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Le modèle démocratique français : violence partout, neurones nulle part
©François NASCIMBENI / AFP

Je casse donc je suis

Gilets jaunes, bonnet rouges, capuches grises, foulards verts, chemises brunes, slips à carreaux… Il y a toujours une bonne raison et un vêtement adapté pour mettre le pays à feu et à sang au nom de sa souffrance spécifique.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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C’est peut-être un effet de l’âge, l’annonce de la baisse prochaine de mon taux de testostérone, où tout simplement la conscience jalouse qu’il existe des démocraties apaisées où l’on débat posément de la meilleure façon de faire avancer les choses, mais ce goût français pour la violence finit vraiment par me briser les gonades (ce qui risque d’ailleurs de ne pas améliorer mon potentiel hormonal).

A intervalles de plus en plus rapprochés désormais, une catégorie ou une autre —routiers, lycéens, agriculteurs, cailleras, cheminots, zadistes, tout ce qu’on voudra— décide d’aller tout démolir pour faire valoir son point de vue pendant que des experts dissertent des ressorts du « mouvement » sur BFM-TV et que le gouvernement élabore à grand frais une usine à gaz technocratique censée ramener temporairement le calme.

Là tout de suite, et au cas où vous reviendriez à peine d’un séjour sur la planète Mars et vous demanderiez pourquoi les Champs-Élysées sont de nouveau à feu et à sang, les porteurs de battes de baseball seraient des damnés de la terre passés de la contestation banale d’une taxe sur le diesel à la remise en cause de l’ensemble des institutions républicaines. Enfin, du moins selon certains analystes. Ça pourrait aussi être autre chose. The jury is still out.

Juste avant, c’était au tour des étudiants de jouer à Mai-68 en hurlant CRS-SS et en mettant le feu à leurs amphis pour réclamer plus de moyens pour l’université. Et juste après ? On ne sait pas encore. Peut-être la Fédération française des joueurs de badminton en colère ou les partisans d’une extension des dates de la chasse au sanglier... On verra bien. Laissons-nous surprendre. Gilets jaunes, bonnet rouges, capuches grises, foulards verts, chemises brunes, slips à carreaux : il y a toujours une bonne raison et un vêtement adapté pour en découdre avec les flics au nom de sa souffrance spécifique.

Bon, c’est certain, dans ces fameux pays civilisés où l’on préfère débattre posément, des éruptions du même genre se produisent à l’occasion. Mais c’est alors leur caractère exceptionnel qui leur donne du sens et les leaders d’opposition ne se bousculent pas devant les micros pour souffler sur les braises dans l’espoir d'arriver aux affaires et d’être, eux aussi, confrontés à la contestation au cocktail molotov de leurs propres réformes.

Est-ce que ça peut changer ? Est-ce que la France est susceptible d’intégrer un jour le club des démocraties stables où l’on discute avant de sortir sa barre à mine ? Mon expérience d’observateur vieillissant me dit plutôt que non. Comme la gastronomie ou le pinard, notre sauvagerie est un art de vivre, une philosophie, un trait culturel romanticisé qui fait que l’on proclame que « ça va péter » avec gourmandise et délectation et que l’on envisage une guerre civile —oui, une guerre civile ! Ce truc avec plein de morts et de réfugiés jetés sur les routes— comme on planifie ses vacances au VVF. Enfin, c’est juste mon avis. Et si vous n’êtes pas d’accord, que ça vous fiche en rogne, vous pouvez toujours aller cramer un monument historique ou couper la tête d'un président.

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