La ville flottante imaginée par la Silicon Valley pourrait bientôt passer du rêve à la réalité<!-- --> | Atlantico.fr
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Le président de la Polynésie française, Édouard Fritch devrait probablement accepter d'accueillir dans ses eaux territoriales cette expérience urbaine hors du commun.
Le président de la Polynésie française, Édouard Fritch devrait probablement accepter d'accueillir dans ses eaux territoriales cette expérience urbaine hors du commun.
©Juhan Harm / CC BY 2.0

Utopie ? Vraiment ?

Va-t-on voir apparaître une ville flottante à quelques kilomètres des côtes franco-polynésiennes ? C'est en tout cas le projet du Seasteading Institute, parrainé par le milliardaire Peter Thiel, qui œuvre à promouvoir ces îles du futur. Et le président de la collectivité d'outre-mer Édouard Fritch serait prêt à en accueillir une dans ses eaux.

On en entend parler depuis des années. Des villes flottantes ultramodernes étaient promises, mais ces constructions pharaoniques à vocation écologique sont pour le moment toutes restées à l'état de projet. Et, comme on peut le constater sur la liste non exhaustive fournie par le journal Libération, ils sont nombreux. Nombreux, tout comme les motifs invoqués par les défenseurs de ce futur sur l'eau, justifiant ces constructions : surpopulation, submersion d'une partie des villes par la montée des eaux, écologie

Utopiste ou visionnaire ?

Mais, peut-être, y en aura-t-elle une qui finira par se concrétiser ? Le projet porté par le Seasteading Institute, qui conçoit ces villes en milieu aquatique, est en tout cas en très bonne voie, révèleBusiness Insider. Pour cause, le président de la Polynésie françaiseÉdouard Fritch devrait probablement accepter d'accueillir dans ses eaux territoriales cette expérience urbaine hors du commun. Et cet accord facilite grandement les choses. On vous explique tout.

"Lors de l'écriture de la Constitution des États-Unis, nous avions des droits auxquels nous n'avons plus accès aujourd'hui. La question qui s'impose est : pouvons-nous revenir à l'état initial des choses ? Comment tout recommencer ?" Ces interrogations, entre utopie et philosophie, ont été confiées en 2011 au média Details Magazine par le milliardaire américain Peter Thiel, célèbre "capital risqueur" qui s'était notamment fait remarquer pour ses investissements aux dimensions futuristes, tels que le financement de campagnes d'expériences dans le domaine de l'inversement du vieillissement cellulaire par la transfusion de sang ou encore celui de la singularité génétique. La volonté de revenir vers un modèle de société pas encore normé et encadré de toutes parts par les lois, décrets et accords nationaux et internationaux est-elle la nouvelle lubie du riche homme d'affaires ? C'est en tout cas l'une des ambitions affichées par le Seasteading Institute, dont Peter Thiel est l'un des cofondateurs, avec Patri Friedman, activiste libertaire et petit-fils de l'économiste Milton Friedman. Et la création d'une ville flottante, connectée au monde mais indépendante politiquement, pourrait concrétiser cette idée à première vue loufoque et irréalisable.

Territoires maritimes et montée des eaux

Depuis la création de l'institut en 2008, ces projets futuristes font réagir du côté de la Silicon Valley. Celui d'une ville flottante composée de plusieurs plateformes modulables, déplaçables et ajustables, est toutefois sujet à certaines critiques de la part de quelque actionnaires influents. Mais ce n'est pas ce qui va arrêter le déterminé Peter Thiel, qui a déjà sorti de sa poche 1,7 million de dollars (1,5 million d'euros) et s'est entouré d'une ribambelle d'investisseurs dont les noms n'ont pas été dévoilés, déploreBusiness Insider. Trouver des investisseurs n'était d'ailleurs pas le plus difficile. La principale complication concernait la localisation de cette ville flottante : en effet, impossible de construire cette cité à moins de 320 kilomètres des côtes américaines, réglementation en vigueur oblige. À une telle distance de la civilisation, les coûts de construction et de maintenance de cette ville flottante seraient exorbitants : 225 millions de dollars (201 millions d'euros)  pour la construction, 8 millions annuels pour la maintenance (7 millions d'euros), alors que l'île en elle-même ne coûterait "que" 30 millions de dollars (27 millions d'euros). Il fallait donc pour Peter Thiel et Randolph Hencken, directeur du Seasteading Institute, se tourner vers une nation qui voudrait bien prêter ses eaux territoriales au jeu de ce projet urbain futuriste.

C'est là que la Polynésie française entre en jeu. Le Seasteading Institute s'est tourné vers la collectivité d'outre-mer et plus particulièrement son président Édouard Fritch pour accomplir ce projet, qui s'y est montré favorable, intéressé par l'initiative. Il faut dire qu'un accord définitif (Fritch est actuellement en train de repasser en revue les termes de ce mémorandum d'entente avant de prendre sa décision) serait gagnant-gagnant. En effet, les archipels polynésiens voient leur existence menacée par la montée des eaux. Les villes flottantes pourraient alors peut-être incarner l'avenir du territoire.

Entre indépendance et mondialisation

À huit heures d'avion de Los Angeles, les atolls polynésiens sont reliés au câble de fibre optique sous-marin qui passe notamment par Hawaï, ce qui permettrait aux ingénieurs de bénéficier d'une bande-passante suffisante pour élaborer un tel projet. Les îles aux alentours pourraient également fournir les matériaux nécessaires à la construction. Les habitants de la ville flottante devraient alors obéir aux lois françaises les plus élémentaires concernant le pénal. Toutefois, les règles économiques seraient à définir ex nihilo, comme le souhaitait Peter Thiel. Pour autant, la ville flottante ne serait pas classé territoire français, et ne recevra par exemple aucune subvention de la part des collectivités. Cette île artificielle constituerait alors un nouveau modèle territorial, indépendant d'un État sans en constituer un par défaut, tout en demeurant connecté au monde. "Toutes les terres du monde sont revendiquées par les États. L'océan est notre dernière place sur Terre", justifie Hencken. Si ce projet finit par voir le jour, ses habitants se retrouveront ainsi dans la peau de pionniers, arrivant sur un territoire immaculé. Et Hencken d'insister sur le fait qu'il ne s'agit pas de vivre en autarcie : "Si quelqu'un veut s'isoler, il n'a qu'à acheter un bateau sur-le-champ et s'en aller naviguer au large durant des mois. Partir en ermite. Le Seasteading (le mot-valise Seasteading désigne en lui-même l'établissement d'une base maritime dans des eaux revendiquées par aucun gouvernement) est fait pour les personnes qui veulent s'engager dans une alternative régie par l'échange d'idées au sujet du commerce et des gouvernements".

Si cette ville flottante n'a pas encore été baptisée, ses ingénieurs ont déjà une certaine idée de son développement. Elle serait composée de plateformes modulables s'imbriquant les unes aux autres. À l'image d'une ville qui accueille de plus en plus d'habitants, la cité flottante se verrait quant à elle agrandie par la multiplication de ses plateformes qui s'étendraient du centre urbain vers la périphérie. La mise en oeuvre du projet devrait débuter en 2020.

Une question reste toutefois sans réponse : qui gouvernerait cette ville ? Les villes flottantes et leur statut administratif flou pourraient relancer le débat sur la viabilité d'une société libertaire, voire anarchique.

Cette ville flottante devrait ressembler en tous points au modèle déjà présenté dans cette vidéo datant d'août 2015 :

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