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Mal de dos : de nouveaux appareils permettent de corriger les postures
©Reuters

Santé

De plus en plus de patients se plaignent du mal de dos, dans le cou ou dans les épaules. Ces douleurs proviennent généralement d'une mauvaise posture.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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Atlantico.fr : A cause des longues heures passées devant un écran d'ordinateur, les médecins reçoivent de plus en plus de visites de patients -parfois très jeunes- se plaignant de douleurs au dos, dans le cou ou dans les épaules. Des douleurs qui découlent d'une mauvaise posture laquelle pourrait être corrigée avec l'aide de quelques appareils technologiques. On sait depuis quelques années maintenant que passer sa journée devant un écran d'ordinateur peut donner naissance à des douleurs dans la nuque, le dos ou les épaules. Ces douleurs apparaissent désormais chez des individus de plus en plus jeunes, à quoi sont-elles dues précisément ? Est-ce simplement une question de mauvaise posture ?

Stéphane Gayet : Les spécialistes de l'anatomie de l'Homme - qui s'intéressent à l'évolution du corps humain à travers les siècles ou plutôt les millénaires - nous apprennent que le rachis (la colonne vertébrale et les éléments musculo-tendineux qui lui sont étroitement associés) est l'un des principaux points faibles du corps humain et que cette partie de notre corps est toujours en cours d'évolution. C'est comme si l'évolution du corps humain n'avait pas encore complètement intégré la bipédie exclusive, c'est-à-dire la station verticale. Les contraintes mécaniques néfastes au rachis sont essentiellement les efforts de soulèvement en station verticale. On peut remarquer que les singes, qui sont autant bipèdes que quadrupèdes, ne sollicitent pas leur rachis comme nous, étant donné qu'ils effectuent leurs efforts surtout depuis la station quadripède. Ils s'arrangent pour déplacer les éléments à terre en les tirant ou les poussant, plutôt que de les soulever. Par instinct, ils savent comment préserver leur rachis. Nous avons certainement perdu une bonne partie de notre instinct protecteur. 

Notre rachis est beaucoup et mal sollicité

Les circonstances de la vie, qu'elles soient personnelles ou professionnelles, nous obligent à solliciter notre rachis plusieurs fois par jour, pour ne pas dire de nombreuses fois. En réalité, le simple fait de se pencher en avant, fatigue le rachis, même sans effort de soulèvement, en raison du poids du corps – dont celui de la tête - qui agit de façon vicieuse lors de la flexion en avant (antéflexion).

Les douleurs rachidiennes sont d'autant plus fréquentes qu'il existe une arthrose du rachis – même peu évoluée ; on admet qu'elle commence vers l'âge de 30 ans – ou une protrusion discale (léger glissement d'un disque intervertébral en arrière, sans que l'on puisse parler de hernie vraie). Elles sont également favorisées par les anomalies anatomiques qui se forment pendant la croissance de l'enfant ou parfois sont congénitales. Les sujets jeunes qui ont une taille sensiblement supérieure à la moyenne de la population, sollicitent plus leur rachis que les autres, car l'ergonomie des installations et équipements n'a pas été pensée pour leur taille. Il en est de même pour les gauchers, qui sont pénalisés pour une raison analogue.

Les douleurs rachidiennes sont devenues très fréquentes

On distingue trois étages dans le rachis : l'étage cervical qui est le siège d'une lordose (il est courbé vers l'arrière), l'étage dorsal qui est le siège d'une cyphose (il est courbé vers l'avant) et l'étage lombaire qui est le siège d'une lordose. Ces trois courbures s'équilibrent entre elles chez l'individu sain. Elles sont capables d'absorber les contraintes d'intensité modérée ou moyenne. Dans le langage courant, on appelle "mal de dos" les douleurs qui se situent, soit au niveau du rachis dorsal (les dorsalgies : "haut du dos"), soit au niveau du rachis lombaire (les lombalgies : "bas du dos" ou encore "les reins").

Les rachialgies (douleurs du rachis) font partie de ce qu'il est convenu d'appeler les "troubles musculosquelettiques" (TMS). Les TMS sont d'une façon générale pratiquement la pathologie la plus fréquente en France et la pathologie professionnelle également la plus fréquente. Ils sont à l'origine du plus grand nombre d'arrêts de travail et leur coût médical, économique et social est considérable.

