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 Anne Hidalgo et la novlangue : quand le politique prend son verbe pour des réalités
©FRANCOIS GUILLOT / AFP

Journal de Paris

Les innovations linguistiques et autres néologismes orwelliens de la maire de Paris révèlent sa volonté de travestir la réalité et son manque de volontarisme.

Florence Berthout

Florence Berthout

Florence Berthout est maire divers droite du 5e arrondissement de Paris.

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Quand une vérité n’est pas bonne à entendre, la parade classique consiste à nier ou à atténuer la vérité. On se souvient de la formule malheureuse du porte-parole de la Nasa après l’explosion de la navette Challenger en 1986 : « il semblerait qu’il y ait eu un défaut de fonctionnement »…

Entre déni et euphémisme, la mairie de Paris fait des prouesses. C’est ainsi que la « modernisation tarifaire » ne désigne rien d’autre que la hausse des taxes et des redevances. Et ce « modernisme » a un coût pour les Parisiens : les recettes des tarifs municipaux ont augmenté de 6,4 % depuis 2014, deux fois plus que l’inflation.

Autre exemple emblématique de ce travestissement de la réalité, l’Hôtel de Ville parle « d’implantation harmonieuse » pour la trentaine de distributeurs de seringues à destination des toxicomanes. A l’évidence pourtant, aucun riverain n’a jamais jugé « harmonieuses » les nombreuses seringues usagées et abandonnées dans leur quartier.

Ce jargon inimitable sert également à cacher le manque de volontarisme. Plutôt que de prendre à bras le corps le problème de la saleté des rues, unanimement décriée, la mairie de Paris ne fait que déplorer la « dynamique naturelle à la salissure ». On cache la poussière sous les mots et les rats sous les formules pompeuses.

Si ces expressions savoureuses s’apparentent précisément à ce que George Orwell a appelé la « novlangue », c’est parce qu’elles servent de « mode d’expression à une vision du monde » comme on peut le lire dans 1984.

Dans « l’alter-monde » (sic), tout est sublimé, forcément sublimé. C’est ainsi qu’une voie piétonne – dont on peut convenir qu’il faut les multiplier – devient une « autoroute citoyenne ». Les nouveaux bancs de la place du Panthéon – à l’esthétique discutable – sont quant à eux qualifiés de « mobilier inclusif » pour « réduire les inégalités spatiales ». Ces hyperboles font fi de la banalité du réel : une rue piétonne n’est plus une rue piétonne, un banc n’est plus un banc.

On comprend mieux dès lors l’annonce sur la prétendue création d’une police municipale. Car en l’état actuel de la loi, que la majorité parisienne refuse catégoriquement de voir évoluer, le pouvoir de police générale est dans les mains du Préfet de police. Dans une logique toute « orwellienne », il ne s’agit que de renommer l’actuelle brigade de lutte contre les incivilités, qui demain comme aujourd’hui ne sera ni armée ni ne pourra procéder aux contrôles d’identité.

Si le langage n’a plus pour fonction de désigner la réalité, de « dire ce que l’on voit » pour parler comme Péguy, tous les mensonges sont permis.

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