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Sclérose en plaques : entre méconnaissance des causes et traitements peu efficaces, ces enjeux qui entourent cette maladie
©Pixabay

Journée mondiale de la sclérose en plaques

La journée mondiale de la sclérose en plaques (SEP) a lieu ce 30 mai et permet d'attirer l'attention sur une maladie mal connue du grand public.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

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La journée mondiale de la sclérose en plaques (SEP) a lieu ce 30 mai et permet d'attirer l'attention sur une maladie mal connue du grand public. Quels sont les enjeux relatifs à cette maladie du point de vue de la recherche, et des moyens qui lui sont alloués ?

Une maladie pénible qui dérange tout le monde

La sclérose en plaques (SEP) est une maladie pénible et difficile qui dérange. Elle est avant tout pénible pour les personnes atteintes, parce qu'elle est invalidante – même handicapante - et peu prévisible. Elle est difficile pour les médecins qu'elle dérange parce que son diagnostic, son traitement et l'ensemble de sa prise en charge médicale sont délicats. Elle est enfin difficile pour les chercheurs parce qu'elle demeure une affection complexe et énigmatique sur le plan de son origine précise et de son évolution qui est tellement aléatoire.

Une maladie chronique du système nerveux central

Comme la plupart des maladies chroniques, la SEP a un début et semble ne pas avoir de fin. C'est une pathologie du système nerveux dit central (SNC). Celui-ci est protégé par des os : le cerveau avec ses deux hémisphères, le cervelet et le tronc cérébral sont protégés par la boîte crânienne ; la moelle épinière est protégée par les vertèbres à l'intérieur desquelles elle se trouve. Le SNC est ainsi protégé parce qu'il est à la fois vulnérable et primordial. Par opposition au SNC, le système nerveux dit périphérique (SNP) est constitué des nerfs qui sont moins vulnérables et moins primordiaux que le premier.

Une maladie paralysante qui fait peur

Dire que la SEP est une maladie chronique du système nerveux central situe déjà le contexte, mais c'est peu dire. Beaucoup de gens savent qu'elle paralyse et la crainte qu'elle inspire est liée au fait que la sclérose en plaques frappe pratiquement les sujets de tous âges : enfants, adultes jeunes et adultes d'âge mûr. Qui n'a jamais rencontré une personne atteinte de SEP et présentant de grandes difficultés à se mouvoir, quand elle n'est pas dans un fauteuil roulant ? Mais sa gravité est extrêmement variable.

Quelle est l'importance de la SEP dans le monde et en France ?

La sclérose en plaques touche environ deux millions de personnes dans le monde. Elle est plus fréquente dans les régions tempérées que dans les zones chaudes du globe : c'est une caractéristique épidémiologique (de répartition) frappante. Il s'agit d'un véritable gradient de latitude ; en d'autres termes, quand on part de l'équateur et que l'on se déplace vers le Nord sur un même méridien, la fréquence de la SEP augmente presque régulièrement avec la latitude, donc de parallèle en parallèle. Les zones de haute prévalence (nombre de cas à un moment donné) comportent plus de 100 cas pour 100 000 habitants : ce sont l’Amérique du Nord et l’Europe du Nord. Les zones de faible voire très faible prévalence comportent moins de 20 cas pour 100 000 habitants : ce sont l’Amérique du Sud, l’Afrique et l’Asie. Étant donné sa position assez centrale en Europe, la France a une prévalence élevée : de l'ordre de 100 000 personnes atteintes, soit un peu moins de la population de la ville de Caen. Y compris à l'intérieur de la France métropolitaine, on retrouve une différence significative entre, d'une part les départements des Hauts de France et du Grand Est qui sont les plus touchés, d'autre part ceux des régions situées plus au Sud qui sont les moins touchés. L'incidence (nombre de nouveaux cas par période de temps) de la SEP en France est de l'ordre de 5000 chaque année. On peut dire que c'est une maladie fréquente et c'est la deuxième cause de handicap acquis chez l'adulte jeune. La maladie commence le plus souvent entre 20 et 40 ans. Elle est nettement plus fréquente chez la femme (75 % des cas) que chez l'homme.

Que sait-on de la cause de la SEP aujourd'hui ?

La sclérose en plaques fait partie de toutes ces maladies qui sont liées à un dysfonctionnement du système immunitaire. Notre système immunitaire est complexe et diffus. Son rôle est de nous protéger vis-à-vis des infections (virus, bactéries…). Mais il est loin d'être sans faille. Tantôt il est insuffisant et il s'agit d'un déficit immunitaire (sida, autres maladies des lymphocytes, intoxications…) ; tantôt il se déchaîne sur une cible étrangère anodine tout en étant démesuré dans sa réaction (allergies aiguës : asthme allergique, rhinite allergique…) ; tantôt il se trompe carrément de cible et attaque des cellules de son propre camp (maladies dites auto-immunes : diabète de type 1, polyarthrite rhumatoïde, SEP…). Mais quand on a dit qu'une maladie était auto-immune, on n'a en réalité pas expliqué grand-chose. Au cours du diabète de type 1, les cellules immunitaires attaquent et détruisent les cellules bêta des îlots de Langerhans du pancréas (celle qui fabriquent l'insuline) ; au cours de la polyarthrite rhumatoïde, ce sont notamment les cellules du cartilage articulaire ; au cours de la sclérose en plaques, c'est la gaine de myéline du système nerveux central : mais pourquoi un tel comportement agressif et destructeur d'aspect inopiné ?

Maladie auto-immune : mais d'où vient l'auto-immunité ?

Toujours est-il que la SEP est une maladie auto-immune. Mais pour toutes ces maladies auto-immunes, il reste l'essentiel à trouver : quel est le phénomène déclenchant de l'auto-immunité ? Nos lymphocytes ne peuvent pas devenir fous : s'ils nous attaquent, cela signifie qu'ils ont été bernés. Ce ne sont a priori pas eux qui ont changé, mais la structure biologique qu'ils attaquent. Avec toutes les maladies auto-immunes ou presque, on pense en premier à un virus : c'est l'hypothèse virale de l'auto-immunité. Cette hypothèse est l'une des plus plausibles, car on sait qu'un virus peut modifier certaines de nos cellules au point de les rendre méconnaissables pour notre système immunitaire. Dans la mythologie grecque, si Œdipe tue son père, cela ne signifie pas qu'Œdipe est devenu fou, mais c'est lié au fait qu'il ne peut pas reconnaître son père Laïos ayant l'apparence d'un vieillard méconnu.

Alors, où en est la recherche sur la sclérose en plaques ?

Ce n'est pas un secret, la recherche appliquée en médecine est largement privée, effectuée principalement par des laboratoires pharmaceutiques. Car la santé est un énorme marché avec des perspectives de profits importants. Mais lesdits laboratoires ont-ils intérêt à s'investir dans la recherche sur la SEP ? Pas tellement, et cela pour plusieurs raisons. La première est qu'aujourd'hui, la sclérose en plaques n'est pas considérée comme une maladie contagieuse et de toute façon elle n'évolue pas comme une maladie épidémique.

Ce n'est pas du tout le même contexte qu'avec l'infection à virus VIH : l'épidémie mondiale de sida avec ses perspectives de ventes exponentielles de médicaments a formidablement stimulé la recherche appliquée. La deuxième est qu'avec la SEP, les chercheurs n'ont pas de cible précise à explorer. Certes, on a compris que le mécanisme biochimique de la sclérose en plaques était une destruction de la gaine de myéline du système nerveux central (SNC). Cela mérite une explication. La gaine de myéline est une structure qui provient de certaines cellules auxiliaires des neurones. On sait que les neurones sont les cellules nerveuses effectrices de l'influx nerveux. Chaque neurone crée, conduit et transmet des influx nerveux par son long prolongement appelé axone et c'est l'ensemble des influx nerveux du cerveau qui constitue l'activité cérébrale. Or, les neurones ne seraient rien sans leurs innombrables et indispensables cellules auxiliaires, regroupées sous l'expression de cellules gliales.

La gaine de myéline est une structure qui entoure les axones de certains neurones appelés neurones myélinisés. Lorsqu'elle est présente, la gaine de myéline qui entoure un axone le protège et accélère considérablement la vitesse de l'influx nerveux. On peut comparer cela à la transmission des données par le réseau internet. Il faut déjà des fils en bon état, bien protégés et isolés dans une gaine intacte. C'est le rôle protecteur de la gaine de myéline. Au début de l'internet, les ordinateurs étaient connectés au réseau via une ligne téléphonique analogique, grâce à un modem. La vitesse de transmission était lente, mais adaptée aux besoins d'alors. Puis est apparue la technologie DSL (digital subscriber line) qui a permis de transmettre sur la même ligne analogique des données à grande vitesse. C'est un peu ce que fait la gaine de myéline. Les neurones myélinisés sont un peu les neurones de première classe.

Au cours de la SEP, c'est la gaine de myéline qui est attaquée, puis détruite. Il se trouve que, dans le système nerveux central, cette gaine de myéline provient de certaines cellules gliales, les oligodendrocytes. On peut donc dire que la SEP est une maladie auto-immune des oligodendrocytes. La disparition de la gaine de myéline entraîne une souffrance axonale, puis une lente mort neuronale. Il en résulte une plaque dure, scléreuse, d'où le nom de la maladie (les attaques de la myéline se font pas îlots). Tous les neurones myélinisés du système nerveux central (c'est la substance blanche) peuvent être atteints. L'une des particularités de la sclérose en plaques est de frapper de façon peu prévisible et dans des zones très diverses (cerveau, cervelet, tronc cérébral, moelle épinière), avec cependant une fréquence plus élevée pour les neurones de la vision. Or, toutes ces cellules nerveuses sont difficiles à étudier. La recherche sur la SEP a beaucoup de pistes à explorer. Cette maladie évolue le plus souvent par poussées dont on ne comprend pas bien la causalité.

Les voies de recherche actuelles

Des chercheurs tentent de rendre le système immunitaire tolérant vis-à-vis des oligodendrocytes en l’exposant progressivement à des antigènes myéliniques exogènes. Des travaux conduits sur des modèles animaux ont donné des résultats encourageants avec l’administration d’antigènes très spécifiques de la myéline. C'est une première voie de recherche.

Une autre approche est centrée sur l’hypothèse rétrovirale. L’implication dans la sclérose en plaques d’un rétrovirus particulier (MSRV) est suspectée depuis de nombreuses années. Des travaux suggèrent que la protéine d’enveloppe de ce rétrovirus MSRV pourrait activer une inflammation de la myéline. Ces travaux ont conduit à la mise en œuvre d’un essai clinique utilisant un anticorps monoclonal dirigé contre la protéine d’enveloppe de ce rétrovirus. C'est donc une autre voie de recherche.

Une autre piste est constituée par la remyélinisation. Par voie endogène, il s’agit de provoquer la réparation spontanée de la myéline. Les mécanismes cellulaires et moléculaires impliqués dans cette remyélinisation à partir des cellules précurseurs des oligodendrocytes sont de mieux en mieux connus. Cela a conduit à l’identification de facteurs activateurs et inhibiteurs de la remyélinisation. Par voie exogène cette fois, on s'oriente vers la greffe de cellules myélinisantes. L’objectif est de recréer des oligodendrocytes producteurs de myéline dans les lésions, en injectant des cellules souches capables de les recréer. Chez l’animal, l’injection de cellules souches nerveuses (greffe) favorise effectivement la remyélinisation. Il se pourrait donc que les cellules greffées agissent en sécrétant des facteurs neurotrophiques nécessaires à la production de myéline. C'est donc encore une voie de recherche.

