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Vente d'Alstom Energie à General Electric : à quand enfin une commission d'enquête ?
©Reuters

Tribune

En juin 2014, le géant américain General Electric rachetait la branché énergie du français Alstom pour la coquette somme de 12,3 milliards d'euros. Une vente stratégique pour la France mais dans laquelle subsiste des zones d'ombre que seule une enquête indépendante pourra éclaircir.

Daniel Fasquelle

Daniel Fasquelle

Daniel Fasquelle est Député de la 4ème circonscription du Pas-de-Calais et Maire du Touquet-Paris-Plage. Il est également trésorier du parti Les Républicains. Il est l'auteur de La France juste chez Fayard (septembre 2015).

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Les auditions la semaine dernière du PDG d'Alstom, des représentants de General Electric (Mark Hutchinson et Clara Gaymard), du Ministre de l'Economie et de l'Industrie, et l'audition ce mardi des représentants des salariés d'Alstom ont fait apparaître d'importantes contradictions et imprécisions sur l'ensemble des zones d'ombre entourant ce dossier stratégique pour le pays. Alstom, dont le lien passé et actuel avec la puissance publique n'est plus à démontrer, exerce des activités d'intérêt supérieur pour la nation et pour nos pays partenaires qui seront désormais soumis aux règles de la diplomatie américaine pour les contrats passés et futurs d'Alstom : approvisionnement énergétique (ensemble du parc nucléaire national équipé de turbines Alstom, activités de transition énergétique : hydroélectricité et éolien, transmission d'électricité) et activités sensibles pour la Défense (turbines des sous-marins et du porte-avions, activité de gestion de satellites militaires).

Au cours de leur audition par la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, les représentants des salariés d'Alstom n'ont fait part d'aucun élément positif sur l'opération soulignant que l'ensemble des Comités d'Entreprise des sites français d'Alstom avait émis un avis défavorable. Ils ont rappelé l'impact social majeur de cette vente dans les prochaines années tout d'abord pour les fonctions support (sièges, informatique...) comme pour l'outil industriel et de recherche et développement. Les engagements sur l'emploi de General Electric apparaissent donc insuffisants et imprécis.

"L'Alliance" selon les dirigeants d'Alstom et de General Electric constitue en fait une véritable absorption de l'ensemble des activités d'Alstom Energie, les co-entreprises n'étant pas équilibrées comme annoncé initialement et les participations minoritaires d'Alstom devant être vendues en 2018. Il existe de plus un risque réel pour Alstom Transport désormais fragilisé, son bilan financier résultant de l'opération ne lui permettant pas de faire face aux défis qui l'attendent seul.

Sur les raisons de la vente, à la fois précipitée et secrète, aucune explication valable n’a été apportée si ce n'est le besoin de Bouygues de vendre ses actions Alstom et pour l'entreprise américaine de se renforcer dans les centrales à vapeur (charbon, fuel, nucléaire) et dans la transmission d'électricité où il est moins présent que ses concurrents. Tant les représentants des salariés d'Alstom que le Ministre de l'Economie ont dénoncé avec force une mise devant le fait accompli par les PDG d'Alstom et de Bouygues, actionnaire principal.

Pas de réponse précise non plus sur l'enquête de l'Autorité des Marchés Financiers portant sur le cours de bourse et la bonne information des actionnaires minoritaires, en particulier s'agissant du paiement de l'amende de la justice américaine (630 millions d'euros) qui devait initialement être à la charge de General Electric et non d'Alstom Transport.

Par ailleurs, il conviendrait d'étudier davantage dans le détail la question de l'enquête de la justice américaine pour "système de corruption" et la pression exercée sur les dirigeants d'Alstom, le Ministre de l'Economie ayant révélé lui-même lors de son audition une étude détaillée menée par le pouvoir exécutif.

Quid enfin d’une solution française alternative, toujours demandée par les représentants des salariés d'Alstom ? La situation du Groupe Alstom n'est pas catastrophique et les perspectives des activités Energie sont porteuses tant dans les pays émergents où Alstom est présent que dans les pays développés notamment au travers de la transition énergétique, sans parler du grand projet d'EDF de prolongement de la durée de vie du parc nucléaire national. Cette solution vise à remplacer Bouygues qui n'a pas joué son rôle d'actionnaire de long terme et à apporter la flexibilité nécessaire en matière de trésorerie après une chute importante des avances clients sur les grands contrats, le versement de dividendes conséquents et des acquisitions importantes comme celle d'Areva T&D pour plus de 2 milliards d'euros. Sur ce sujet d'une solution alternative française, il reste à déterminer le rôle précis joué par David Azéma, le Directeur de l'Agence des Participations de l'Etat, et les raisons des refus de partenariat exprimés par Safran, Thalès, DCNS et EDF, entreprises à capitaux publics.

De nouvelles auditions de Patrick Kron et de Clara Gaymard ne suffiront pas car les mêmes réponses évasives ou contradictoires seront apportées à la Commission des Affaires économiques.

Au vu de l'intérêt supérieur que ce dossier représente pour le pays, seule une commission d'enquête non partisane accordée par le Président de l'Assemblée Nationale (et ne venant donc pas d'un groupe parlementaire en particulier) permettrait d'établir pleinement la vérité et de renégocier les termes de la vente à General Electric.

Il s’agit également d'éclairer l'avenir et de prendre les dispositions nécessaires pour protéger davantage les intérêts stratégiques et industriels de la France.

Tribune signée : Daniel Fasquelle et Alain Chrétien, Dino Cinieri, Marc-Philippe Daubresse, Jean-Pierre Decool, Nicolas Dhuicq, Nicolas Dupont-Aignan, Marie-Louise Fort, Annie Genevard, Bernard Gérard, Pierre Lellouche, Pierre Morange, Yannick Moreau, Alain Moyne-Bressand, Jacques Myard, Fernand Siré, Guy Teissier, Michel Terrot, Jean-Marie Tétart, Philippe Vitel

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