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Vous connaissiez le “hygge” qui rend les Danois heureux, vous pourrez désormais vous inspirer du “pyt”
©PAU BARRENA / AFP

Style de vie

Prenez une profonde respiration, tout va bien de passer.

Pascal Neveu

Pascal Neveu

Pascal Neveu est directeur de l'Institut Français de la Psychanalyse Active (IFPA) et secrétaire général du Conseil Supérieur de la Psychanalyse Active (CSDPA). Il est responsable national de la cellule de soutien psychologique au sein de l’Œuvre des Pupilles Orphelins des Sapeurs-Pompiers de France (ODP).

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Atlantico : Dans un monde où les technologies permettent d'avoir de plus en plus de contrôle sur tous les aspects de sa vie, sommes-nous collectivement plus sensibles qu'auparavant lorsqu'un événement sur lequel aucune prise n'est possible vient chambouler nos projets ? 

Pascal Neveu : Nos pensées ne cessent de vagabonder entre le passé et le futur, rarement dans « l’instant présent », celui que nous devons réaliser humblement. Car il est très rare que nous soyons dans un « ici et maintenant ».
Passé, futur, et même le « ailleurs » envahissent nos pensées alors fortement chargées émotionnellement.

Parce que notre vie est chargée d’angoisses, face à ses épreuves, face à ses inconnues, nous avons besoin, pour ne pas dire avons la prétention, de vouloir contrôler l’avenir, et donc notre vie.

Toutes nos responsabilités, nos objectifs de vie (personnels et professionnels), la gestion de l’immédiateté de notre vie, accentuée par les nouvelles technologies, les smartphones et les interactions multiples nous font porter un poids.

Cependant il est important de nous affranchir du complexe d’Atlas qui portait le monde sur ses épaules.

Car comment lâcher prise face à une rancœur, une peur, une émotion négative, une difficulté, une altercation… qui reviennent à notre esprit car nous nous ne souhaitons pas les fuir ?

Pour résumer le nécessaire lâcher prise lorsqu'un événement vient chambouler un projet, les Danois ont un mot "magique" : "Pyt". Un terme intraduisible mais qui signifie à la fois "ce n'est pas grave", "tout va bien se passer" ou encore "j'accepte que la situation soit devenue hors de contrôle". Concrètement quelle est l'importance d'avoir une attitude détachée par rapport à ces situations ? 

Les Danois sont souvent salués comme les personnes les plus heureuses au monde, car aptes à profiter de chaque instant de la vie.Et d’ailleurs c’est en septembre 2018, que « Pyt » a été choisi comme mot favori de la nation.

Certaines traductions et interprétations le définissent comme  « ça ne fait rien », « ne s’inquiète pas » ou « l’oubli », dans un aspect positif du mot.

« Pyt » est effectivement utilisé pour exprimer le fait d’accepter une situation comme étant hors de notre contrôle, et même si nous sommes contrariés ou frustrés, nous décidons de ne pas gaspiller d’énergie inutile en réfléchissant trop à un sujet. Il s’agit d’accepter et de continuer à vivre. « Pyt » est également utilisé pour réconforter d’autres personnes.

Il s’agit finalement, à travers ce mot, de retrouver la vraie confiance en soi, de ne pas se plaindre. Il s'agit de laisser aller des choses que nous ne pouvons pas changer. Comme l’acceptation d’une situation frustrante et immuable, mais qui ne met pas notre vie en péril.
Car tant que nous nous attribuons un pouvoir sur ce qui est, nous ne pouvons que nous surestimer ou à l’inverse nous sous-estimer.
Ce terme permet donc au Moi de se repositionner, de ce recentrer.

Le Moi est alors reconnu et accepté avec ses forces et ses faiblesses, ses limites naturelles.

Il s’ait d’une sorte de détachement avec le plus authentique sentiment de responsabilité, envers soi-même et les autres.

Mais cette attitude est difficile à pratiquer car elle va à l’encontre de notre structuration, de nos conditionnements, de nos apprentissages.

Il faut savoir qu’on peut acheter au Danemark un bouton « pyt » dans les magasins locaux. Ces boutons en plastique rouge et blanc ressemblent à ceux que les participants aux jeux télévisés pressent lorsqu'ils ont la bonne réponse. Appuyez dessus et vous entendrez le mot « pyt » vous rappeler de vous éloigner de la situation et de vous reconcentrer. Il existe même une version de luxe contenant une phrase d’encouragement enregistrée: « Prenez une profonde respiration. Tout va bien se passer ! ».

Comment faire pour apprendre à lâcher prise ? Quels sont les bénéfices de cette pratique ? 

Il nous faudrait, paraît-il « lâcher prise », comme toute bonne « philosophie » nous y inviterait. La question centrale reste donc : qu’avons-nous, au juste, à « lâcher » ?

Quelle est donc cette « prise » qu’il conviendrait de débrancher ? Tout est question d’ego, comme très souvent.

Il s’agit donc déjà dans un premier temps de parvenir à exister indépendamment du tout, de se séparer de tout le reste, tout ce qui n’est pas « moi » et qui, étant « autre », n’obéit pas toujours à notre propre loi. L’exercice est compliqué car il nous force alors à nous vivre. Plus précisément, c’est parvenir à vivre à la fois dans la peur d’une illusion de toute-puissance perdue.

Finis le « Seul contre tous », « Après moi le déluge »… Ce lâcher-prise ne sous-entend en rien une négation de l’individualité. Le lâcher-prise se produit dès lors que le moi accepte de l’autre, de tout autre, qu’il soit autre. Par exemple, il s’agit d’oublier les fameux « si », « quand », « ce qui devrait être », « ce qui aurait pu être », afin de libérer nos pensées. La pratique du lâcher-prise n’exclut pas l’aptitude à prévoir, à organiser notre vie. Elle n’est pas résignation Au contraire, elle permet de prendre conscience de nos limites et nous épargner des pensées parasites et des auto-flagellations.

Le cerveau se trouvera ainsi apaisé et plus libre d’utiliser son énergie pour agir de manière constructive. Le lâcher prise c’est finalement atteindre cet état de conscience qui nous permet d’accepter de renoncer à contrôler l’avenir, et donc d’obtenir souvent de meilleurs résultats « ici et maintenant ».

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