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Ce que les programmes de prévention de l’extrémisme ne comprennent radicalement pas aux mécanismes qui y mènent
©RENE TILLMANN / DPA / AFP

Pente glissante

Face à l'extrémisme, certains programmes choisissent de s'attaquer à l'aspect sectaire de "l'embrigadement". Une vision souvent étroite d'un phénomène plus complexe.

Christophe Bourseiller

Christophe Bourseiller

Christophe Bourseiller est écrivain, historien et journaliste.

Maître de conférence à l'Institut d'études politique de Paris, doctorant en Histoire à l'Université Paris I, Christophe Bourseiller  est spécialiste des extrêmes, de droite et de gauche. Il est l'auteur notamment de Mai 1981 raconté par les tracts (Hors collection, 2011) et de L’Extrémisme, enquête sur une grande peur contemporaine (CNRS Editions, 2012).

 

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Atlantico: Les cas de radicalisation sont régulièrement traités par les organismes de lutte contre les dérives sectaires. Cette stratégie – critiquée – est-elle applicable à l'extrémisme de manière plus large ?

Christophe Bourseiller : Je ne pense pas que l'on puisse traiter de l'extrémisme comme on traiterait d'un embrigadement sectaire. Ce programme applique aux mouvements extrémistes les schémas utilisés en général dans le cadre d'un embrigadement sectaire, or, mis à part quelques cas extrêmes, la plupart des mouvements extrémistes fonctionnent de manière différente des organisations sectaires qui sont avant tout de nature religieuse. Là je pense que compte tenu de la nature plus "rationnelle" des mouvements extrémistes, je ne pense pas qu'un tel programme soit de nature à fonctionner. D'autant plus qu'il ne répond pas sur le fond à l'engagement extrémiste, dans la mesure où il ne répond pas au niveau des idées. Il ne questionne pas la nature la validité de l'engagement et la seule réponse à mon avis à apporter à l'extrémisme est une réponse au niveau des idées extrémistes qui doivent être combattues. Mais je ne crois pas que l'on puisse considérer les militants extrémistes comme les victimes d'un embrigadement sectaire. Sauf dans les cas, assez rares, de petites organisations politiques qui fonctionnent sur un modèle de secte.

 On sort à ma connaissance plutôt facilement des mouvements extrémistes. Ce qui caractérise les sectes c'est que d'une part on donne à peu près tout ce que l'on possède à l'organisation et d'autre part on vous empêche d'en sortir. Dans la plupart des mouvements cela ne fonctionne pas comme cela. Quand on quitte un mouvement politique on le quitte et au pire on se fâche avec ses anciens camarades.

Il est vraiment dangereux de criminaliser l'engagement extrémiste, d'autant plus que ces programmes se font sur la base du volontariat.

En Allemagne, l’association EXIT-Deutschland aide les membres de groupes ou partis néonazis à en sortir, à se déradicaliser. Comment interpréter cette orientation ?

A l'évidence il y a des cas de loup solitaires et de terrorisme politique. Cela dit je trouve curieux de se focaliser sur l'extrême droite en mettant complètement de côté l'extrême-gauche. Il y a là une vision de l'extrémisme qui me paraît critiquable. Qu'est-ce que l'engagement extrémiste ? C'est un groupe qui lutte pour un changement radical de société et qui veut y parvenir par la violence. A partir de là vous allez voir des groupes de tous les bords et on est dans le même schéma de pensée. Je suis très étonné que ce programme EXIT ne se focalise que sur un pendant

L'idée sous-jacente est l'idée que les militants d'extrême droite seraient des victimes embrigadées malgré eux dans des organisations qui les enfermeraient. Cela me paraît tout à fait critiquable considérant que les gens qui s'engagent dans ces mouvements le font volontairement par finalement des "mouvements de colère".  

Si l'on commence à psychiatriser les ennemis politiques on est sur la voie de ce que l'on a vécu dans l'ex union soviétique qui faisait la même chose avec les opposants politiques. Il faut se garder d'emprunter cette voie et lutter sur le terrain des idées.

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