Black Friday : comment expliquer le tabac des ventes en ligne en pleine crise du pouvoir d’achat ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Black Friday : comment expliquer le tabac des ventes en ligne en pleine crise du pouvoir d’achat ?
©Kamil Krzaczynski / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Compulsif

Ce vendredi, c'est le fameux "Black Friday". Cette journée est marquée par des soldes monstrueuses aux Etats-Unis et aujourd'hui en France. En pleine crise des gilets jaunes, le succès d'une telle journée peut interroger.

Atlantico : Comment expliquer le succès d'événements comme le black friday qui semble signer la baisse du pouvoir d'achat des ménages ? 

Agnès Crozet : Le black Friday est un événement désormais bien installé dans le paysage de la consommation des Français. Il donne en quelque sorte le coup d’envoi des achats de Noël. Une part importante des consommateurs (cf sondage YouGov comptent en effet profiter du black Friday pour anticiper leurs achats de cadeaux pour Noël.  

Au-delà du calendrier, le black Friday est perçu comme une opportunité de consommer et de se faire plaisir, dans un contexte de pouvoir d’achat contraint.

Car la consommation est assez largement perçue comme une source de plaisir : dans les études menées à l’ObSoCo on mesure notamment que 72% des Français s’accordent sur le fait que « se faire plaisir en consommant contribue au bonheur », et 52% sur l’idée que « dans le contexte actuel, heureusement qu’il y a la consommation pour compenser et se faire plaisir ».

Mais on observe néanmoins une prise de distance à l’égard de la consommation, avec 90% des Français (donc très souvent les mêmes) qui estiment que notre société accorde trop d’importance à la consommation…

Cette prise de distance débouche sur une aspiration d’une part de plus en plus large de la population à consommer mieux, à donner plus de sens à sa consommation.

Or face à cette ambivalence à l’égard de la consommation, certaines marques et distributeurs cherchent à attiser le désir de consommer, en surstimulant les consommateurs à travers des campagnes de promotions assez agressives, dont le black Friday est une illustration. Tout est mis en œuvre pour conduire les consommateurs à penser qu’il ne faut pas laisser passer l’occasion de faire de bonnes affaires. C’est sans doute aussi ce qui explique le succès d’une telle opération.

Observe-t-on une modification du comportement des ménages qui achètent moins le reste de l'année et se concentrent sur la période des soldes pour faire leurs achats ?

Les périodes de promotions se succèdent désormais à un rythme effréné : au-delà des soldes, il y a les ventes privées, les french days, et plus largement diverses opérations de promotions tout au long de l’année. Cela devient tellement courant d’avoir des rabais que n’importe qui comprend bien que les moments où il faut acheter arrivent régulièrement et qu’il suffit d’attendre un peu avant d’acheter pour bénéficier de promotions.

De fait, une large part de consommateurs (60% d’après nos récentes études) attend les périodes de promotion pour acheter. En conséquence, les vendeurs, voyant que les gens n’achètent plus, surenchérissent sur les promotions et donnent ainsi des raisons supplémentaires aux consommateurs d’attendre les promotions, etc…C’est un cercle vicieux, qui au final, alimente la défiance des consommateurs à l’égard des distributeurs sur la vérité des prix. L’importance des rabais révèle en creux le niveau des marges des distributeurs, et brouille les repères des consommateurs sur ce qu’est le prix juste.

Le Black Friday est toutefois connu pour les remises effectuées sur des biens électroniques (TV, ordinateurs, smartphones...) qui fondamentalement ne sont pas des biens de première nécessité. Qu'est ce que cela révèle de la pression sociale qui entoure les produits et des habitudes de consommation des Français ?  

Au-delà de la pression sociale, l’appétence pour les dernières nouveautés high tech est aussi largement stimulée par l’offre, qui en se renouvelant en permanence organise d’une certaine façon « l’obsolescence » des modèles précédents. Ainsi, un certain nombre de consommateurs vont profiter des remises effectuées ce jour-là sur les biens électroniques pour renouveler leur équipement, même s’il n’en n’ont pas fondamentalement besoin.

La perception du pouvoir d'achat contraint est-elle affectée par cette tendance ? 

La baisse ou la perception de baisse du pouvoir d’achat est liée à la tendance à la hausse de certaines dépenses contraintes (loyer, alimentation de base, énergie,..) ou pré-engagées (de plus en plus d’abonnements) alors que les prix d’autres postes de dépenses (notamment les produits high-tech) ont tendance au contraire à baisser. Or effectivement, le renouvellement fréquent de ces équipements vient contrebalancer la baisse de leurs prix…

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !