Ce que les cancers des chats et des chiens ont à nous apprendre sur ceux qui touchent les humains<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour guérir le cancer, les oncologues et les vétérinaires ont tout intérêt à coopérer.
Pour guérir le cancer, les oncologues et les vétérinaires ont tout intérêt à coopérer.
©Reuters

Pas si différents

Selon les spécialistes en oncologie, les chats et les chiens sont les animaux qui ont les cancers plus proches des pathologies humaines.

Et si les cancers des animaux permettaient de mieux guérir les cancers des hommes ? Aux Etats-Unis, une vingtaine de centres académiques conduisent actuellement des essais cliniques sur des animaux domestiques cancéreux et étudient dans quelles mesures leurs trouvailles pourraient s'appliquer aux humains. Et au mois de juin, vétérinaires et oncologues se réuniront à Washington afin de réfléchir à plus de coopération entre leurs recherches sur le cancer.

En France, il y a également un "un gros effort de l’Institut National du Cancer (INCa) depuis deux ans pour rapprocher les vétérinaires des oncologues", explique à AtlanticoPatrick Mehlen, directeur de recherche au CNRS, co-directeur du Pôle des Sciences Cliniques au Centre Léon Bérard et directeur adjoint du Centre de recherche en cancérologie de Lyon. Mettant en avant les similitudes entre les cancers des animaux domestiques et ceux des humains, il déclare : "on a toujours utilisé des petits animaux comme les souris pour tester des drogues mais il faudrait utiliser des modèles plus proches de l’homme. La souris ne représente pas le moyen le plus pertinent pour traiter les cancers humains. Les chats et les chiens ont des cancers plus proches des pathologies humaines. Ils ont des lymphomes par exemple".

Disposant de huit glandes mammaires, quatre de chaque côté de leur ventre, les chats peuvent par exemple souffrir de tumeurs mammaires, eux aussi. D'ailleurs, même s’ils ne détectent qu’un léger problème lors d’une biopsie, les vétérinaires recommandent pour plus de sécurité de retirer toutes les glandes mammaires se trouvant du côté atteint. Car ces dernières sont connectées aux vaisseaux lymphatiques par lesquels les cellules cancéreuses peuvent se répandre dans le reste corps. Pour éviter de prendre le moindre risque, certains vétérinaires vont même jusqu'à pratiquer une mastectomie sur l’ensemble des glandes mammaires.

Photo Maxime Spony

"Le cancer du sein est plus courant chez les femelles fertiles", explique la vétérinaire spécialisée en cancérologie Karin Sorenmo de l'Université de Pennsylvanie au Smithonian. En effet, "le risque de développer des cancers du sein est dépendant de l'exposition aux hormones", détaille-t-elle, ajoutant : "Il y a sept fois plus de risques chez les chats qui n'ont pas été stérilisés et il est préférable de castrer son chat très jeune". Si le risque est plus rare pour les mâles, ces derniers peuvent également être atteints de tumeurs mammaires, auquel cas elles sont malignes dans 86% des cas. "Quand les chats développent des cancers du sein, c'est beaucoup plus malin, similaire à des double ou triple cancers négatifs chez les femmes" explique Rodney Page du Flint Animal Cancer Center de l’Université du Colorado au Smithonian. Aussi, il reste encore beaucoup à faire pour guérir les tumeurs mammaires chez les chats... 

Chez les humains, en revanche, cette pathologie est de mieux en mieux traitée. Aux Etats-Unis, entre 2002 et 2011, le nombre de morts de cette maladie a diminué en moyenne de 1,9% par an, selon l'Institut national du cancer. Les médecins arrivent à repérer les tumeurs plus tôt , alors qu’elles sont encore localisées, et les opérations chirurgicales et les médicaments sont de plus en plus performants. Ainsi, à l'heure actuelle 98,5% des gens qui sont diagnostiqués avec un cancer du sein localisé sont encore vivants au moins cinq ans plus tard. Toutefois, la situation est plus compliquée chez les malades souffrant d'un cancer du sein à un stade plus avancé ou plus grave (double négatif ou triple négatif).

En général, pour soigner les cancers humains, les chercheurs introduisent des tumeurs sur des petits animaux pour développer de nouveaux médicaments. "Jusque-là on testait de la souris directement à l’homme, il faudrait passer par des animaux domestiques entre les deux", explique Patrick Mehlen. "Les souris son trop petites et elles vieillissent trop vite, le développement du cancer est trop rapide, cela prend 15 jours seulement chez elles quand chez l'homme cela prend des années. Les fonctionnements des chats et chiens sont plus similaires". Par ailleurs, "les animaux domestiques vivent dans les mêmes demeures que leurs propriétaires et sont exposés aux mêmes composants volatiles organiques et autres", fait valoir Rodney Page.

Photo Lali Masriera

Mais passer par les animaux domestiques pour soigner les humains seraient également bénéfiques aux bêtes. "A l'heure actuelle, pour traiter les pathologies cancéreuses chez les animaux, on se contente de prendre ce qui marche chez l'homme. Sur les chiens, par exemple, on utilise beaucoup de chimiothérapies dérivés de chimios humaines. De façon pragmatique on donne aux chiens ce qu’on donne aux hommes en changeant les doses en fonction de leur taille... Mais cela n'est pas très efficace et les animaux ne bénéficient pas ou peu des nouvelles thérapies testées par les laboratoires", déclare Patrick Mehlen.

Mais pour pouvoir tester les traitements pour humains sur les chats ou les chiens il faudrait faire communiquer les vétérinaires et les oncologues plus entre eux. "Jusqu’à présent ils avaient trop peu de contacts, les premiers faisant partie du ministère de l’Agriculture et les seconds de la Santé", déplore Mehlen. Aussi, "Afin de créer des liens entre eux, nous avons mis en place à Lyon un master d’oncologie dans lequel on inclut des désormais des chercheurs de l’école vétérinaires qui ont tendance à être très isolés des recherches menées dans les services d’oncologies proches des hôpitaux".

Reste également à convaincre les sociétés pharmaceutiques de tester des nouveaux traitements sur les chats et les chiens. "Pour l’instant, elles ont peu inclu dans leur voie de développement des animaux comme les chats et les chiens. Mais cela va changer car cette technique pourrait permettre de développer la recherche qui pourrait en partie être développée par les maîtres des animaux, prêts à payer pour qu’ils guérissent. Aussi, les sociétés commencent à y penser", conclut Patrick Mehlen.  

                                                                                                                                                                                              Raphaëlle de Tappie

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