Enfin, d’autres chercheurs s’intéressent au microbiote (flore intestinale) des patients dont la composition jouerait un rôle dans l’inflammation et la régulation du système immunitaire. Cela semble établi pour certaines maladies auto-immunes et pourrait aussi se vérifier pour la sclérose en plaques.

On comprend que la recherche en matière de SEP soit d'une activité moins soutenue que dans d'autres domaines. Car il s'agit essentiellement de recherche fondamentale, tant le processus pathologique de cette maladie est encore loin d'être vraiment élucidé et compris. Et il n'y a pas de perspective à moyen terme de commercialisation de molécule révolutionnaire. L'investissement des chercheurs publics est évidemment passionné comme c'est le cas au sein de l'INSERM, mais celui des chercheurs privés reste logiquement assez modéré.

Du point de vue des malades et de leur qualité de vie, quelles sont les situations rencontrées par les patients ? Quels sont ici les enjeux auxquels font face les patients, notamment en relation avec les traitements qui peuvent leur être proposés ?

Un début qui n'est pas toujours reconnu

Les signes initiaux de la SEP ne sont pas toujours faciles à reconnaître. La grande diversité des signes et des symptômes, puis leur disparition parfois spontanée rendent difficile leur attribution à une sclérose en plaques débutante. Les premières manifestations peuvent être très gênantes ou à l’inverse discrètes, n’incitant pas toujours à consulter. Il n’est pas rare non plus qu’elles soient interprétées à tort comme des anomalies non neurologiques : par exemple, des paresthésies ("fourmillements") des membres inférieurs) peuvent par erreur être mises sur le compte d’une insuffisance veineuse (mauvais retour veineux).

Les différents signes et symptômes de la SEP

L'atteinte visuelle est très fréquente. Il peut s'agir d'une baisse de l'acuité visuelle (parfois profonde), d'un flou visuel ou d'une tâche opaque au centre du champ visuel, d'une douleur localisée autour de l’œil dont l’intensité augmente lors des mouvements oculaires, mais aussi d'anomalies de la vision des couleurs et des contrastes. Une vision double (diplopie) survient parfois, ainsi que des difficultés à déplacer son regard (paralysie de certains muscles des yeux). Sont également fréquents des paresthésies (fourmillements) ou un engourdissement des membres inférieurs ou supérieurs, ainsi que des sensations de décharges électriques dans les membres, survenant notamment lors de la flexion du cou. On voit également des déficits de la motricité d'un ou de plusieurs membres, ainsi que des troubles de la vessie et des sphincters (impériosités d'uriner, fuites d'urine, difficultés à uriner, infections urinaires à répétition ; constipation). L'atteinte de la SEP peut également donner des troubles de l'équilibre et de la coordination des gestes avec une difficulté à exécuter certains mouvements. Parfois, il peut s'agir d'une gêne à l'élocution (dysarthrie). On doit ajouter qu'un état dépressif est fréquent au cours de l'évolution de la sclérose en plaques. L'examen clinique par un neurologue permet de préciser l'ensemble des déficits et l'examen d'imagerie par résonance magnétique (IRM) de la tête et de la moelle épinière permet de visualiser les lésions.

Une évolution typiquement par poussées évolutives

La sclérose en plaques est une maladie neurologique assez déroutante. L'état d'une personne atteinte depuis plusieurs années va de la forme peu agressive autorisant une vie presque normale à la forme très agressive conduisant à une paralysie sévère et une dépendance (fauteuil roulant). Typiquement, la SEP évolue par poussées séparées de rémissions. Qu'appelle-t-on une poussée évolutive ? C'est une attaque – souvent multifocale - de la gaine de myéline du SNC à des endroits divers et peu prévisibles, par îlots, se traduisant par des troubles neurologiques variés : paralysies, troubles sensoriels, troubles sensitifs ou encore troubles psychiques. Les troubles neurologiques au cours d'une poussée évolutive sont dus à un processus inflammatoire. Celui-ci pourra régresser plus ou moins vite et presque totalement, avec ou sans l'aide d'un traitement, ou persister jusqu'à la destruction de la myéline qui évoluera dans ce cas vers une plaque scléreuse définitive et à l'origine de séquelles.

Les différents modes évolutifs de la SEP

Selon l’évolution de la maladie, on distingue les formes dites récurrentes-rémittentes "RR" (évoluant par poussées évolutives, c’est-à-dire l'apparition d’un déficit neurologique nouveau durant quelques semaines, avec une récupération plus ou moins complète), qui sont les plus fréquentes, représentant 85 % des cas, et les formes progressives. Dans les formes dites secondairement progressives "SP", la progression survient au bout de 15 à 20 ans d’évolution d'une forme "RR". Ce passage de la SEP "RR" à la SEP "SP" concerne un peu moins de 50 % des cas. Il semblerait que ce taux ait aujourd'hui tendance à baisser, sans que l’on puisse encore conclure au rôle éventuel des nouveaux traitements de fond prescrits précocement dans l’histoire de la maladie. Quant aux formes primaires progressives "PP" (installation sur plus de 12 mois d’un trouble neurologique d’aggravation progressive d’emblée et sans poussée), elles représentent 15 % des SEP. Actuellement, on a tendance à regrouper les formes "SP" et "PP" en raison de la similitude des processus sous-jacents, mais en distinguant au sein de ce groupe les patients atteints de SEP "progressive avec évolutivité clinique ou radiologique (IRM)", chez lesquels le processus neuro-inflammatoire dominerait par rapport aux phénomènes dégénératifs. Car ces derniers patients auraient une meilleure réponse à un traitement immunosuppresseur.

Avec une forme rémittente, les signes et symptômes de la poussée s’installent en quelques jours et durent plusieurs semaines. Ils peuvent disparaître spontanément ou plus vite grâce à des perfusions de corticoïdes (médicaments dérivés de la cortisone). Avec une forme progressive, les symptômes, plus insidieux, s’aggravent lentement et de façon irréversible ; il s’agit le plus souvent de troubles de la marche et de l’équilibre.

Les possibilités thérapeutiques actuelles de la SEP

Les traitements dits symptomatiques qui visent à atténuer les troubles sont toujours utiles. Ils appartiennent à l'arsenal thérapeutique médical courant. Ils ciblent les douleurs, la fatigue, la dépression, les troubles vésico-sphinctériens, les troubles de la marche... Les règles dites hygiéniques et diététiques constituent également un apport indispensable : arrêt du tabac, activité physique régulière, alimentation équilibrée, prise de vitamine D, vaccinations, kinésithérapie, ergothérapie, éducation thérapeutique…

Les traitements dits à visée étiologique (censés agir sur le processus pathologique) sont aujourd'hui assez nombreux. Dans les formes sévères, ils font appel à des médicaments proches des anticancéreux qui ont des effets secondaires souvent importants. Au cours des poussées évolutives, on administre un corticoïde (dérivé de la cortisone) qui est anti-inflammatoire puissant. Cela réduit le délai de récupération sans pour autant modifier le pronostic à moyen terme. Indépendamment des poussées évolutives, plusieurs traitements de fond sont disponibles. Les médicaments dits de première ligne permettent une baisse d’environ 30 % de la fréquence des poussées et d’environ 60 % du nombre de nouvelles lésions visibles en IRM. Il s'agit des immunomodulateurs injectables (depuis 1995) : interféron (INF) bêta et acétate de glatiramère ; il s'agit également des immunomodulateurs par voie orale (depuis 2014) : tériflunomide et diméthyl fumarate. Les médicaments dits de deuxième ligne sont indiqués d’emblée pour les formes sévères ou en cas d’échec des médicaments de première ligne. Il s'agit du fingolimod (depuis 2011) qui est un immunosuppresseur sélectif ; ce médicament oral diminue la fréquence des poussées d’environ 55 % ; il s'agit aussi du natalizumab (depuis 2007) qui est un anticorps monoclonal spécifique des lésions et s'administre en perfusion tous les mois ; il diminue la fréquence des poussées d’environ 60 % et réduit d’environ 90 % le nombre de nouvelles lésions actives à l’IRM ; il s'agit encore de l’alemtuzumab (depuis 2016) qui est un autre anticorps monoclonal s'administrant également en perfusion (quand il est administré en première ligne de traitement, il diminue le risque de poussées de 55 % par rapport à l’interféron bêta ; en deuxième ligne, 65 % des patients n’ont aucune poussée pendant deux ans contre 47 % avec l’interféron) ; enfin, il faut citer la mitoxantrone qui est carrément une anthracycline anticancéreuse ; elle est moins utilisée que les autres (une perfusion par mois pendant 6 mois au maximum).

Il n'est pas nécessaire d'insister sur le fait que tous ces traitements (surtout ceux dits de deuxième ligne) sont lourds avec d'importants effets secondaires qui nécessitent une surveillance médicale rapprochée. Parfois, on est amené à interrompre un traitement en raison de la survenue de complications sérieuses. C'est dire que le traitement de la sclérose en plaques n'est vraiment pas très satisfaisant, faute de connaître le mécanisme intime et initial du dysfonctionnement immunitaire conduisant à la destruction de la gaine de myéline dans le système nerveux central.

Quelles sont les fausses idées qui peuvent encore entourer la SEP ?

La sclérose en plaques n’est pas une maladie héréditaire. Cependant, il existe des facteurs génétiques favorables à son développement, sous l’influence d’autres facteurs (notamment environnementaux). Ainsi, plusieurs membres d’une même famille peuvent être touchés. Une prédisposition génétique à la sclérose en plaques résulte de l’association de plusieurs types génétiques, chacun d’entre eux ayant isolément un faible effet sur le risque de développer la maladie. Une vaste étude d’analyse de génomes s’est achevée en 2011. Elle a permis de découvrir 29 types génétiques associés à la maladie. La plupart de ces gènes jouent un rôle dans l’immunité. L’un d’entre eux est le gène HLA (Human leucocyte antigen, situé sur le chromosome 6) qui est impliqué dans la reconnaissance des cellules du "soi" par le système immunitaire. D’autres gènes concernés codent pour des récepteurs de médiateurs chimiques du système immunitaire.

Des plaintes ont été déposées par des patients vaccinés contre l’hépatite B et, plus récemment en 2013, par des patients vaccinés contre les papillomavirus (HPV) impliqués dans des cancers gynécologiques (cancer du col de l'utérus). Plusieurs études ont été menées, y compris à l’INSERM, pour évaluer la sécurité de ces vaccins. Les résultats rassurants, faisant l’objet d’un consensus international, ont conduit les agences de santé à réaffirmer l’absence d’imputabilité de ces vaccins dans la survenue de la sclérose en plaques. En ce qui concerne le vaccin anti-HPV, environ 5,5 millions de doses de vaccin ont été distribuées fin 2013 et 503 cas d’effets indésirables graves, dont 17 cas de sclérose en plaques, ont été rapportés sur la même période. L’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) a de plus mené une étude sur près de deux millions de jeunes filles et a constaté que le taux d’hospitalisation pour des maladies auto-immunes était le même chez les jeunes filles vaccinées que chez les jeunes filles non vaccinées (soit environ 2 pour 10 000 par année). On peut donc affirmer avec certitude que, dans l'état actuel de nos connaissances scientifiques, il n'existe aucun lien manifeste entre, d'un côté la vaccination contre l'hépatite B et celle contre le papillomavirus (HPV), et de l'autre côté, la survenue d'une sclérose en plaques (SEP).

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