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6 centimètres pour une révolution dans l'espace : l'incroyable potentiel de l’ascenseur spatial japonais
©Obayashi

Aim to the top!

Le Japon vient d'envoyer dans l'espace son prototype d'ascenseur spatial, qui prend la forme de deux petits satellites reliés par un câble de dix mètres.

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy est spécialiste de l’astronautique et rédacteur en chef du site d’actualités spatiales de la Cité de l’espace à Toulouse.

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Atlantico : "Nous sommes très heureux que le premier satellite d'ascenseur spatial ait été lancé avec succès " a déclaré Masahiro Nohmi,  qui a travaillé sur le prototype d’ascenseur spatial qui a été lancé il y a quelques jours. Quand on parle d'"ascenseur spatial" de quoi parle-t-on vraiment ?

Olivier Sanguy : Masahiro Nohmi travaille à l’université de Shizuoka au Japon. Cette dernière a mis au point une expérience de simulation à petite échelle du principe de l’ascenseur spatial. Il s’agit de 2 petits satellites de type CubeSat (des modules cubiques de 10 cm de côté) qui vont s’éloigner l’un de l’autre en étant relié par un câble. Le long de ce câble, une cabine de quelques centimètres de côté va transiter d’un satellite à l’autre. Cette expérience faisait partie d’autres transportées par le cargo automatique  japonais HTV qui a rejoint avec succès la Station Spatiale Internationale (ISS) cette fin de semaine. Les astronautes vont récupérer cette expérience dans le cargo HTV et l’envoyer sur orbite depuis un dispositif spécifique du laboratoire japonais Kibo de l’ISS. On notera que plusieurs universités et même des entreprises privées utilisent ce système de déploiement de petits satellites car il est peu coûteux. Pour donner une idée, un tout petit satellite de 10 cm de côté peut être ainsi mis sur orbite pour un peu moins de 100 000 dollars. Il s’agit donc là d’une expérience d’une université, mais bien évidemment l’idée est de tester sur orbite et très partiellement le principe d’un ascenseur spatial. Un ascenseur spatial est un concept qui consiste à relier la surface de la Terre à l’orbite terrestre par un lien fixe. Imaginez un câble qui part d’une sorte de gare quelque part sur l’équateur et qui atteint une station d’arrivée sur orbite géostationnaire juste au-dessus à 36 000 km d’altitude. Il faut un contrepoids plus haut pour équilibrer le système. Le long du câble, des cabines montent ou descendent, fournissant un accès à l’espace qui ne passe plus par les classiques fusées. L’idée a notamment été popularisée par le grand écrivain de SF Arthur C. Clarke dans son roman Les Fontaines du Paradis.

Concrètement quel est le but d'un tel appareil ? En quoi pourrait-il faciliter la conquête spatiale par exemple ?

Le but d’un tel dispositif, qui reste de l’ordre du concept, est de fournir un lien fixe entre la Terre et l’espace qui demanderait moins d’énergie tout en permettant plus de voyages et aussi dans des conditions moins risquées. Idéalement bien entendu, le coût de l’accès à l’espace serait fortement amoindri. De plus, le voyage en cabine devrait être moins «brutal» qu’avec une capsule au sommet d’une fusée. Comprenez que des passagers n’auraient pas à subir 3g d’accélération et donc peser 3 fois leur poids pendant plusieurs minutes. En contrepartie, le voyage serait plus long. Selon les concepts, on parle de quelques heures à plusieurs jours. Le retour se ferait aussi de façon plus confortable et la vitesse de la cabine sur le câble éviterait les problèmes d’échauffement que rencontrent les classiques vaisseaux qui reviennent sur Terre.

Selon vous le projet pourra-t-il dépasser le stade de simple prototype ?

La faisabilité de l’ascenseur spatial fait toujours débat. Des ingénieurs enthousiastes estiment que le concept est réalisable, notamment en utilisant les nanofibres de carbone. Mais un tel matériau, extrêmement léger et très résistant, n’est pour le moment produit qu’en petite quantité en laboratoire. Le géant japonais du BTP Obayashi annonce depuis des années son intention de construire un ascenseur spatial pour 2050 ce qui est très ambitieux ! D’ailleurs, Obayashi sponsorise l’expérience de l’université de Shizuoka qui doit être déployée à partir de l’ISS. S’agit-il pour l’entreprise du BTP d’une volonté stratégique réelle ou d’une sorte de concept futuriste destiné à montrer sa capacité d’innovation et à communiquer autour ? Difficile de le dire. Il faut reconnaître que l’ascenseur spatial implique de nombreux défis au-delà de celui de la solidité de son câble. Il y a des problèmes de régimes de température très différents en fonction des altitudes par exemple, ou encore celui des débris spatiaux qui impose une flexibilité du câble afin qu’il puisse s’écarter de son chemin habituel pour éviter une collision. Bref, c’est loin d’être gagné ! Mais Arthur C. Clarke disait souvent que lorsqu’on ne se moquera plus de l’ascenseur spatial, alors sa réalisation effective se rapprochera. Et force est de constater que les études de faisabilité gagnent du terrain sur le simple rejet moqueur.

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