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 La gendarmerie tournée vers l’avenir sous l’égide du ministère de l’Intérieur
©BERTRAND GUAY / AFP

Bonnes feuilles

Alain Bauer et Marie-Christine Dupuis-Danon publient "Les Protecteurs : la gendarmerie nationale racontée de l’intérieur". Ils dévoilent une histoire intime de la gendarmerie nationale et retracent sa genèse. Les auteurs offrent également une plongée en profondeur dans la gendarmerie des temps modernes. Extrait 2/2.

Marie-Christine Dupuis-Danon

Marie-Christine Dupuis-Danon

Après une carrière en banque d’affaires, Marie-Christine Dupuis-Danon a intégré l’ONU pour rejoindre l’équipe responsable de la lutte anti-blanchiment. Aujourd’hui spécialiste indépendante reconnue de la lutte contre la finance criminelle, elle exerce ses activités de consultante et de coach auprès des dirigeants des plus grandes entreprises.

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Alain Bauer

Alain Bauer

Alain Bauer est professeur de criminologie au Conservatoire National des Arts et Métiers, New York et Shanghai. Il est responsable du pôle Sécurité Défense Renseignement Criminologie Cybermenaces et Crises (PSDR3C).
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Le début du XXIe siècle coïncide avec une évolution marquante pour la gendarmerie. La loi 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie précise que « sans préjudice des attributions de l’autorité judiciaire pour l’exercice de ses missions judiciaires, la gendarmerie nationale est placée sous l’autorité du ministre de l’Intérieur, responsable de son organisation, de sa gestion, de sa mise en condition d’emploi et de l’infrastructure militaire qui lui est nécessaire ». Pour autant, la gendarmerie reste « une force armée instituée pour veiller à l’exécution des lois ». La gendarmerie change donc de ministère de tutelle. Après plus de deux siècles sous la férule du ministre chargé des Armées, elle passe en bloc au ministère de l’Intérieur. Le lien avec les armées n’est pas coupé pour autant. Certaines missions militaires continuent à relever intégralement du ministère de la Défense et le statut des gendarmes reste inchangé : ils demeurent des militaires à part entière. L’élaboration de cette loi consacre l’aboutissement de la volonté du président de la République Nicolas Sarkozy. Déjà en 2003, alors ministre de l’Intérieur, celui-ci avait tenté de provoquer ce changement de tutelle mais il s’était heurté à la volonté de la ministre de la Défense de l’époque, Michèle Alliot-Marie. En 2007 néanmoins, un premier pas est franchi avec la subordination fonctionnelle renforcée de la gendarmerie au ministre de l’Intérieur. Pour préserver au mieux son identité et ses capacités opérationnelles, le directeur général de la gendarmerie parvient à faire accepter le principe d’un texte de loi qui définisse les contours de l’intégration au sein du ministère de l’Intérieur. Le texte, adopté par l’Assemblée nationale et le Sénat, consacre la nature militaire de la gendarmerie. Il préserve notamment le statut particulier de ses membres. La mise en œuvre de la loi s’accompagne d’un protocole entre les armées et la gendarmerie. Cette dernière, en vertu de ce protocole, continue à bénéficier d’un certain nombre d’appuis et de soutiens de la part de la Défense (en matière de service social, de soutien sanitaire, de gestion des ressources humaines…). Au sein du ministère de l’Intérieur, les gendarmes ne sont pas les seuls militaires : ils rejoignent les 8 500 sapeurs-pompiers de Paris, les 2 500 marins-pompiers de Marseille et les 1 500 hommes et femmes des unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile. Ils continuent à siéger au Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), organe de concertation des armées depuis 1969 dont les déclinaisons par armée (les Conseils de la fonction militaire) ont été créées en 1989. Contrairement aux craintes exprimées alors par certains, le changement de tutelle, dix ans après, ne s’oriente pas du tout vers une fusion des deux forces nationales de sécurité intérieure. À tous les niveaux de l’État, l’attachement à l’existence de deux forces différentes mais complémentaires a fait l’objet de nombreuses déclarations. Les crises les plus récentes (l’intervention massive sur l’accident de la Germanwings, les attentats de 2015, la longue mobilisation des Gilets jaunes) ont permis à la gendarmerie de faire valoir la plus-value que lui apportent son organisation et son statut militaires. Au sein de son ministère, elle a trouvé sa place. Elle « est destinée à assurer la sécurité publique et l’ordre public, particulièrement dans les zones rurales et périurbaines, ainsi que sur les voies de communication. Elle contribue à la mission de renseignement et d’information des autorités publiques, à la lutte contre le terrorisme, ainsi qu’à la protection des populations. Elle participe à la défense de la patrie et des intérêts supérieurs de la nation, notamment au contrôle et à la sécurité des armements nucléaires ».

Une institution d’avenir

Fruit d’un peu moins de huit cents ans d’histoire, la Gendarmerie nationale offre aux spécialistes des questions de sécurité intérieure le modèle d’une réponse originale à une problématique universelle, celle de la sécurité due par l’État aux biens et aux personnes. Elle a su s’adapter aux multiples changements politiques, sociaux et sociétaux du pays. Militaire par essence, profondément ancrée dans les valeurs démocratiques, très attachée à une modernité qu’elle s’applique à utiliser à son avantage, la Gendarmerie nationale, comme le rappelle le général d’armée Richard Lizurey, est au service des populations avant tout. Sa structure hiérarchique pyramidale, qui offre à ses chefs une réelle capacité d’action en toutes circonstances, permet de faire face à l’événement de manière fluide, depuis l’arrivée de la patrouille des premiers intervenants jusqu’à l’engagement des moyens les plus lourds. Derrière chaque militaire de brigade, c’est toute une institution qui est prête en permanence à déployer ses moyens humains et matériels.

L’organisation de la gendarmerie tout comme sa politique de recrutement et de gestion des effectifs constituent un atout qui lui permet d’adapter ses modes d’action aux problématiques qu’elle est amenée à rencontrer. Aujourd’hui, elle doit relever le défi de maintenir un niveau de service au public équivalent tout en permettant aux militaires qui la composent de bénéficier des avancées sociales dont leurs concitoyens peuvent par ailleurs profiter. Ainsi que l’écrit le directeur général de la Gendarmerie nationale : « Ce que seront les besoins de nos concitoyens et nos missions dans cinquante, trente, ou même dix ans, personne ne peut le prévoir avec exactitude, au-delà bien sûr de la perception de grandes tendances qu’il est de notre devoir d’identifier. Quelles que soient ces tendances, territoriales, législatives, sociétales, technologiques, le sens de notre métier, servir la population, assurer sa sécurité, restera toujours le même. » L’exercice est délicat, entre les valeurs fondamentales qui caractérisent le statut militaire et les aspirations légitimes des individus. Pour ses chefs de tous niveaux, il s’agit de continuer à exercer pleinement les prérogatives du commandement militaire (diriger l’action des personnels, leur fournir les moyens de réaliser les missions, valoriser les subordonnés pour leurs succès, endosser la responsabilité des échecs éventuels) tout en adoptant un style de commandement en adéquation avec l’époque. Aux observateurs extérieurs, notamment étrangers, la gendarmerie de ce début de XXIe siècle offre l’image forcément surprenante d’un corps fermement accroché à ses traditions, mais assurément tourné vers l’avenir.

Extrait du livre d’Alain Bauer et de Marie-Christine Dupuis-Danon, "Les Protecteurs: La gendarmerie nationale racontée de l'intérieur", publié aux éditions Odile-Jacob

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