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Dérèglement climatique : vers une montée des océans plus importante que prévue ?
©DR

Niveau des océans

Une étude publiée dans les comptes-rendus de l'Académie américaine des sciences (PNAS) lundi 20 mai estime que la hausse du niveau des océans pourrait dépasser deux mètres d'ici 2100. Ce nouveau scénario alarmiste pose la question des méthodes de projection climatique.

François Gervais

François Gervais

François Gervais est physicien, spécialiste de thermodynamique et professeur émérite à l'Université François-Rablais de Tours. Il est l'auteur de L'innocence du carbone aux éditions Albin Michel (2013).

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Atlantico : Selon les chercheurs, si la situation reste inchangée, le niveau des océans s'élèverait très probablement de 62 à 238 cm d’ici à 2100, tandis que le rapport du GIEC prévoyait en 2013 une augmentation de moins d'un mètre. Que penser de ces résultats ? Pourquoi sont-ils si différents ?

François Gervais : L’article des chercheurs de l’Institut de Postdam publié dans PNAS appelle quelques remarques. Dans les tableaux 1 et 2 de l’article, l’unité (millimètres ou centimètres ?) dans laquelle sont exprimées les hypothèses de hausse du niveau des océans n’est pas indiquée. Dans le contexte de l’article, on croit comprendre que l’unité serait des centimètres mais un comité de lecture qui se respecte n’aurait jamais dû laisser passer une telle légèreté. Par ailleurs, pourquoi les 22 experts interviewés n’ont-ils pas eux-mêmes écrit un article en commun au lieu que d’autres chercheurs se fassent leur porte-parole ? Une telle information « de seconde main » est assez inhabituelle en Science. Le point commun entre le rapport du GIEC et cette étude est une incertitude qui reste exagérément élevée, même pour une même hypothèse de hausse de température de la Terre. Depuis le début de l’accélération des émissions de CO2 en 1945, cette température moyenne s’est accrue de 0,4°C hors fluctuations selon le Hadley Center britannique (HADCRUT4). On reste loin des hypothèses d’augmentation de température de 2°C, voire de 5°C sur lesquelles sont basées les projections de l’article.  Parker et Ollier (Phys. Science Int. J. 6, 119-130) rapportent une hausse moyenne du niveau des océans mesurée par les centaines de marégraphes qui bordent les côtes du monde entier de seulement 1,04 millimètre par an, soit une hausse extrapolable à 8,3 centimètre d’ici 2100 puisqu’aucune accélération n’est décelée. Les mesures par satellites, initiées plus récemment, donnent 3 millimètres par an, extrapolable à 24 centimètres en 2100. Cela pose une autre question : pourquoi de tels écarts entre mesures et surtout entre mesures et projections ?

Comment endiguer la fonte des glaciers, notamment des inlandsis du Groenland et de l'Antarctique ? Les moyens mis en place jusque-là sont-ils efficaces ?

Mayewski et coauteurs en 2017 (Quaternary Science Review 155, 50-66) rapportent une légère diminution de la température moyenne de l’Antarctique lors des 35 années précédentes. L’inlandsis Antarctique est de loin la plus grande masse de glace de la Planète. Pourquoi fondrait-elle si sa température diminue ? Les satellites ont mesuré en 2018 dans l’Antarctique le record absolu de froid : -98,6°C.      

La divergence des prévisions entre le dernier rapport du GIEC (2013) et cette étude ne témoigne-t-elle pas d'une division au sein même de la communauté scientifique quant aux méthodes à employer pour les prévisions ? Faut-il préférer le modèle physique prôné par le GIEC à la méthode semi-empirique de ces études ?

Les projections de hausse du niveau des océans dépendent des projections de température moyenne de la Terre. On ne peut qu’inviter les experts à nous indiquer quelles seraient leurs projections non pas en fonction de projections de modèles de climat qui ne sont d’ailleurs pas d’accord entre eux comme le montre l’amplitude considérable des incertitudes tant du GIEC que de l’article de l’Institut Postdam, mais sur l’extrapolation de la hausse de 0,4°C observée depuis 1945. Le Professeur Nix-Axel Mörner de l’Université de Stockholm qui a beaucoup publié sur le sujet ces dernières années ne fait par exemple pas partie des experts consultés dans l’article et il n’est pas cité. Ses conclusions basées non sur des modèles de climat virtuel mais sur des observations en particulier dans les iles du Pacifique ou les Maldives, minimisent considérablement les projections. Par ailleurs, Luijendijk et coauteurs ont publié en 2018 dans Nature Science Report (DOI:10.1038/s41598-018-24630-6) qu’en dépit de l’érosion de certains rivages, les plages du monde entier voient en moyenne leur superficie augmenter. Là encore, les travaux faisant appel aux observations se démarquent des projections basées sur des modèles de climat. Ces quelques exemples soulignent effectivement une division au sein de la communauté scientifique quant aux méthodes à employer pour les prévisions. Celles basées sur les observations et les mesures concluent à des perspectives de hausse des océans systématiquement moindres que celles basées sur des modèles de climat.

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