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Mexique : le Cartel de Jalisco Nouvelle Génération considéré comme une des cinq organisations criminelles les plus puissantes de la planète
©HECTOR GUERRERO / AFP

Règne de la terreur

Le cartel mexicain ferait partie du « top five » des organisations criminelles, aux côtés des yakusa japonais de Yamaguchi Gumi, de la mafia moscovite Solnseskaya Bratva et des mafias italiennes Camorra et ‘Ndrangheta.

Alain Rodier

Alain Rodier

Alain Rodier, ancien officier supérieur au sein des services de renseignement français, est directeur adjoint du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). Il est particulièrement chargé de suivre le terrorisme d’origine islamique et la criminalité organisée.

Son dernier livre : Face à face Téhéran - Riyad. Vers la guerre ?, Histoire et collections, 2018.

 

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Le 30 janvier 2019, López Obrador le nouveau président mexicain élu fin 2018 a officiellement mis fin à la "guerre contre la drogue" débutée en 2006. Il faut reconnaître que les résultats de cette guerre sont restés très mitigés car les cartels n’ont pas été défaits malgré les nombreuses arrestations (122 000 "narcos" seraient aujourd’hui sous les verrous) et l’extradition vers les États-Unis d’importants responsables criminels inculpés par le Département de la justice US dont Joaquín Archivaldo Guzmán Loera alias "El Chapo" (arrêté en 2016, extradé en 2017) qui devrait être condamné à la prison à vie sans possibilité de libération anticipée en juillet de cette année. Il n’en reste pas moins que cette guerre aurait fait au minimum 120 000 victimes en dix ans (2007-2018). Certains chiffres font même état de 200 000 tués car ils prennent en compte les disparitions. La presse italienne appelle cela la lupara bianca, la mort blanche ; le corps de la victime n'est jamais retrouvé. Il convient de souligner que ni Daech ni Al-Qaida n’ont rien inventé dans l’horreur, les tortures, décapitations et autres démembrements (spécialité mexicaine) filmés pour impressionner les populations. Cela est pratiqué depuis les lustres en Amérique latine en général et au Mexique en particulier. La seule différence est que le "but pédagogique" revendiqué par les sicarios est destiné aux locaux et pas à l’international. Selon des repentis, les sicarios sont formés très jeunes à l'école du crime afin d'être littéralement décérébrés (Daech a fait de même). Ils se situent au bas de l'échelle "sociale" des organisations criminelles qui compteraient trois niveaux. Les exécutants au propre comme au figuré, les cadres intermédiaires qui transmettent les ordres, vérifient sur le terrain et font du renseignement mais qui, parfois, doivent mettre la main à la pâte. Enfin il a les décideurs qui, eux, tentent de ne pas intervenir directement. Comme tous les boss du crime organisé, leur objectif personnel est d'être intégrés à la bonne société en apportent des capitaux frais qui sont ainsi blanchis et convertis dans l'économie légale.   

Certes, les cartels mexicains ont évolué avec le temps, certains comme La Familia ou celui de Beltran Leyva disparaissant du paysage. Même les redoutables Zetas dont les cadres avaient servi dans les forces spéciales de la police mexicaine ont connu des scissions internes qui ont considérablement affaibli leur pouvoir de nuisance. Les cartels de Juarez et des Chevaliers templiers (héritier de La Familia) sont aussi en perte de vitesse.

Il n’empêche que les Organisations criminelles transnationales (OCT) principales sont toujours actives malgré les coups qui leur ont été portés, soit par les autorités, soit par les impitoyables guerres des gangs qui ont fait rage. Elles étaient - et sont encore - destinées à conquérir des territoires et/ou de nouveaux marchés. En tête de liste on retrouve les cartels du Golfe et de Sinaloa. Ce dernier survit malgré l'incarcération de son leader, "El Chapo" Guzman. Pour la petite histoire mais c'est un fait très significatif, le juge fédéral mexicain chargé du cas Guzman a été assassiné peu après l'arrestation de son client. La devise "plata o plomo" (de l'argent ou du plomb") est toujours d'actualité au Mexique. Le pire est que les sicarios n'hésitent pas à s'attaquer aux membres de la famille de leurs cibles.

Selon le département de la justice US, l’OCT mexicaine la plus puissante aujourd’hui est le Cartel de Jalisco Nouvelle Génération (CJNG). Il a détrôné le cartel de Sinaloa auprès du "top five" aux côtés des yakusa japonais  de Yamaguchi Gumi, de la mafia moscovite Solnseskaya Bratva (actuellement en recherche de chef, elle pourrait être rétrogradée dans l’avenir), des mafias italiennes Camorra et ‘Ndrangheta. Le CJNG est relativement récent puisqu’il a été fondé en 2009 par Nemesio Oseguera Cervantes "El Mencho", un ancien passeur de drogue ayant purgé trois ans de prison aux États-Unis avant de devenir une éphémère policier municipal. Ce dernier est toujours en fonction ce qui relève d’un haut niveau de professionnalisme, de cruauté personnelle mais aussi de beaucoup de chance. Depuis la fin de l’année dernière, sa tête est mise à prix aux États-Unis pour dix millions de dollars. Les autorités mexicaines n’offrent "que" trente millions de pesos (1,6 million de dollars) pour tout renseignement permettant sa neutralisation.

Washington accuse ce cartel d’importer aux États-Unis cinq tonnes de cocaïne et cinq tonnes de méthamphétamine par mois ! Elle possèderait plus de cent laboratoires de transformation au Mexique et des fermes de cannabis sur le territoire US.

La belle santé de cette organisation provient du fait que le CJNG est présent dans 22 des 32 États mexicains, aux États-Unis (Chicago, New York, Atlanta, Los Angeles) et en Amérique latine (Brésil, Colombie, Pérou, Uruguay et Bolivie). Toujours selon la même source, ce cartel aurait débarqué en Europe, en Asie et en Australie.

Pour revenir à la "fin de la guerre contre la drogue", il s’agit tout simplement d’une abdication du pouvoir mexicain qui reconnaît par là qu’il n’a pas la puissance nécessaire pour obtenir des résultats tangibles. La raison en est simple : les cartels ont plus de moyens humains et financiers (avec la corruption qui va avec) que le gouvernement. Les forces de sécurité sont désormais priées de combattre prioritairement les trafics liés au pétrole car ils font perdre beaucoup de recettes à l’État qui là, se retrouve intéressé.

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