc. 

Comment fonctionnent les GPS ? Que se passerait-il si les GPS arrêtaient de fonctionner ? (pour l'homme, les infrastructures, les activités) 

François Jeanne-Beylot : Il convient d’abord de préciser de que l’on entend par GPS. Car, en effet cet acronyme a deux significations : Dans le langage courant on entend par GPS, un assistant de navigation : un appareil électronique ou une application qui permet de se géolocaliser ou d’offrir des services de positionnement (itinéraire, trafic, calcul de vitesse, etc.) grâce à un système de positionnement par satellites. Mais c’est aussi le nom du système états-unien de positionnement par satellites : le Global Positioning System (GPS). Développé et appartenant au gouvernement des États-Unis, il a été mis en place par le Département de la Défense à des fins militaires dès 1960, sur une initiative du Président Nixon. Le premier satellite du système GPS est lancé en 1978 ; En 1995, 24 satellites sont opérationnels (plus 4 en réserve) achevant le dispositif et le rendant totalement opérationnel, en dégradant toutefois le signal de façon volontaire, avec une précision d’une centaine de mètres pour un usage civil. Cette restriction de précision est levée en mai 2000, suite à un accident d’avion : le crash de la Korean airlines en 1983 intervient en pleine guerre froide. L'avion ne disposant pas de système de navigation performant, le vol dévia de sa route et entra dans un espace aérien soviétique interdit. Il fut abattu par un avion de chasse provoquant la mort de 269 personnes. En réaction, le Président Reagan annonça que la technologie GPS serait ouverte pour des usages civils dans le futur. Ce n’est qu’un de ses successeurs, Bill Clinton, qui offrira la technologie au grand public, dix-sept ans après. On le voit ainsi, le système de positionnement satellitaire est hautement stratégique. Si, celui développé aux Etats-Unis est le premier et le plus utilisé, il en existe d’autres : GLONASS, son concurrent Russe, opérationnel quelques années à la fins des 90’s puis depuis 2010, Galileo conçu par l’Union Européenne et fonctionnel depuis 2016, Compass ou Beidou en Chine, pour les principaux.

Pour revenir à la question du fonctionnement d’un système de position par satellite, il calcule la distance qui sépare un récepteur de plusieurs satellites, par triangulation. Le récepteur reçoit régulièrement les informations permettant de calculer la position des satellites ainsi que la distance qui le sépare de ces satellites. Il peut donc en déduire sa propre position. Précisons, que le dispositif de localisation par satellite est un système passif. Le récepteur se limite à recevoir les signaux des satellites et d'en déduire une position. Le réseau des satellites ne reçoit aucune information des récepteurs au sol. Il est donc techniquement incapable d'effectuer la surveillance d'un territoire d'une quelconque façon. Certains appareils peuvent en revanche combiner un récepteur de localisation par satellite et un émetteur. C’est le cas de l’AIS, de l’APRS, d’eCall ou autres tachymètres. 

Ainsi, si le système états-unien s’arrêtait de fonctionner, ou si son usage était de nouveau limité ou réduit pour les usages civils, nous pourrions nous connecter à d’autres systèmes, comme son concurrent européen. Le déploiement de Galileo doit s'achever vers 2020, il sera alors constitué de trente satellites dont six de rechange. La précision attendue sera plus importante que pour le système GPS avec une déclinaison gratuite et un niveau de qualité encore supérieur dans le cadre de services professionnels payants. Si cela se trouve, l’application de géolocalisation que vous utilisez s’y connecte déjà, comme c’est le cas d’au moins un milliard d’appareils aujourd’hui. 

Sommes-nous, de fait, dépendants aux GPS ? 

Il y a donc une double dépendance : en premier lieu, celle au système choisi, mais celle-ci, nous l’avons vu, peut être contournée. Attention toutefois, votre appareil ou application offre rarement le choix aujourd’hui du système de localisation. Il faut donc vérifier que votre appareil soit compatible avec tel ou tel système

La véritable dépendance réside en fait dans celle de l’utilisateur à ces applications dont certains (beaucoup) ne peuvent plus se passer. Régulièrement des accidents ou erreurs sont dus à une confiance abusive donnée par l’utilisateur aux GPS. Faut-il rappeler que notre cerveau se situe de notre coté de l’écran et que ces applications et appareils sont là pour nous rendre un service. Beaucoup d’entre nous ont pu mesurer leur impuissance face à l’inopérabilité d’un GPS (le plus souvent parce qu’il ne capte pas ou qu’il n’a plus de batterie …) et dans ce cas une solution de secours, moins connectée, s’avère fort utile. Ces services peuvent non seulement nous rendre dépendants mais aussi vulnérables.

En effet, si, nous l’avons vu plus haut le système de localisation par satellites est passif et par nature ne reçoit pas d’information des terminaux, de nombreuses applications utilisent nos données de géolocalisation. Ainsi Google enregistre l’historique de positions des téléphones Android, des applications (Waze, Google Maps, entre autres) partagent la position de ses utilisateurs pour estimer le trafic routier, Strava permet à ceux qui l’utilisent de partager leurs performances sportives, etc. Il convient donc d’être prudent sur l’usage qui peut être fait de nos données par ces applications, ou par d’autres, si ces données sont partagées. Suite à l’affaire Strava qui a permis de positionner des militaires français déployés sur des théâtres d’opérations, parce qu’ils partageaient leurs performances et positions avec l’application, l'état-major français a, par exemple, rappelé à ses personnels la nécessité de respecter les règles élémentaires de sécurité et notamment de désactiver les fonctions de géolocalisation. Cette dépendance, non pas au système de géolocalisation, mais aux applications sociales, aurait pu couter cher … 

En conclusion, il nous parait nécessaire qu’à un niveau géostratégique plusieurs systèmes puissent être proposés, afin que les citoyens et les états ne soient pas dépendants de ces dispositifs. Par ailleurs, il convient de rappeler aux utilisateurs que les données de géolocalisation, dont l’usage peut parfois s’avérer pratique, peuvent aussi être partagées et donc présenter un risque. Enfin, même si je reconnais utiliser comme tous régulièrement mon GPS, je ne pourrais personnellement terminer cette tribune sans partager mon plaisir de lire une carte routière ou une carte marine. En mer, leur présence est obligatoire à bord, même en présence de tout appareil électronique. Mais au delà, leur lecture approfondie permet toujours de découvrir un lieu dit ou une curiosité sur terre dont le GPS se moque allègrement !

Chacun devrait donc pouvoir se passer de GPS, même s’il en fait usage, afin, avant tout, de ne pas être dépendant. 

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