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En s’isolant de toute interférence, des scientifiques ont fait une découverte majeure sur l’un des phénomènes les plus violents de l’univers : les explosions d’étoiles
©REUTERS/NASA

Haro sur les ondes FM

Alors que des scientifiques s'échinaient depuis 30 ans à étudier une étoile située à 168 000 années-lumière de nous et dont l'explosion avait été visible dans le ciel terrestre, des chercheurs de l'université de Sydney ont réussi à percer de nombreux mystères grâce à une méthode en apparence toute simple : s'éloigner des ondes FM.

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy

Olivier Sanguy est spécialiste de l’astronautique et rédacteur en chef du site d’actualités spatiales de la Cité de l’espace à Toulouse.

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Atlantico : Des scientifiques de l'université de Sydney ont réussi cette semaine à collecter des informations sur la vie d'une étoile située à 168 000 années-lumière de nous qui avait explosé il y a 30 ans. Alors qu'on ne réussissait jusque-là à étudier "uniquement" les 20 000 dernières années de sa vie, les chercheurs ont cette fois réussi à glaner des informations sur la vie de cette étoile des millions d'années avant son explosion. Comment cela a-t-il été possible et qu'ont-ils découvert ?

Olivier Sanguy :Pour être clair, il y a une trentaine d’années, exactement en février 1987, ce que les astronomes ont observé est la lumière de l’explosion d’une étoile qui nous est parvenue. Ce "flash" fut émis en fait voici 168 000 années puisque l’étoile en cause est à 168 000 années-lumière, ce qui veut dire que la lumière met 168 000 ans à parcourir la distance qui nous sépare à la vitesse de 300 000 km/s. Lorsque les astronomes expliquent qu’ils ont pu glaner des informations sur la vie de cette étoile quelques millions d’années avant son explosion au lieu de 20 000 ans, il ne faut pas imaginer qu’ils ont trouvé le moyen de remonter le temps ! En fait, en observant le "cadavre" de cette étoile (avec 168 000 ans de décalage, je le rappelle) dans de nouvelles longueurs d’onde avec plus de précision, ils ont été capables de reconstituer les différents stades qui ont mené cette étoile à devenir une supernova. C’est un peu comme un enquêteur qui arrive sur une scène de crime : il ne peut pas remonter le temps au moment des événements mais en analysant les indices, il peut en déduire ce qui est arrivé. Imaginez maintenant qu’il examine cette scène avec de nouveaux instruments, comme la lumière UV largement popularisée par les séries policières. Il va alors remarquer de nouveaux indices qui lui donneront la possibilité de mieux reconstituer les événements. C’est ce qui s’est passé avec cette supernova cataloguée SN 1987A. SN pour SuperNova et A pour la première détectée en 1987.

Comment expliquer que des ondes FM puissent perturber et parasiter des observations astronomiques ?

L’astronomie ne se contente pas, depuis longtemps, de la seule lumière visible. Il y a l’UV, l’infrarouge, les rayonnements X, etc. Et bien évidemment, tout le domaine radio. Or, les émissions radio terrestres, que ce soient les téléphones portables et leurs relais, les stations de radio et de TV, les bornes WiFi, etc., créent une pollution radio. Certes, des organismes internationaux veillent à attribuer les fréquences radio afin de limiter les dégâts, mais parfois cela ne suffit pas. C’est un peu comme si vous essayiez d’écouter de la musique sur votre chaîne Hi-Fi avec une personne à côté de vous qui utilise une perceuse : vous allez rater pas mal d’informations musicales ! A l’image des grands télescopes professionnels qui sont implantés loin des zones urbaines pour fuir la pollution lumineuse, certains observatoires dans le domaine radio sont implantés dans des régions souvent désertiques à grande distance des infrastructures de notre civilisation pour minimiser cette pollution radio. C’est la stratégie du CAASTRO, un réseau d’antennes dédiées à l’astronomie implanté dans le désert australien et qui a été employé pour scruter SN 1987A dans le domaine radio.

Quel intérêt scientifique y a-t-il à s'intéresser au passé des étoiles dans l'univers ? Cette avancée ouvre-t-elle la voie à d'autres découvertes ?

En science, tout se tient. Une découverte dans un domaine peut ainsi se révéler féconde dans d’autres sans qu’on ait pu le prévoir. Se pencher sur la vie des étoiles, y compris celles qui sont très différentes de notre Soleil, peut sembler moyennement utile. Mais pour mieux comprendre notre étoile et arriver à mieux prévoir certains de ses sursauts d’activités qui ont des conséquences pour nous (les éruptions solaires les plus fortes perturbent les télécommunications ou surchargent les réseaux électriques), il faut aussi comprendre le schéma général de toutes les étoiles dans leur diversité. De plus, les étoiles et notamment celles qui finissent leur vie de façon violente comme SN 1987A sont des sortes de laboratoires de physiques extrême : il s’y déroule des phénomènes d’une intensité qu’aucun labo sur Terre ne peut rêver de reproduire. Les scientifiques scrutent alors les lois de la physique jusque dans leurs retranchements pour ainsi dire et en identifient les limites pour éventuellement les affiner, voire les remettre en cause. Et sans ce type de recherche, on ne peut établir les fondations qui permettent plus tard de créer des applications plus tangibles. N’oublions pas que toute notre vie moderne repose sur des technologies qui n’existeraient pas si de la science fondamentale n’avait pas été faite depuis des siècles.

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