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Et crotte ! Le dérèglement climatique aggravé par le manque d’excrément d’animaux dans les forêts tropicales
©Reuters

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Les forêts tropicales sont aussi essentielles que fragiles tant sur le plan du réchauffement climatique que de la préservation de la biodiversité. Les animaux frugivores qui peuplent ces forêts sont indispensables à leur préservation puisqu'ils disséminent leurs excréments, qui constituent une semence. Ces animaux étant menacés, ce sont les forêts tropicales elles-mêmes qui en pâtissent.

Mauro Galetti

Mauro Galetti

Mauro Galetti est l'un des membres de l'étude sur l'influence des animaux frugivores sur le stockage en carbone des forêts tropicales.

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Jérôme Chave

Jérôme Chave

Jérôme Chave est Directeur chercheur CNRS au Laboratoire Évolution et Diversité Biologique (EDB) de l’Université Toulouse III.

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Atlantico : Selon une étude (voir ici) les animaux frugivores ou mangeurs de fruits sont essentiels à la préservation des forêts tropicales alors qu'ils sont de plus en plus menacés par l'activité de l'homme et le braconnage. En quoi ces animaux sont ils indispensables dans la lutte contre le réchauffement climatique ?

Mauro Galetti : Notre étude a été la première qui a révélé le lien entre la dispersion des graines indispensables aux forêts tropicales et le stockage de carbone. Nous avons démontré qu'il y avait un lien très fort entre la taille des graines issues des excréments d'animaux frugivores, la densité de la forêt et le stockage du carbone. Les animaux qui mangent des fruits de grande taille sont indispensables pour maintenir une forêt dense capable d'absorber une grande quantité de carbone. Or ces animaux, les éléphants et les gorilles en font parti par exemple, sont souvent en voie d'extinction ce qui peut avoir une conséquence sur la composition des arbres des forêts tropicales.

Jérôme Chave : Afin de répondre à cette question, quelques éléments de contexte sont nécessaires. En Amérique du Sud, où cette étude a été menée, les animaux frugivores sont généralement menacés par la chasse depuis plus de 50 ans (pécaris, tapirs, toucans, agoutis). Certaines espèces ont localement disparu, d'autres sont beaucoup plus rares aujourd'hui qu'elles ne l'étaient par le passé. L'étude en question concerne l'une des forêts tropicales les plus déforestées qui soit, la forêt Atlantique du Brésil, dont il ne reste plus que 5-10% de l'étendue originelle.

Il est exagéré de dire que les animaux sont indispensables dans la lutte contre le réchauffement climatique. Si la lutte contre le réchauffement climatique est une priorité essentielle pour nos sociétés (comme l'a confirmé la COP21), d'autres enjeux environnementaux ne doivent pas être ignorés non plus, au premier rang desquels la protection de la biodiversité. L'article dont nous discutons démontre que ces questions sont reliées, mais il me semble important de reconnaitre que protéger la faune sauvage doit être un objectif en soi.

Comment pouvons-nous protéger ces animaux et anticiper les conséquences dévastatrices que peut provoquer leur disparition des forêts ?

Jérôme Chave : Il faut chercher à gérer au mieux la faune sauvage en protégeant ses habitats, facilitant ses déplacements, et limitant l'impact de la chasse. Ce sont des enjeux qui ne sont pas seulement important sous les tropiques, mais aussi en France métropolitaine. La France a mise en œuvre certaines de ces actions avec la Trame Verte et Bleue afin d'aménager le territoire en harmonie avec les environnements naturels. Au Brésil, la vision est la même mais la mise en œuvre est bien plus délicate en raison de la superficie du territoire et de la structure fédérale.

Quelles sont les principales menaces qui pèsent sur les forêts tropicales à l'heure actuelle ?

Jérôme Chave : Les principales menaces qui pèsent sur les forêts d'une part la conversion des forêts pour l'agriculture intensive (soja, palmier à huile, exploitation du bois) et d'autre part les conséquences des changements climatiques (sécheresses plus intenses et plus fréquentes). Les effets comme ceux mentionnés dans l'article peuvent aussi être cités, mais ne sont pas aussi clairs ou directs. Tant dans le cas de l'agriculture que du climat, tous les humains sont directement responsables : chacun contribue au réchauffement de la planète par sa consommation d'énergies fossiles et chacun achète des produits issus de l'agriculture tropicale (que ce soit du bois pour les meubles, des biscuits à base d'huile végétale, du chocolat ou du café). Il ne s'agit pas de ne plus rien acheter, mais d'exiger des certifications du respect de l'environnement de la part de ces filières. Le consommateur est l'un des acteurs les plus importants de la protection des forêts tropicales.

En quoi sont-elles particulièrement indispensables dans la lutte contre le réchauffement climatique ?

Jérôme Chave : Les forêts réabsorbent plus de 25% des émissions de CO2 dues aux énergies fossiles, et jouent ainsi un rôle "tampon" sur les changements climatiques. La disparition des forêts contribuerait à un "relarguage" considérable de carbone dans l'atmosphère avec des conséquences catastrophique sur le climat. Le cycle de l'eau serait lui aussi profondément modifié.

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