Les effets néfastes du travail sur écran

On dénonce de plus en plus ces effets délétères (néfastes pour la santé). Ils sont multiples (yeux, psychisme et rachis, entre autres). Schématiquement, plus l'écran est petit et plus il est dangereux. Le cinéma en salle obscure n'est pas nocif, car il s'agit d'un écran immense situé loin du corps. La télévision l'est déjà un peu plus, pour plusieurs raisons. Ensuite, il y a les écrans d'ordinateur de bureau, les ordinateurs portables, les tablettes et les téléphones mobiles.
Ce sont surtout les ordinateurs portables qui sont montrés du doigt comme néfastes : leur écran n'est pas à la hauteur des yeux et la petite taille des caractères et illustrations oblige à pencher la tête vers le bas et vers l'avant. Nous avons vu plus haut que le simple fait de courber le rachis vers l'avant était néfaste, en raison du poids du corps et de la tête. Lorsque l'on penche la tête, son poids important sollicite le rachis cervical et dorsal (tout le rachis, en réalité) et cela de façon vicieuse. Les muscles, leurs tendons (attaches des muscles sur les os), les ligaments (attaches des os entre eux) et aussi les cartilages articulaires, travaillent de façon non physiologique dans ce cas : mouvements de va-et-vient incessants. Cela entraîne une tension des muscles et des tendons du rachis cervical et dorsal, source de douleurs et d'une usure accélérée (car l'arthrose se forme plus rapidement).

À cela s'ajoute une posture sur le siège (chaise ou fauteuil) également néfaste : hauteur non adaptée, assise et dossier non anatomiques et position souvent vicieuse car non corrigée (fesses en avant au lieu d'être calées contre le dossier). Si l'on ajoute à cet ensemble une souris source de mouvements incessants du membre supérieur et de l'épaule, on voit qu'il y a plusieurs facteurs réunis pour produire des TMS du dos, du cou, des épaules et même des membres supérieurs. D'où cette augmentation de la fréquence des douleurs rachidiennes chez des personnes de plus en plus jeunes (il suffit d'observer la position des adolescents penchés sur leur téléphone mobile pour comprendre qu'elle est délétère).

Il est parfois difficile de corriger sa posture seul. Existe-il des exercices qui peuvent nous y aider ?

Notre posture dépend étroitement de notre installation et de notre équipement

Notre posture en position assise est directement liée à notre équipement. Nous l'avons vu, l'usage d'un ordinateur portable est par lui-même générateur de troubles. Soit l'écran est à hauteur des yeux et le clavier est trop haut ; soit le clavier est à bonne hauteur pour les avant-bras et les poignets, et l'écran est trop bas. L'ordinateur portable est une invention géniale, mais il est délétère. Corriger sa posture nécessiterait donc déjà d'abandonner l'ordinateur portable au profit d'un modèle de bureau, à moins de pouvoir désolidariser l'écran du clavier. De la même façon, l'utilisation d'un pavé tactile de pointage est préférable, sur le plan ergonomique, à celui d'une souris qui sollicite anormalement le membre supérieur et l'épaule.
Par ailleurs, il faut penser à reculer ses fesses – qui ont tendance à glisser vers l'avant – et à redresser son buste et son cou ; mais encore faut-il que l'installation permette ce redressement.

Tout en restant en position assise, on peut faire quelques exercices.

On peut pratiquer des auto-grandissements du tronc et du cou. Il s'agit, tout en étant assis, les fesses bien calées en arrière, de chercher à pousser sa tête verticalement le plus haut possible et en forçant, sans décoller les fesses. On maintient cette posture pendant cinq à dix secondes, puis on se relâche. L'exercice est à faire cinq fois. S'il est bien réalisé, on sent que le corps travaille de façon inhabituelle. Il est recommandé de répéter cet exercice dans la journée (deux à trois fois).
On peut aussi pratiquer, depuis la position assise, des mouvements amples, circulaires et lents de la tête et du cou, selon une trajectoire circulaire, par exemple dans le sens des aiguilles d'une montre. Là encore, il faut forcer un peu et effectuer la rotation lentement, sans jamais brusquer. On peut effectuer cinq tours par exercice, en changeant de sens de rotation.

Un autre exercice praticable depuis la position assise est l'étirement des membres supérieurs, par exemple en pratiquant des cercles amples et en forçant un peu vers le haut, vers les côtés, vers l'arrière et le bas. Cet exercice permet de réduire la tension du cou et des épaules. On peut là aussi effectuer cinq cercles complets lors de chaque exercice.

La bonne posture à adopter devant un ordinateur

Outre le sport, ou des étirements réguliers, des appareils technologiques destinés à corriger notre posture ont fait leur apparition sur le marché. Quels sont les plus utiles ? Permettent-ils réellement d'améliorer notre posture et donc de soulager nos douleurs ?

Faire de toute préférence appel à des professionnels

La première chose à préciser est qu'il est préférable de faire appel à des professionnels de l'orthopédie, de la réadaptation, de l'ergonomie et de l'ergothérapie. Il existe en effet sur le marché de multiples orthèses qui permettent d'assister une ou plusieurs articulations, soit parce qu'elles sont douloureuses, soit parce qu'elles sont déficientes. Mais le sujet néophyte en la matière est difficilement en mesure de savoir ce qui lui convient et comment l'utiliser à bon escient.

Une orthèse est un dispositif qui aide une articulation ou un autre organe malade, tandis qu'une prothèse est un dispositif qui remplace une articulation ou un autre organe malade. Nous ne parlons donc ici que d'orthèses.

Les sièges ergonomiques

Il faut commencer par parler des sièges ergonomiques. Cela paraît primordial. Il en existe de nombreux modèles et, pour bien faire, il faudrait pouvoir les essayer. Il faut donc éviter de les acheter à distance. Mais il faut admettre que le siège ne fait pas tout : de toute façon, on doit corriger sa posture en permanence, car les fesses ont tendance à glisser vers l'avant et le corps à s'affaisser ; sauf avec certains sièges comme les "assis-à genoux", qui sont d'une conception originale et donnent satisfaction à nombre de personnes.

Les orthèses

Il est conseillé de se tourner vers des orthèses médicales agréées par les organismes de santé officiels. On peut se les faire prescrire comme les acheter. Ce sont des dispositifs sûrs et efficaces, en général de grande qualité. Les modèles sont variés et sont proposés dans toutes les tailles courantes.

Les plus simples sont les ceintures et colliers : les ceintures lombaires et colliers cervicaux soulagent les douleurs tout en évitant qu'elles ne reviennent. Leur mise en place est facile, le juste serrage est une question d'expérience.

Ensuite, viennent les orthèses de maintien postural. Ces orthèses sont complexes et s'adressent essentiellement au rachis dorsal, mais pas exclusivement. Leur mise en place est déjà plus difficile et surtout délicate à réaliser seul.

Les orthèses les plus élaborées sont les corsets semi-rigides qui s'adressent au rachis dorsal ou au rachis dorso-lombaire.

Toutes ces orthèses soulagent les douleurs, plus ou moins complètement ; en revanche, elles peuvent en générer d'autres si elles ne sont pas adaptées ou mal utilisées.

Aucune de ces orthèses ne doit être portée en continu. Il s'agit de les porter en anticipation d'un mouvement ou bien d'une posture source de souffrance, et toujours pendant une durée limitée. Car la réduction de la douleur s'effectue aux dépens de la musculature qui a tendance à s'affaiblir du fait du port prolongé de l'orthèse.

En pratique, il faut commencer par les orthèses les plus simples et les plus légères. Si malgré une taille adaptée et un usage correct, il n'y a pas d'amélioration, il faut envisager une orthèse plus "lourde". Car ces dispositifs ne sont qu'une aide qui, plus elle est conséquente, et plus il est difficile de s'en passer ; or, il faut toujours chercher tôt ou tard à s'en dispenser ; ce ne sera possible que lorsque le corps sera parvenu à compenser les troubles posturaux et les déficiences qui en résultent, c'est-à-dire grâce à un travail de correction.

Certains médecins recommandent en supplément de certaines habitudes -des étirements par exemple- est-ce à dire que seuls ils sont inutiles ? Comment les incorporer à notre vie quotidienne en vue de se débarrasser des douleurs ?

Il convient de bien garder à l'esprit le fait que le rachis est un tout. Une mauvaise position du rachis lombaire peut donner des douleurs du rachis cervical et inversement. Il est donc essentiel de soigner le rachis dans son ensemble, c'est pourquoi les exercices dits de gymnastique s'adressent à tout le rachis et aux muscles qui lui sont attachés.

Voici trois exercices qui visent à améliorer la posture rachidienne. Une séance ne doit pas dépasser dix minutes. On peut en pratiquer d'une à trois par jour. Chaque exercice est effectué cinq fois selon une technique rigoureuse et progressive.
Auto-agrandissement actif. Debout, dos contre le mur, le sujet essaie de s’agrandir pendant une quinzaine de secondes, sans décoller les talons du sol. Cet exercice permet de lutter contre l’hyperlordose lombaire, et d’assurer un alignement optimal de la tête, du rachis et des membres inférieurs.
Flexions groupées en position allongée sur le dos. Jambes fléchies, le sujet ramène les deux genoux tenus dans chaque main en fléchissant le cou au maximum, et maintient la position quelques secondes, puis se relâche. Cet exercice étire les muscles lombaires, souvent très contractés.
Renforcement des muscles spinaux (muscles du rachis). Allongé sur le ventre, mains derrière la nuque, le sujet effectue des extensions du rachis lombaire, en étirant la tête dans l’axe du corps.

Il est bon d'ajouter à ces exercices des étirements des membres supérieurs (déjà aperçus plus haut), en cherchant à les allonger au maximum vers le haut, les côtés, l'arrière et le bas (le mieux est d'effectuer des mouvements circulaires que l'on répète cinq à dix fois, ce que l'on a déjà dit plus haut).

Orthèse dorsolombaire de maintien à rappel postural

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