Petit papa NoNiel ? Free Mobile ou les bienfaits de la concurrence<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
Free vient enfin de lever le voile ce mardi matin sur son offre mobile.
Free vient enfin de lever le voile ce mardi matin sur son offre mobile.
©Reuters

Le buzz

Ce mardi matin Xavier Niel a présenté ses forfaits illimités sans engagement à 19,99 euros (15,99 euros pour les personnes abonnées chez Free pour la téléphonie mobile et Internet). Et l'iPhone accessible à 1 euro.

Emmanuel Combe

Emmanuel Combe

Emmanuel Combe est vice-président de l'Autorité de la concurrence et professeur affilié à ESCP-Europe. Il est également professeur des universités.

Spécialiste des questions de concurrence et de stratégie d’entreprise, il a publié de nombreux articles et ouvrages, notamment sur le modèle low cost (Le low cost, éditions La Découverte 2011). Il tient à jour un site Internet sur la concurrence.

Voir la bio »

A lire aussi :
- Un forfait à 19,99 euros chez Free Mobile

- La Free mobile mania est-elle excessive ?


Après avoir savamment entretenu le suspens et fait le buzz quant à la date précise de lancement de ses forfaits, Free vient enfin de lever le voile ce mardi matin sur son offre mobile. Voilà une belle occasion de faire le point sur les dividendes –parfois insoupçonnés- de la concurrence. Non pas en invoquant de grands principes théoriques ou idéologiques ; mais en prenant appui sur ce qui a été observé dans d’autres secteurs qui ont connu eux aussi l’entrée de nouveaux opérateurs.

Premier effet, sans doute le plus visible et le plus immédiat : les baisses de prix. L’entrée d’un nouveau concurrent conduit l’ensemble des acteurs à ajuster leurs prix à la baisse. Ainsi, dans l’aérien, plusieurs études américaines ont montré que l’entrée de Southwest Airlines sur une ligne poussait les compagnies concurrentes à diminuer les prix de l’ordre de 30%. Cette baisse de prix a même été parfois préventive, ce que l’on a pu appeler « l’effet Southwest » : les opérateurs n’ont pas attendu l’entrée effective du trublion et ont pris les devants, à la fois pour lui couper l’herbe sous les pieds et pour fidéliser les clients qui seraient tentés d’aller voir ailleurs demain. C’est exactement ce qui se passe depuis un an dans la téléphonie mobile en France, avec une forte animation sur les prix de la part d’Orange, de SFR et de Bouygues, notamment via le lancement de marques à bas prix (B&You ou Sosh). Bercy avait fait l’hypothèse en 2008 que l’entrée de Free conduirait à des baisses de prix de tous les forfaits de l’ordre de 7% : force est de constater que la réalité a largement dépassé toutes les prévisions !

Second effet : une démocratisation dans l’accès au marché. Le cas de l’aérien est à nouveau instructif : la baisse de prix résultant de l’entrée d’une compagnie low cost a conduit des clients qui ne prenaient pas l’avion jusqu’ici à franchir le pas. Le trafic aérien a littéralement explosé sur certaines destinations, comme Londres-Barcelone dont le nombre de passagers a été multiplié par 4 entre 1995 et 2005. Sur le marché de la téléphonie mobile, où le taux de pénétration atteint en France les 100%, il sera intéressant de regarder dans quelle mesure la baisse de prix va engendrer un « effet d’aubaine » chez certains consommateurs.

Troisième effet : un grand dynamisme commercial qui favorise la variété des produits. L’exemple du hard discount alimentaire est instructif. Face à l’essor des Lidl et Aldi en France au cours des années 2000, certains opérateurs de la distribution alimentaire ont riposté non pas en baissant les prix mais en différenciant leur offre par une montée en gamme (Monoprix), par de nouveaux concepts de magasins (Dailymonop par exemple), par une spécialisation sur des niches (Grand Frais).  On peut observer aujourd’hui le même dynamisme chez les trois opérateurs de téléphonie mobile, qui ont multiplié depuis un an les innovations commerciales, à l’image de SFR et de ses nouvelles gammes de forfaits.

Quatrième effet, plus invisible et même contre-intuitif : des créations d’emplois. Il est souvent dit que la concurrence, en intensifiant les gains de productivité, serait l’ennemi de l’emploi. Mais c’est oublier deux effets indirects qui viennent contrebalancer ce premier effet négatif. Tout d’abord, lorsque le prix baisse, la demande peut augmenter, ce qui nécessite d’embaucher du personnel. C’est exactement ce qui s’est passé dans l’aérien en Europe, après la déréglementation de 1993 : selon la Commission Européenne, alors que la productivité augmentait de plus de 35% dans ce secteur, l’emploi quant à lui est resté remarquablement stable sur la période 1998-2007, aux alentours de 430 000 salariés. Bien entendu, les créations d’emplois ont plutôt eu lieu au sein des compagnies low cost, tandis que les compagnies traditionnelles ont vu leurs effectifs stagner, voire décliner. En second lieu, la baisse des prix entraîne pour le client une hausse de son pouvoir d’achat, qui va aller se « déverser » dans d’autres secteurs, où l’emploi augmentera. Dans l’aérien, l’économie réalisée sur le prix du billet a conduit certains consommateurs à dépenser plus durant leur séjour, créant ainsi des emplois indirects dans l’hôtellerie-restauration.

Dans le cas de la téléphonie mobile, si l’entrée de Free permet de réduire la facture de téléphone portable, il est probable que les consommateurs reporteront une partie de ce gain sur d’autres postes de dépense comme par exemple les biens culturels ou les loisirs. Décidément, la concurrence a bien des mérites, parfois insoupçonnés.

Vice-Président d'Iliad, maison mère du fournisseur d'accès Internet Free, Xavier Niel est aussi actionnaire d'Atlantico.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !