Science des abysses : des créatures sous-marines totalement inconnues filmées pour la première fois<!-- --> | Atlantico.fr
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Une méduse observée à plus de 3.500 mètres.
Une méduse observée à plus de 3.500 mètres.
©National Oceanic and Atmospheric Administration

Sous les vagues, un monde unique

Une expédition américaine a explore des fonds marins si profonds qu'elle a pu observer des espèces encore jamais vues.

L'océan, source inépuisable d'émerveillement. Une expédition sous-marine américaine a exploré récemment les fonds marins de Porto-Rico et des Iles Vierges. L'équipe de chercheurs d'Okeanos Explorer, sous l'égide du National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), l'agence américaine responsable de l'étude de l'océan, a mené cette imposante expédition durant 52 jours. Les plongées ont été effectuées entre le 9 et le 30 avril dernier.

Si les deux premières étapes ont consisté en une cartographie des fonds marins inexplorés, les scientifiques ont ensuite pu explorer les immenses espaces insondables du grand bleu. Pour cela une embarcation submersible télécommandée, pourvue de caméras, a été envoyée sous l'eau.

Le véhicule est descendu à 20 000 pieds sous l'océan, soit à plus de 6 kilomètres de profondeur. Au total, le robot a effectué 12 plongées, permettant aux scientifiques d'observer une centaine d'espèces de poissons, de coraux et autres organismes.

Des images fascinantes, un intérêt scientifique certain et des découvertes extraordinaire: le robot est descendu à de telles profondeurs que l'équipe de chercheurs a pu observer des organismes.... n'ayant même pas de noms.

Par exemple, l'équipe du NOAA n'a pas réussi à identifier cette étrange créature, ressemblant à un soleil pourvu de fils. Selon les premières analyses, la communauté scientifique pensent qu'il s'agirait d'un type de foraminifère.

"Dans les zones peu étudiés, 90% des espèces que l'on observe sont inconnues" nous explique Lenaick Menot, chercheur au Laboratoire Environnement Profond - Centre Ifremer Bretagne. "On en découvre beaucoup plus que l'on est capable d'en décrire. On touche d'ailleurs un véritable problème : la taxonomie, la science de la description des espèces nouvelles et tombée en désuétude. Il y a de moins en moins de gens capable de mettre un nom sur des espèces. On est capable de définir les grandes familles, mais pas les espèces" nous précise-t-il encore.

"On est d'ailleurs incapable de prédire combien d'espèces existent dans le 'profond'", poursuit-il. "Si on estime qu'ils existent environ 350 000 espèces maritimes, pour le profond, les estimations varient de 500 000 à 10 millions. On sait donc qu'il existe un immense réservoir de biodiversité, mais on ne connait tout simplement pas sa taille".

Les sites de Porto Rico et des Iles Vierges n'ont pas été choisis au hasard. Ces iles sont connues pour la diversité de leurs fonds marins. Monts sous-marins, tranchées, canyons : d'innombrables recoins propice à une foisonnante vie aquatique, pouvant prendre des formes multiples.

"La fosse de Porto Rico est un des endroits les plus mystérieux de la planète, sur lequel on en sait le moins", indique Wilford Schmidt, un professeur de l'université du Porto Rico qui a fait partie du projet.

"Cette zone est intéressante, biologiquement parlant" nous confirme le chercheur de l'Ifremer. "Elle est très mal connue et présente visiblement des écosystèmes très particuliers. Les fosses, ces zones où une plaque océanique plonge sous une plaque continentale, sont en général mal connues. De fait, elles demandent des moyens considérables pour être explorées. Très peu d'engins sont capables d'aller si bas. Elles restent donc des milieux très énigmatiques".

La mission du NOAA a également brillé par son originalité. En effet, les images filmées par le robot ont été diffusées en live sur Internet. Des scientifiques monde entier pouvaient se connecter à un salon de discussion et ainsi débattre sur les espèces découvertes en direct.

"C'est effectivement très intéressant et enrichissant de pouvoir interagir et de commenter ensemble les vidéos", indique Lenaick Menot ajoutant : "on retrouve dans ces salons plusieurs disciplines, géologie, biologie, taxonomie. Et on apprend beaucoup les uns des autres".

"Toutefois, il y  a des limites", tempère-t-il. "La principale est que cela reste de l'observation, et l'image n'est pas suffisante pour décrire une espèce. Il faut un prélèvement. J'ai participé à une campagne de ce genre, où l'on avait observé des coraux apparemment inconnus. Mais il était impossible de prélever quoi que ce soit. Ces organismes sont donc toujours considérés comme inconnus" nous explique-t-il aussi.

Assistera-t-on à plus d'expéditions de ce type, alors que l'océan couvre les deux tiers de la surface de notre planète, et que l'on estime que l'homme n'a exploré environ que 5% de ce dernier. Pas si sûr. "On a coutume de dire que l'on connait plus la face de la lune que le fond des océans", regrette Lenaick Menot. "Les planètes sont observables visuellement, ce qui n'est pas le cas des fonds marins. La profondeur moyenne de l'océan est de 3 500 mètres. Descendre si bas demande donc un équipement particulier. Les pays capables de déployer de tels moyens se comptent sur les doigts des deux mains : France, Allemagne, Angleterre, Etats-Unis, Japon, et Corée du Sud".

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