Doit-on craindre une expansion de l’attaque des oliviers par la Xylella fastidiosa ?<!-- --> | Atlantico.fr
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les oléiculteurs des Alpes-Maritimes qui s'inquiètent de la propagation de la bactérie Xylella fastidiosa sur le département et en France.
les oléiculteurs des Alpes-Maritimes qui s'inquiètent de la propagation de la bactérie Xylella fastidiosa sur le département et en France.
©Reuters

Arbres en détresse

Après les Corses, ce sont maintenant les oléiculteurs des Alpes-Maritimes qui s'inquiètent de la propagation de la bactérie Xylella fastidiosa sur le département et en France. Transmise par des insectes piqueurs-suceurs, les arbres se dessèchent rapidement avant de contaminer les végétaux voisins. Mais faut-il réellement craindre cette bactérie ?

Christian de Carnet Carnavalet

Christian de Carnet Carnavalet

Christian de Carnet Carnavalet est agronome et agriculteur. Meilleur Ouvrier de France en Art des Jardins, architecte-paysagiste, il est le Président d'AGRIBIO 06. Christian de Carné Carnavalet est un acteur professionnellement et humainement engagé dans le développement de l'agriculture biologique et l'agroécologie. Il est notamment l'auteur de "Agriculture biologique: une approche scientifique" ed France Agricole 2012 "Biologie du sol et agriculture durable" ed France Agricole 2015.
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Atlantico : Alors que 30.000 hectares d'oliviers ont été décimés dans les Pouilles et dans le sud est de l'Italie depuis 2013, la Corse-du-Sud (Propriano) se retrouve elle aussi confrontée à la bactérie Xylella fastidiosa. Doit-on craindre une épidémie généralisée en France ?

Christian de Carné Carnavalet : Avec la Nature, il est toujours difficile d'être affirmatif. Mais on peut raisonnablement affirmer qu'une épidémie généralisée n'est pas possible et ceci pour trois raisons principales.

Tout d'abord, les arbres susceptibles d'être infectés en France sont dans des conditions environnementales plus favorables que dans les Pouilles ou le Sud de la Corse. En effet, le climat y est moins aride, les températures diurnes et nocturnes plus douces. Ensuite, l'infection des plantes dépend de leur capacité d'autodéfense, de leur système immunitaire. Des plantes dans des climats plus humides ont un système de défense naturel plus efficace grâce à une activité microbienne au niveau des racines qui est plus importante. Enfin, nous sommes avertis et personne en France ne laissera la bactérie Xylella fastidiosa sans surveillance, sans traitement curatif et sans prendre immédiatement des mesures culturales préventives.

En ce qui concerne l'Italie, elle n'a pas réagi. Elle a laissé Xylella avancer. Cette bactérie n'est pas foudroyante et on la connait depuis 1882! Tous les agronomes avertis dans le monde la connaissent et réagissent.

Bien que connue depuis 1882, aucun traitement ne semble pour l'instant être efficace. Y a-t-il toutefois des moyens de lutter contre la bactérie et l'insecte qui la propage ?

On ne peut pas laisser dire qu'il n'y a aucun traitement efficace. Depuis 20 ans, les chercheurs américains ont mis au point des traitements à base de composés d'huiles essentielles en traitement curatif : thymol, carvacol, eugenol, geraniol, aldehydes. Toute la famille des terpènes naturels ou chimiques en somme. Ces traitements se font sur le feuillage et/ou en arrosage au pied des plantes. Ces terpènes tuent la bactérie en quelques jours.

D'autres chercheurs ont travaillé sur les virus qui donnent d'excellents résultats et les premiers traitements in-vivo se déroulent en Californie. Des chercheurs ont également montré que N-acétylcystéine (NAC), un acide aminé, a induit une réduction importante des symptômes et une rémission de la bactérie.

Mais les huiles essentielles sont extrêmement efficaces contre les bactéries. Elles sont utilisées en médecine quotidiennement. Leur usage sur les plantes n'est pas officiellement reconnu mais c'est une piste très sérieuse que le département des Alpes maritimes va explorer.

Pour éviter d'avoir à abattre les arbres infectés, peut-on prévenir la contamination des arbres concernés et notamment des oliviers par des moyens alternatifs ?

On peut prévenir les attaques des oliviers et de toutes les autres plantes en les cultivant sans engrais chimique, mais uniquement avec les matières organiques du type fumier, terreau, engrais vert, afin de favoriser la vie microbienne. En effet, les milliards de bactéries et de champignons n'accepteront pas qu'un intrus les domine. Car le problème avec les engrais chimiques, c'est qu'ils empêchent la résistance microbienne alors que normalement, les plantes se défendent grâce aux bactéries et aux champignons qui vivent au niveau des racines.

C'est cette activité biologique qui fait que la plante est en bonne santé. Pour prévenir la contamination il faut donc faire en sorte que les plantes résistent d'elles-mêmes aux bactéries. C'est le sens de l'agriculture biologique : maintenir les plantes dans de bonnes conditions et faire en sorte que la plante mette en place tous ses mécanismes de défense. Seule une plante en bonne santé va avoir un réaction efficace. Les oliviers ont besoin de leurs défenses immunitaires.

En réalité, s'il y avait une bonne activité biologique, la bactérie n'aurait jamais pu s'installer.

D'autres maladies d'arbres fruitiers sont-elles comparables à la maladie de Pierce transmise par la Xylella fastidiosa ?

Oui, "Erwinia amylovora", dit "le feu bactérien". Il infecte nos arbres fruitiers depuis 50 ans, et il est identique à Xylella. On a fait la révolution en arrachant tous les arbres contaminés puis on a fait la recherche sur cette bactérie et aujourd'hui, on vit avec.

Propos recueillis par Emilie Gougache

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