Sadorski : l'Ange du péché<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Culture
Sadorski : l'Ange du péché
©

Atlanti-culture

Jean-Pierre Tirouflet pour Culture-Tops

Jean-Pierre Tirouflet pour Culture-Tops

Jean-Pierre Tirouflet est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

Voir la bio »

RECOMMANDATION : BON

THEME

Le troisième volet des aventures de l’inspecteur principal adjoint Sadorski, met en scène le chef du rayon juif de la préfecture de police de Paris au printemps 1943, flic brutal et corrompu, chargé d’appliquer la politique antisémite de Vichy. Il s’agit pour lui d’identifier et d’arrêter les juifs pour les envoyer dans l’univers concentrationnaire, avec Drancy pour point de départ, tout en menant ses juteuses – et minables -  petites affaires personnelles, qu’elles soient financières et/ou sexuelles.

POINTS FORTS

Avec un luxe de détails vrais, Romain Slocombe reconstitue précisément l’univers du Paris de l’Occupation et celui de la préfecture de police de Paris, au printemps 1943, c’est à dire après Stalingrad et le débarquement américain en Afrique du nord, au tournant de la guerre. Il a manifestement épluché les archives de la police, celles des procès des fonctionnaires collaborateurs épurés à la Libération ainsi que de nombreux ouvrages sur la question et montre le visage d’une police qui collabore ouvertement avec les Allemands, sous les ordres du sinistre Legay.

L’intrigue policière est bien menée, dans un style fluide, et le suspens ménagé jusqu’au dernier chapitre. Mais il est assez vite évident pour le lecteur que ce n’est pas un thriller, mais un ouvrage grave qui met à nu le comportement de l’administration française pendant la guerre, vis à vis de la puissance occupante et du nazisme. A cet égard, Sadorski et l’Ange du Péché n’est pas sans analogies avec Les Bienveillantes de Jonathan Littell qui fait décrire la persécution par un SS amoral, comme Slocombe nous introduit dans l’univers de la collaboration sur les pas d’un policier aussi ignoble qu’intéressé.

Les protagonistes sont d’ailleurs assez bien dessinés ; Slocombe arrive même à nuancer le portrait psychologique de Sadorski qui, certes n’est pas étouffé par le sens moral, mais montre un réel dégoût au récit du processus d’extermination des juifs et tente de sauver une jeune femme enceinte qu’il a contribué à envoyer à Drancy : des remords?

POINTS FAIBLES

Le recours aux archives de l’époque donne évidemment du réalisme au tableau tracé par Slocombe, mais le lecteur a parfois l’impression que l’auteur recopie des pages entières d’archives, in extenso, ce qui nuit à la fluidité du récit.

L’unité d’action, chère au théâtre classique, est malmenée par la coexistence de plusieurs intrigues parallèles sans autres liens entre elles que la personne de Sadorski. Le lecteur peut avoir le sentiment que l’intrigue n’est construite que pour intégrer les récits de trois survivants de la Shoah, d’ailleurs mentionnés en annexe, mais de manière artificielle.

EN DEUX MOTS

665 pages denses, documentées qui posent une nouvelle fois, et très crument, la question de la responsabilité de l’administration française dans la Shoah.

UN EXTRAIT

P.143.  « - Si on vous arrête c’est que vous êtes en infraction, madame, gronde Vayssettes. (…) Vous gênez. Tous ces youpins, c’est incroyable. Ils se croient chez eux ! On est obligé de leur interdire l’ascenseur. C’’était déjà le foutoir au temps du recensement. Douze mille convocations pour vérification, vous vous rendez compte ! Inspecteur Sadorski, embarquez la et dressez un procès-verbal de plainte pour déclaration tardive de race juive. Et ordonnez son transfert immédiat. » 

L’AUTEUR

Franco-britannique, Romain Slocombe est écrivain, réalisateur, auteur de bandes dessinées. Il a publié une vingtaine de romans, dont certains ont été sélectionnés pour le prix Goncourt. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !