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Avoir le cœur brisé, ça existe et les scientifiques pensent que le coupable pourrait être... votre cerveau
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Intelligence du coeur

Le syndrome de Tako-Tsubo, aussi appelé syndrome du cœur brisé, peut apparaitre chez une personne après un choc émotionnel, comme une rupture amoureuse par exemple.

Jean-François Thébaut

Jean-François Thébaut

Jean-François Thébaut est cardiologue, membre du Collège de la Haute Autorité de la Santé, président de la Commission amélioration des pratiques professionnelles et de la sécurité des patients.

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Atlantico : Le syndrome de Tako-Tsubo, aussi appelé syndrome du cœur brisé, peut apparaitre chez une personne après un choc émotionnel, comme une rupture amoureuse par exemple. Mais biologiquement, que se passe-t-il au niveau du cœur ? Pourquoi le sujet a cette sensation de douleur ? 

Jean-François Thébaut : Le syndrome de Tako-Tsubo  dit le syndrome du coeur brisé correspond à la survenue d’un arrêt  brutal de la vascularisation d’une partie du cœur du fait d’un spasme d‘artères coronaires .Cela entraine une ischémie myocardique (manque d’oxygène pour le muscle cardiaque ndr ) par l’arrêt de la perfusion de sang. Cette ischémie si elle est prolongée entraine la mort irréversible des cellules musculaiees myocardiques concernées.

Cela a comme conséquence la constitution d’un véritable infarctus mais survenant sans anomalie visible des artères coronaires. Habituellement un infarctus du myocarde succède à une occlusion d’une ou plusieurs artères coronaires par un caillot de sang (thrombus) qui se développe sur une lésion athéromateuse (plaques de cholestérol) préexistant.

C’est cette ischémie myocardique aigue qui est la cause d’une douleur thoracique souvent très violente comme dans un infarctus ou plutôt ce qu’on appelle maintenant Syndrome Coronarien aigu (SCA).

Il s’agit dans la forme typique  de Tako-Tsubo d’une atteinte  de la pointe du ventricule gauche. Celle-ci n’est donc plus capable de se contracter. Cecidonne à l’échocardiographie, l’angiographie ou l’IRM une image de ballon de rugby ou de baudruche de la pointe du coeur (ectasie).

C’est à cette forme caractéristique que l’on doit le nom de Tako-Tsubo  qui en japonais veut dire piège à poulpe  (c’est une poterie qui permet de capturer les pieuvres qui rentrent dedans et ne peuvent plus en sortir). En effet la description princeps de ce syndrome a été faite au Japon[1].

Cela ne touche pas les patients coronariens qui présentent habituellement une atteinte athéromateuse sténosantes des artères coronaires même si le stress est un facteur de risque à la fois de la maladie et de la survenue d’un SCA voir d’un infarctus.

Une étude de chercheurs de l'université de Zurich a établi des liens entre le Tako Tsubo et les neurones, quel est l'impact réel du cerveau sur ce syndrome ? De la même manière, les gens "émotifs" sont-ils plus sujets au syndrome ?  

La cause est une obstruction brutale d’une grosse ou de plusieurs petites artères du cœur, artères coronaires, par la survenue  de spasmes artériels consécutifs à un afflux énorme de catécholamines (adrénaline) provoqué par un  stress très important : effroi, peur, douleur mais aussi joie intense.

Cela touche surtout les femmes et plutôt les femmes âgées ayant un profil psychologique particulier une fois sur deux.

Il est bien connu c’est le cerveau qui régule les effets des stress. Cette réaction neuronale entraine la production  d’hormones, dans le cas présent, de catécholamines par les glandes surrénales. Cette production est dans les conditions normales sous contrôle du système nerveux sympathique (système nerveux autonome) sous contrôle du système nerveux central. Dans ce syndrome pour des raisons inexpliquées cette production de catécholamines est énorme et disproportionnée et néfaste.

Ce qui est nouveaux et ce que montrent les travaux de l’université de Zurich c’est la localisation cérébrale de l’origine de ces influx neuronaux qui donnent les ordres, ou plutôt les désordres de production. L’imagerie fonctionnelle cérébrale permet de montrer COMMENT cela se passe dans le cerveau mais pas encore POURQUOI cela se passe.

Le syndrome est-il dangereux ? Les personnes cardiaques ont-elles plus de chances d'y être confronté ?

Cette ischémie myocardique aigue (manque d’oxygène pour le muscle cardiaque) peut être à l’origine de manifestations brutales comme une syncope voire même être à l’origine d’un arrêt cardiaque par troubles du rythme cardiaque (tachycardie ou fibrillation ventriculaire) nécessitant un massage cardiaque externe et un choc électrique  externe pour éviter la mort subite.

A plus long terme, cette insuffisance de capacité de contraction peut être à l’origine d’une insuffisance cardiaque qui peut être très grave.

Comme les artères coronaires sont « apparemment saines, il n’y a pas de gestes de revascularisation possibles (pontage coronarien ou angioplastie coronarienne).

S’agissant plus souvent de femmes âgées, il est possible que les facteurs de risques habituels (diabète, HTA tabagisme et cholestérol…) aient une part de responsabilité, mais en principe ce syndrome ne touche pas les patients atteints d’insuffisance coronarienne  athéromateuse chronique.

Il est cependant connu que le stress chronique est un facteur de risque et qu’un stress aigu peut déclencher une crise cardiaque, tout comme un effort disproportionné. Mais dans ce cas il s’agit beaucoup plus souvent de la conséquence d’une accélération de la fréquence cardiaque (tachycardie) due aux mêmes catécholamines mais par un mécanisme différent.

Des médicaments « ralentisseurs » de la fréquence cardiaque comme les bétabloquants sont justement prescrits pour éviter ces accélérations brutales et rapides du rythme cardiaque, consommatrices d’oxygène.

[1]K Iga, K Hori, K Kitaguchi, T Matsumura, H Gen, G Tomonaga, T Tamamura, « Transient segmental asynergy of the left ventricle of patients with various clinical manifestations possibly unrelated to the coronary artery disease », Japanese circulation journal, vol. 55, no 11,‎ novembre 1991, p. 1061-1067 (ISSN0047-1828PMID1749067)

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