Comment repérer les arnaques aux permis de conduire - non, ce n’est pas normal de faire 180 heures de conduite avant de le passer...

Atlantico : Des heures de conduite qui s'allongent et le permis qui s'éloigne. Les candidats ont toujours autant de peine à décrocher le fameux sésame face à des moniteurs parfois peu scrupuleux. A partir de combien d'heures de conduite peut-on se poser des questions?

Pierre Chasseray : Il est très difficile d'évaluer un nombre d'heures "plancher". Tous les élèves ne se valent pas dans leur capacité d'apprentissage à la conduite. Cependant, il existe des études qui donnent des tendances. Selon l'une d'entre elles conduite en France par l'association "Prévention routière", les élèves obtiendraient leur permis après 31 heures de leçons en moyenne. 26 heures seraient nécessaires pour des élèves ayant eu une formation de conduite accompagnée au préalable. Quant aux novices, la moyenne se situerait davantage autour des 35 heures.

A partir de cette donnée, chacun pourra aisément identifier, selon son âge et sa capacité d'apprentissage, si une auto-école "piétine" dans sa formation. Mais une nouvelle fois, nous ne sommes pas tous égaux dans notre apprentissage et obtenir son permis avec 40 heures de formation n'est pas forcément le signe d'une auto-école volontairement lente dans sa formation. 

Quels arguments doivent nous mettre la puce à l'oreille?

S'il est un signe qui doit nous alerter, c'est bien la gestion de notre formation par l'auto-école. Pour être bonne, elle doit être régulière et ne peut souffrir de trop grands écarts de calendrier entre chaque leçon. Certes, il est parfois difficile pour une auto-école de gérer les périodes de flux d'élèves importants, mais ce ne doit pas être au détriment de la formation de l'élève. Des délais d'attente trop longs entre chaque heure aux côtés d'un formateur ne feront que ralentir la progression, et donc repousser d'autant la date de présentation potentielle de l'élève à l'examen du permis de conduire.

Attention tout de même à ne pas interpréter trop hativement le fait qu'une auto école refuse de présenter un élève à l'examen. Dans la plupart des cas, il n'y a pas l'ombre d'une arnaque. Il faut savoir que les auto-écoles obtiennent leurs places de présentation au permis de conduire selon une méthode de calcul basée sur le taux de réussite de l'auto-école lors des premiers examens de passage. Elle n'a donc aucun intérêt à inscrire un élève à l'examen s'il est voué à l'échec.  Il est par ailleurs possible pour chacun d'entre nous d'avoir accès aux données de pourcentage de réussite des auto-écoles en s'adressant tout simplement en préfecture.

Attention cependant à ne pas trop déduire d'enseignements de cette donnée. Certaines auto-écoles, afin d'obtenir le meilleur taux de réussite possible, n'hésitent pas à gonfler le nombre d'heures nécessaires de leçons pour optimiser les chances de réussite des élèves au premier passage de l'examen.

Comment savoir si l'auto-école manque réellement de place ou si elle repousse votre présentation?

N'ayant aucun contact avec la préfecture et les inspecteurs du permis de conduire, c'est souvent sur l'auto-école que se reportent l'intégralité de nos suspicions. La réalité, c'est malheureusement le manque cruel de places d'examens. Le gouvernement en a d'ailleurs parfaitement conscience puisque le ministère de l'Intérieur essaie d'imaginer une réforme qui permettrait de raccourcir les délais de présentation. Cependant, cette question soulève un point fondamental. C'est le manque de transparence total d'un système dans lequel l'automobiliste ne peut trouver que des réponses partielles à ses interrogations , r hormis le taux de réussite obtenu par les auto-écoles, l'élève n'aura pas accès à toutes les informations sur la disponibilité de places à l'examen.

Entre angoisse et inaptitude réelle, comment faire la part des choses? Le système d'évaluation du permis ne met-il pas en échec nombre de candidats à cause du stress qu'il engendre? 

C'est une question intéressante mais qui ne s'applique pas qu'à l'examen du permis de conduire. Il en est de même pour les concours scolaires. La gestion du stress des élèves a une incidence directe sur ses capacités de conduite le jour de l'examen. Bien évidemment, si l'on observe uniquement ce point, nous pourrions être tentés de promouvoir une réforme portant sur une évaluation continue en complément de l'examen.

Cependant il ne faut pas occulter non plus que la conduite implique aussi parfois du stress auquel nous devons être préparés. Une évaluation continue impliquerait aussi de renforcer le pouvoir des auto-écoles, et donc d'augmenter le nombre de litiges suite à des mésententes ou une évaluation jugée injuste par l'élève. Attention donc à ne pas résoudre un problème en en créant un nouveau.