Ce que vous devriez savoir sur les tiques avant d'aller vous promener<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Ce que vous devriez savoir sur les tiques avant d'aller vous promener
©wikipedia.org

Sales bêtes

Reconnues comme porteuses de maladies, les tiques sont des petites bêtes qui ne vous veulent pas du bien. Avant d'en croiser une lors d'une balade, de vous faire sauter dessus et -presque- vider de votre sang, la lecture de cet article pourrait ne pas être une si mauvaise idée.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

Voir la bio »

Atlantico : Que sont exactement les tiques ?

Stéphane Gayet : Les tiques ne sont pas des Insectes, mais des Arachnides. L’embranchement des Arthropodes comprend la classe des Insectes (3 paires de pattes), celle des Crustacés et celle des Arachnides (4 paires de pattes). La classe des Arachnides comprend l’ordre des Scorpions, celui des Araignées et celui des Acariens. Parmi les Acariens, on trouve, des plus petits aux plus gros : les acariens domestiques (moins de 0,1 mm) qui sont omniprésents dans nos intérieurs (literie, fauteuils, canapés, tapis, moquettes…) et sont en cause dans l’allergie à la poussière de maison ; les acariens de la peau (0,2 mm) qui parasitent nos follicules pileux ; les sarcoptes (0,3 mm) qui sont les agents de la gale humaine et de la gale animale ; les aoûtats (1,5 mm) qui sont en cause dans des rougeurs douloureuses après contact avec de l’herbe en été ; les tiques (3 mm). On le voit, les tiques font partie des acariens les plus gros ; elles sont visibles à l’œil nu (taille d’une tête d’épingle quand elles sont à jeun). Leur couleur est brun-noir.

Les tiques parasitent tous les animaux sauvages (rongeurs, gros mammifères, oiseaux) et domestiques (chiens, chats, chevaux), ainsi que l’Homme. Ce sont des parasites hématophages, c’est-à-dire qui se nourrissent du sang de leurs victimes. Le cycle de la tique est le suivant : l'œuf donne naissance à une larve qui effectue son premier repas, puis se métamorphose en nymphe qui effectue son deuxième repas, puis se métamorphose en adulte qui effectue son troisième repas, puis s'accouple ; la femelle pond de l'ordre de 3000 œufs en 24 heures. Ainsi, au cours de son cycle, une tique se nourrit plusieurs fois sur plusieurs hôtes avant de se reproduire. Il s’en suit que les tiques –en parasitant successivement plusieurs individus– sont capables de véhiculer et transmettre des microorganismes (bactéries, virus), agents de maladies qui peuvent être graves (question 4).

Lorsqu’elle est gorgée de sang, la tique se laisse tomber de son hôte jusqu’au sol et y reste le temps de digérer. Il ne s’agit donc pas d’un parasite permanent, à la différence de la puce. Elle se nourrit de façon intermittente et on le comprend compte-tenu du volume de ses repas.

Où et quand peut-on rencontrer des tiques ?

Les tiques sont présentes sur tout le territoire français. Elles sont plus fréquentes dans le Grand Est. Si l’on considère les ante-régions, les plus touchées sont l'Alsace, la Lorraine, le Limousin, la Basse-Normandie et la Haute-Normandie, l'Ile-de-France et l'Auvergne. Les tiques préfèrent les zones humides et ombragées, les buissons, les hautes herbes et les forêts. Le printemps et l’automne représentent les deux périodes les plus favorables ; mais les tiques peuvent se développer dès l’instant où les températures sont tempérées. La grande chaleur leur est en effet défavorable, c’est pourquoi leur répartition géographique est limitée. Le mois d’août 2017 n’est pas très chaud et il leur est donc favorable.

Depuis quelques années, on constate, en particulier en France, une fréquence élevée de tiques. Est-ce dû au fait que l’on y est très sensibilisé et qu’on les recherche et les étudie très activement ?

Comment se déroule le contact entre une tique et l’homme ?

Quand une tique est à jeun et qu’elle doit se nourrir, elle grimpe sur la végétation basse (en général, elle ne va guère plus haut que 1,50 m : les hautes herbes, fougères, buissons et les arbustes sont des supports idoines) et se poste à l’affût dans l’attente d’une victime. Elle détecte la chaleur de l’animal ou de l’homme et se laisse tomber sur sa cible animale (petits rongeurs, bovins, ovins, chevaux, chiens ; chats peu souvent) ou humaine qui vient la frôler. Ensuite, elle parcourt la peau à la recherche d’une région favorable, puis s’y accroche en enfonçant son rostre et commence à sucer le sang. Plus la tique reste accrochée longtemps, plus elle devient grosse car elle a ainsi le temps de se gorger de sang. Elle peut remplir son tube digestif de sang jusqu’à être dilatée à l’extrême.

Le rostre est une pièce buccale allongée, qui perfore la peau et aspire le sang. Etant donné qu’il s’agit d’une pièce buccale et que la tique peut rester des heures en place jusqu’à être gorgée de sang, la règle a longtemps été d’utiliser le mot morsure et non le mot piqûre pour parler du parasitisme cutané des tiques. Cela pour faire la différence avec les piqûres de guêpe, d’abeille, de scorpion… Mais dans ce cas, on devrait à plus forte raison parler de morsure pour les phlébotomes, ces petits moucherons qui dilacèrent la peau et les veines (d’où leur nom). Et comment qualifier le contact des moustiques avec la peau de l’homme ? Il a été finalement décidé, il y a quelques années, d’admettre le terme piqûre pour les tiques ; on peut donc aujourd’hui utiliser l’un comme l’autre, parler de piqûre de tique n’est plus une impropriété.

Il faut noter un point important : la morsure ou piqûre de tique est indolore ; on ne sent absolument rien. Ce caractère indolore contribue au danger de ces parasites qui nous agressent de façon plus que discrète, vraiment subreptice (question 5).

Quels sont les risques pour la santé ?

1. La borréliose de Lyme est la plus fréquente des maladies dont l’agent infectieux est transmis par les tiques en Europe et en Amérique du Nord. L’agent responsable est une bactérie appartenant au complexe Borrelia burgdoferi. Le nombre de cas varie selon les années, les saisons et les régions. Il est fonction de l’activité et du taux d’infection des tiques. En Europe, la bactérie est transmise essentiellement par une tique qui appartient au genre Ixodes : Ixodes ricinus.

On pourra trouver ici un développement sur la maladie de Lyme : http://www.atlantico.fr/node/2956157

Les formes dangereuses sont la nymphe de la tique et l’adulte. Le taux d’infection des nymphes est plus particulièrement élevé en Alsace, ainsi qu’en Auvergne et d’une façon moindre au Limousin.

La maladie de Lyme atteint également les animaux, en particulier le chien qui peut souffrir des mêmes complications de la maladie que l’homme (articulaires, neurologiques, cardiaques…).

2. L’encéphalite à tique d’Europe centrale est heureusement beaucoup plus rare. En France, la situation n’est pas très bien connue : quelques cas sont diagnostiqués chaque année, essentiellement en Alsace, ou après un voyage à l’étranger. Les activités à risque sont les activités de loisir, dans les zones boisées humides (campeurs, randonneurs, ramasseurs de champignons, chasseurs…). Les pays les plus à risque en Europe géographique sont la Suisse et l’Autriche. On constate une progression de la maladie en direction de l’Europe du Nord et de l’Est. L’agent infectieux est un virus, proche de celui de la fièvre jaune et de celui de la dengue (flavivirus). Mais il existe depuis plusieurs années un vaccin efficace.

3. D’autres maladies infectieuses peuvent être consécutives à une inoculation par morsure de tique, telles que la fièvre Q (atteinte surtout pulmonaire) et les rickettsioses (maladies liées à de très petites bactéries intra-cellulaires, proches de l’agent de la fièvre Q, et provoquant notamment une éruption –« boutons »- fébrile). La liste des maladies pouvant être ainsi inoculées est en réalité longue, mais certaines ont une probabilité infime.

Comment se protéger des tiques ?

Les promenades notamment en forêt sont très bonnes pour la santé (concept de "sylvo ou sylva thérapie"), il ne faut surtout pas s’en priver. Il ne faut pas non plus tomber dans la phobie des tiques. Il s’agit de connaître les situations à risque et les mesures de protection à prendre.

Pour réduire le risque de morsure de tique, il est recommandé de porter des vêtements longs (couvrant les bras et les jambes) et fermés (fixer le bas de pantalon dans les chaussettes), d’appliquer des répulsifs contre les insectes sur la peau (bien que n’étant pas des insectes, les tiques leur sont sensibles) ou sur les vêtements, en respectant les contre-indications.

Au retour de la promenade, la piqûre de tique étant indolore, il faut systématiquement inspecter de façon minutieuse l’ensemble du corps pour détecter la présence éventuelle de tiques, et retirer la ou les tiques le plus rapidement possible. Plus la tique reste fixée longtemps sur la peau, et plus le risque de transmission de microorganismes augmente.

La tique peut se fixer dans toute région du corps. Mais elle préfère les zones chaudes et humides. La région de la cheville, le creux du genou, la racine de la cuisse, l’abdomen, le creux du coude, le dos, les aisselles, la nuque et le cuir chevelu figurent parmi les zones de morsure les plus fréquentes. Concernant plus particulièrement le cuir chevelu, il faut penser à renouveler la palpation après 24 heures, car la nymphe ou l’adulte sont si petits qu’ils peuvent échapper à une première palpation lorsqu’ils sont à jeun et donc minuscules.

Que faire en cas de morsure ou piqûre de tique ?

Une tique doit être enlevée au plus vite. Il faut pour cela utiliser un tire-tique ou une pince fine, à défaut les ongles. Quand on utilise un tire-tique, il convient de saisir la tête de la tique avec le tire tique et le tirer vers le haut en tournant (deux ou trois tours) comme lorsque l’on dévisse une vis. Si l’on ne dispose pas d’un tire-tique, on peut prendre une pince : saisir la tête de la tique avec le bout de la pince et enlever la tique en tirant vers le haut, mais sans tourner dans ce cas (on risquerait de blesser la peau).

Il est dangereux et fortement déconseillé d’employer un produit chimique tel que l’éther, l’essence, un détachant, etc. Ces produits provoquent le détachement de la tique, mais il est précédé d’une régurgitation très dangereuse. Lorsque la tique a été retirée, il faut vérifier qu’une partie du rostre n’est pas restée dans la peau, puis désinfecter le site de la morsure. Cette zone de morsure doit être surveillée attentivement pendant quatre semaines. Si une rougeur apparaissait à cet endroit, il serait nécessaire de consulter son médecin au plus vite. Seule une prise en charge médicale prompte et adaptée pourrait alors éviter l’évolution vers une maladie douloureuse et invalidante telle qu’une borréliose de Lyme compliquée.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !