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Trump et les marchés : anticipation, surprise et principe de réalité
©EMMANUEL DUNAND / AFP

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Dans son premier discours Trump ne mentionne pas directement la FED. Il est donc probable, qu’à court terme au moins, l’indépendance de la FED va être maintenue. Ceci couplé à plus long terme avec une croissance de la dette liée aux dépenses fédérale en hausse va peser sur les taux et faire monter le dollar : réaction du marché = hausse des taux long et baisse du dollar. Conséquence indirecte = forte baisse des marchés émergents doublement pénalisés par la hausse du dollar et les mesures protectionnistes annoncées.

Alain Pitous

Alain Pitous

Alain Pitous, Directeur Général Adjoint Associé de Talence Gestion (@alainpitous).

Talence Gestion est une société de gestion de portefeuille indépendante spécialisée dans la gestion sous mandat pour les particuliers et la gestion de fonds commun de placement en actions.

Précédemment, il a été pendant 5 ans (2009-2014) Deputy CIO d’Amundi (850 Milliards d’Euro sous gestion) et gérant du fonds Amundi Patrimoine de 2012 à juillet 2014.

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Une nouvelle fois il ne fallait pas écouter les apôtres de l’apocalypse qui prévoyaient un cataclysme dès l’élection de Trump.  Le raisonnement était simple : l’élection de Trump devait se traduire par une baisse indifférenciée des actifs « risquée ». A l’inverse une élection d’H. Clinton devait être favorable aux actions.

Dans la matinée du 9 Novembre la surprise a été totale. Les marchés asiatiques étant ouverts, les commentateurs ont vu dans les premières et fortes baisses de marché, les prémices d’une correction massive sur les marchés risqués : les observateurs en mal de sensation ont parlé de panique…. Cela nous paraissait totalement exagéré et ce pour plusieurs raisons :

1/ Beaucoup d’investisseurs sont à l’écart des marchés les veilles et les lendemains d’événements politiques de ce type. Les positions stratégiques sont prises en amont et les protections éventuelles sont également mises en œuvre avant l’événement

2/ Les grands investisseurs et la majorité des clients privés ne réagissent pas à chaud.

3/ Quand des sondages, seules infos disponibles, sont favorables à un candidat, il est de fait impossible rationnellement de prendre une position extrême inverse pour se couvrir la veille de l’événement…

4/ Quand la surprise se produit la première réaction est, pour un investisseur long-terme, de patienter pour analyser les choses par rapport à ses positions, et se contenter éventuellement d’ajustement tactique.

Bien sûr, les traders ont une action différente sur les marchés mais la logique de ces intervenant est à un horizon de l’ordre de quelques heures maximum et n’a généralement peu ou aucun lien avec la gestion d’un portefeuille ou d’un fonds comme nous le concevons.

L’élection de Trump a été un condensé de ce processus : Les marchés avaient plutôt bien progressé depuis quelques jours dans une ambiance assez positive dans le sillage de résultats d’entreprises corrects dans certains secteurs. Pas d’euphorie non plus.

Les résultats en faveur de M.Trump tombent dans la nuit…plus d’acheteur fondamental…. La spéculation pousse certains actifs à la baisse : Actions, $... et d’autres à la hausse : or, obligations américaines… La matinée passe … et on constate  que si certains actifs sont « attaqués » aucun dégagement massif n’a lieu. Le premier discours du nouveau président a plutôt un ton apaisant. Le dollar arrête sa baisse, certains opérateurs profitent des «  braderies » sur quelques titres et corrigent des excès sur d’autres qui avaient baissé depuis plusieurs semaines comme les titres dans le secteur de la santé. Tout ceci fait que dans la journée les marchés repartent de l’avant. L’accélération qui a suivi a aussi surpris les journalistes et les observateurs non spécialistes : le premier effet de surprise passé les opérateurs ont commencé à faire leur travail et ont anticipé ce qui pourrait se passer, non plus en analysant les discours et promesses de campagne mais en écoutant le premier discours :

Trump annonce vouloir procéder à une relance massive des dépenses publiques pour créer des emplois et accélérer la croissance. Conséquence directe : hausse des secteurs liés à la dépense fédérale, construction, immobilier, équipement et défense. Conséquence indirecte : hausse des secteurs liés à la consommation…

Dans son premier discours Trump ne mentionne pas directement la FED. Il est donc probable, qu’à court-terme au moins, l’indépendance de la FED va être maintenue. Ceci couplé à plus long-terme avec une croissance de la dette liée aux dépenses fédérale en hausse va peser sur les taux et faire monter le dollar : réaction du marché= hausse des taux long et baisse du dollar. Conséquence indirecte = forte baisse des marchés émergents doublement pénalisés par la hausse du Dollar et les mesures protectionnistes annoncées.

Tout ceci n’est qu’anticipation et calcul sur ce qui semble, à ce stade, le plus probable. Un gérant de portefeuille, comme nous, sait pertinemment qu’il ne peut pas avoir raison à 100% sur tous ces investissements… C’est bien la raison qui fait que nous diversifions les portefeuilles et que nous évitons comme la peste les positions excessives. De plus nous appliquons un «  principe de réalité » pour évaluer nos positions dans une optique plus long terme.

Dans le cas Trump plusieurs exemples illustrent notre propos.

Trump envisage  500 Mads de $ de dépenses fédérales (au minimum)  pour rénover et construire des infrastructures. Très bien pour certaines valeurs, MAIS , du fait d’une recours important à la dette, à un moment ou à un autre cela pèsera sur les taux. Si les taux montent trop cela sera néfaste à l’économie dans son ensemble. Cela sera aussi «   favorable » au dollar… et pèsera sur les valeurs américaines exportatrices.

Des mesures protectionnistes sont envisagées par le nouveau président :  cela peut déclencher une forte réaction des chinois en particulier qui pourrait pousser leur devise à la baisse pour compenser par une baisse des prix de leur produit ce qu’ils subissent en terme de hausse des barrières douanières… ce qui pénaliserait in fine tous les secteurs de l’économie américaine.

Autre exemple ; inciter Apple à produire aux Etats-Unis… cela va effectivement créer des emplois (bons pour l’économie US) mais cela va augmenter massivement le prix des iPhone et autres…. Ou faire baisser les profits de l’entreprise…. Et/ ou son cours de bourse…ce qui n’est pas bon pour l’épargne en effet Apple est très présent dans les portefeuilles américains….

Pour conclure, nous pensons toujours qu’il faut éviter pour la gestion de portefeuille sur long terme, d’écouter les intervenants ou commentateurs qui incitent à prendre des positions excessives... Dans un sens ou dans l’autre.

C’est parfois frustrant mais plus rémunérateur sur le long-terme !

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