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Science du selfie : les hommes au physique moyen obtiennent plus de réponses sur les sites de rencontres
©FRANCOIS GUILLOT / AFP

Rassurez-vous !

Selon les recherches menées par l’Université d’Oxford, les hommes ayant une apparence moyenne ont plus de succès sur les sites de rencontres. Plus précisément, les chiffres publiés l'an dernier par YouGov ont montré que les femmes préféraient que les hommes aient une apparence moyenne plutôt qu'attrayante physiquement.

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini

Nathalie Nadaud-Albertini est docteure en sociologie de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et et actuellement chercheuse invitée permanente au CREM de l'université de Lorraine.

 

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Atlantico : Comment expliquez-vous ce constat ? Les "daters" sont-ils devenus plus tolérants ? Ou plus intimidés ? 

Nathalie Nadaud-Albertini : Il y a plusieurs raisons à ce constat. Tout d’abord, une photo de profil montrant un physique trop parfait laisse penser qu’il ne s’agit pas de l’image réelle de la personne. On se dit que c’est un « fake », on se demande ce que cela cache, et on préfère ne pas donner suite. Parce qu’on cherche avant tout une personne en qui avoir confiance. Et, on se dit que si cette personne ment au premier bord, c’est mauvais signe, elle mentira sur d’autres choses, et la relation sincère que l’on attend n’aura pas lieu.
Autre raison qui explique ce constat : sur ces sites, on a envie de trouver quelqu’un que l’on pourrait croiser dans la vie de tous les jours. En effet, on cherche quelqu’un avec qui on partage des centres d’intérêt et un vécu commun. Et, une personne au physique trop parfait n’y semble pas propice, car on a tendance à imaginer que ces personnes font partie d’un monde avec lequel on n’a rien de commun. Pour prendre un exemple, c’est un peu comme la différence entre un jean et une robe de soirée créée par un grand couturier. Le jean nous accompagne au quotidien, alors qu’on n’a presque pas l’occasion de porter la robe de grand couturier. On peut alors admirer cette robe pour sa beauté, mais préférer acheter le jean parce qu’on sait qu’il s’insérera dans notre quotidien.  

Cela n'a-t-il pas aussi à voir avec l'estime de soi ? On ne "likerait" que des personnes qui nous semble abordable en fonction de la manière dont nous nous percevons nous-même ? 

Oui et non.
Oui, parce qu’inconsciemment on se dit qu’il y a une sorte de « marché » des célibataires et de la séduction, et que l’on y est plus ou moins avantagé en fonction de son physique. On s’évalue alors soi-même sur ce « marché » et on cherche parmi les personnes qui semblent être du même « niveau ». Parce qu’on se dit qu’avec elles, on se sentira à l’aise, en confiance, que l’on pourra être nous-même et que l’on ne sera pas obligé de jouer un rôle pour correspondre à l’image de la personne que l’on imagine être en couple avec une personne au physique trop parfait.
Et non, parce que les sites de rencontres permettent également d’aller davantage vers des personnes dotées d’une jolie plastique que l’on n’oserait pas aborder dans la vie de tous les jours. En effet, la médiation du site de rencontres adoucit les effets négatifs en cas de rejet, car l’interface numérique atténue le sentiment de perdre la face et donc l’humiliation ressentie.

Finalement, doit-on en conclure que les "daters" ne cherchent pas l'homme ou la femme idéale sur les réseaux sociaux ? Ou bien sont-ce les critères qui ont changé ?  

Les « daters » ne cherchent en effet pas l’homme parfait physiquement ou la femme parfaite physiquement, ils cherchent « l’âme sœur », ce qui est différent. En effet, les sites de rencontres s’inscrivent dans un imaginaire qui correspond au modèle de la fusion romantique, c’est-à-dire un modèle où deux individualités se confondent pour ne former qu’une seule entité, un seul projet de vie. Dans nos structures sociales, cela se traduit par un mariage stable, monogame, qui s’inscrit dans le long terme, et qui est généralement associé à la parentalité. Derrière le modèle de l’âme sœur, il y a l’attente d’une certaine « magie » et d’une certaine prédestination, l’idée que quelqu’un vous attend quelque part, que l’on va rencontrer un jour, fortuitement, y compris sur des sites de rencontres, et y compris si on affirme n’y chercher que des rencontres ponctuelles. Par conséquent, les sites de rencontres sont considérés comme la version 2.0 du modèle de l’âme sœur, presqu’inconsciemment parfois.  
Et c’est encore plus vrai si l’on prend en compte que certaines personnes fréquentent les sites de rencontres depuis de nombreuses années et que leurs attentes ont évolué avec le temps. Pour schématiser à gros traits, à 25 ans, ils s’inscrivaient pour faire des rencontres d’un soir, à 35 ans, ils cherchent le/la partenaire avec qui passer le reste de leur vie, et ce sur les mêmes sites de rencontres.

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