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L'intégration des étrangers en France fut avant tout une histoire de droit
©Flickr

Bonnes Feuilles

En 1402, Salou Casais, une princesse malienne, arrive à Toulouse, première trace d’un échange lointain dans la France médiévale. Une histoire oubliée ! Ces histoires négligées et omises, François Durpaire les dresse contre l'idée dépassée selon lui d'un roman national. Dans "Nos ancêtres n'étaient pas Gaulois !", publié aux éditions Albin Michel. Extrait 1/2

François Durpaire

François Durpaire

François Durpaire est historien et écrivain, spécialisé dans les questions relatives à la diversité culturelle aux Etats-Unis et en France. Il est également maître de conférences à l'université de Cergy-Pontoise.

Il est président du mouvement pluricitoyen : "Nous sommes la France" et s'occupe du blog Durpaire.com

Il est également l'auteur de Nous sommes tous la France : essai sur la nouvelle identité française (Editions Philippe Rey, 2012) et de Les Etats-Unis pour les nuls aux côtés de Thomas Snégaroff (First, 2012)

 


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La France, à la fin du XIXe siècle, devient une fabrique de Français. Elle intègre des migrants venus de l'ensemble de l'Europe, et déjà des anciennes colonies. Ces flux migratoires ont pour ressort un triptyque fait de la révolution industrielle, du déclin démographique et de la guerre. Cette intégration à la communauté nationale se serait faite par le droit du sol, introduit en France dès 1515. La conception de la nation française mettrait en avant le choix d'être français par opposition à l'Allemagne, pays du droit du sang (jus sanguinis) et de la racine ethnique. La réalité est plus complexe, comme le montre l'historien Patrick Weil. Les révolutionnaires se pré-occupent plus de l'égalité entre Français que de la définition de la francité. Les conditions de naturalisation pour l'étranger, inspirées du droit du sol, sont dans la continuité de l'Ancien Régime : est Français toute personne qui est né en France et y demeure. Les Italiens, les Belges, les Espagnols établis de longue date sur le territoire sont réputés Français sans le savoir eux-mêmes et enrôlés dans l'armée. C'est le Code civil (1804) qui établit les fondements contemporains du droit de la nationalité. Resté en vigueur jusqu'en 1889, il s'impose longtemps comme la référence dans toute l'Europe. C'est désormais l'État qui décide de l'acquisition de la nationalité. Pour le Français d'origine, la nationalité se transmet par la filiation. Elle ne dépend plus de la résidence sur le territoire. Le Code civil marque une défaite de Bonaparte lui-même qui, soucieux de disposer de conscrits en nombre suffisant, défendait une conception ouverte, fondée sur le sol. Mais le véritable artisan du Code civil – François Tronchet – s'inquiète davantage du sort des Français partis à l'étranger.

Tous Français (mais pas toutes Françaises...) !

La loi de 1889 marque la victoire du droit du sol (jus soli). La France étant devenue un pays d'immigration, elle doit se fonder sur une matrice civique en mesure de faire diminuer la population d'étrangers sur son sol. Les migrants ont tous vocation à devenir français. Le droit républicain prend cependant en considération le degré de socialisation de l'étranger : l'enfant dont les parents étrangers ne sont pas nés en France ne l'acquiert qu'à sa majorité, une fois que l'école a mené à bien son œuvre de socialisation. L'histoire de la France n'est pas l'histoire de l'idée française.

Si cette dernière prône l'universel, son application exclut en pratique certains groupes de la communauté nationale. Ainsi, en réaction à la loi de 1927 qui allège les conditions de naturalisation, le régime de Vichy procédera à plus de 15 000 dénaturalisations, près de 500 déchéances, tandis que 110 000 juifs d'Algérie sont ramenés du statut de citoyens à l'état de sujets.

Extrait de Nos ancêtres ne sont pas Gaulois, François Durpaire, Albin Michel, 2018.

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