Un an après, pas de tsunami Netflix mais vos habitudes de consommation vont pourtant changer <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Dès le lendemain de son lancement les critiques sur la pauvreté du catalogue n’ont cessé de pleuvoir sur la firme américaine.
Dès le lendemain de son lancement les critiques sur la pauvreté du catalogue n’ont cessé de pleuvoir sur la firme américaine.
©Reuters

Touche pas à mon poste

Un an après le lancement de la version française de Netflix, le bilan est plutôt mitigé. La firme américaine est, en revanche, devenue le symbole d'un marché audiovisuel en plein bouleversement.

Julien Gagliardi

Julien Gagliardi

Julien Gagliardi est journaliste pour Atlantico. Il couvre l’actualité des entrepreneurs et des start-up.

Voir la bio »

Tsunami, tremblement de terre, raz-de-marée… En septembre 2014, aucun mot n’était trop fort pour décrire l’arrivée du géant américain de la SVOD - traduisez vidéo à la demande par inscription - sur le marché audiovisuel français. Un an plus tard, force est de constater que les TF1 et autres M6 sont toujours en place et que l’invasion annoncée ressemble plutôt à une entrée par la petite porte.

Et pour cause, dès le lendemain de son lancement les critiques sur la pauvreté du catalogue n’ont cessé de pleuvoir sur la firme américaine. "La déception était à la hauteur de l’attente" estime Gilles Pezet chez NPA Conseil. "Il y a eu un gros emballement médiatique avant le lancement. Mais un an plus tard, on constate que l’offre du catalogue a été multiplié par trois et qu’il a gagné en qualité. On est à environ 10.000 vidéos, un chiffre similaire à son principal concurrent Canal Play, du groupe Canal Plus", analyse le consultant qui suit de près ce dossier. En parallèle de l’effort sur le catalogue, la firme a surtout intensifié ses campagnes marketing permettant de recruter de nouveaux abonnés. "Aujourd’hui, on peut dire que la première année est globalement sur le scénario positif que l’on avait envisagé même si c’est certainement un peu déceptif pour l’entreprise".

Dans les faits, difficile de dire si la première année française de Netflix est une réussite ou non et pour cause : impossible de connaître le nombre exact d’abonnés puisque l’entreprise ne les communique pas. "De source non-officielle, on était à 250.000 abonnements début 2015" estime Veronique Pellet, consultante Senior Manger Media chez Kurt Salmon. "On sait simplement que le nombre total d’abonnés c’est 65 millions dans le monde, dont 42 millions aux USA. Sur la France, le marché se structure autour d’un duo Canal Play/Netflix dont les hypothèses d’abonnement à fin 2015 sont à environ 2 millions, en répartition quasi égale avec une légère avance pour Netflix. Il faut surtout noter que Canal Play revendique aujourd’hui 700.000 abonnements : c’est 180.000 de plus depuis la date de lancement de Netflix. L’enseignement essentiel de cette première année pour Netflix, il est ici, l’américain dynamise le marché".

Au-delà de son lancement en demi-teinte, Netflix a donc une grande part de responsabilité dans la montée en puissance du marché de la SVOD sur le sol français. "Cela ne veut pas dire que la télévision linéaire est morte. Mais les chaînes historiques ont plutôt de l’avenir sur les grands évènements, les directs, le divertissement, le sport ou l’information. Il est clair que la rediffusion en boucle de séries des années 70 n’a plus grand sens une fois que l’on a testé ces services" estime Gilles Pezet.

Pour Veronique Pellet, "c’est un jeu d’enfant d’utiliser un Canal Play ou un Netflix car l’ergonomie est très bien pensée. Leur astuce, c’est d’avoir emprunté des codes à la télévision dite linéaire. Quand vous regardez une série, le système enchaîne tous les épisodes. Vous avez l’impression de regarder la télévision, mais vous choisissez ce que vous regardez. Idem pour le moteur de recommandation, hyper-puissant, c’est évidemment plus intéressant que de fouiller dans Télérama. On répond clairement à la façon dont les gens regardent la télévision depuis toujours mais en mieux". Un enjeu majeur pour ces firmes puisque la consommation de séries représente 80% des visionnages sur les deux plateformes. On comprend surtout l’intérêt pour Netflix d’augmenter ses investissements dans la production de contenu exclusif.

Des nouveaux usages qui commencent donc à modifier notre consommation de la télévision et vont obliger les grands acteurs des médias à revoir leur stratégie et leur modèle économique. Sur la SVOD, la diversité et la quantité du contenu permet de recruter des abonnés, là où les chaînes doivent arbitrer sur une sélection de contenu pour attirer le plus de téléspectateurs possible s’ils veulent générer des recettes publicitaires.

Le salut de la télévision linéaire viendra en partie de l’internet avec l’utilisation du "deuxième écran", votre smartphone ou une tablette, permettant des interactions lors d’évènements en direct. Le média TV va devoir accélérer sur la manière dont il peut favoriser les échanges avec deux écrans en temps réel et l’expérience live avec les réseaux sociaux comme Twitter, un domaine sur lequel assez logiquement la SVOD aura du mal à se positionner" décrit Thomas Jamet, cofondateur de MediaBrands, une agence média dédiée aux nouvelles technologies.

"On voit bien que le modèle a besoin de se réinventer" estime Gilles Pezet chez NPA Conseil. "Les chaînes ne sont pas assez propriétaires de ce qu’elles diffusent, elles vont donc aussi devoir accentuer la production de contenu sur lesquelles elles ont des droits afin de faire du business à l’international et proposer, au-delà de la diffusion, leur propre offre de télévision délinéarisé, exactement comme Netflix".

Reste à savoir comment les deux acteurs français vont faire évoluer le contenu de leur offre pour rester attractif face à des chaînes linéaires de plus en plus enclines à recentrer leur programmation et développer l’utilisation des nouvelles technologies pour se rapprocher de son sacro-saint téléspectateur. Pour Thomas Jamet, "la vraie piste pour ces acteurs c’est de coller aussi aux usages du mobile avec des formats courts que l’on peut charger dans le métro ou dans le train. Aujourd’hui, consommer 1h30 de vidéo avec son iPhone sur Canal Play c’est assez compliqué."

L’autre piste serait, comme sur la version américaine de Netflix, de proposer au-delà des documentaires et des séries, des émissions sur des thématiques comme la cuisine ou la décoration, présentées par des stars du poste. Valérie Damidot et Cyril Lignac bientôt sur Netflix ou Canal Play ? Les prochains mercato du petit écran pourraient nous offrir quelques surprises.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !