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Dérèglement climatique : ce que les modifications de nos régimes et de nos modes de production alimentaires peuvent changer pour la planète. Ou pas
©Jean-Pierre MULLER / AFP

Atlantico Green

Selon certains analystes, consommer bio ralentirait les effets néfastes du réchauffement climatique et le rejet de gaz à effet de serre. Une taxe sur la viande est également évoquée. Pourtant, de moins en moins de personnes en consomment.

Gil Rivière-Wekstein

Gil Rivière-Wekstein est rédacteur pour la revue Agriculture et Environnement. Il est l'auteur du livre "Panique dans l’assiette, ils se nourrissent de nos peurs". 

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Atlantico.fr : De nombreux analystes expliquent que consommer bio ralentirait les effets néfastes du réchauffement climatique et le rejet de gaz à effet de serre.. Certains veulent par exemple taxer la viande, or de moins en moins de personnes en consomment à l'heure actuelle. D'autres veulent privilégier l'agriculture biologique.  

Que pensez-vous de ces mesures ? Sont-elles viables ?

Gil Rivière-Wekstein : C’est tout le contraire ! Les études sérieuses montrent que l’intensification des méthodes agricoles a un impact bien meilleur sur le climat qu’une agriculture à faible rendement et extensive. Ce sont notamment les conclusions de l’étude « The Environmental costs and benefits of fhight-yiel farming  », publiée en septembre 2018 dans la revue Nature Sustainability par Rowan Eisner. Ce qui est parfaitement logique. 

C’est exactement le même phénomène qui est observé dans la production de l’énergie, contrairement à ce qu’affirment certaines ONG. Ainsi, la production électrique fournie par les centrales nucléaires a un bilan carbone bien meilleur que tous les autres modes de production, y compris les éoliennes ou les panneaux solaires, précisément en raison de la forte densité d’énergie produite par les centrales nucléaires. 

En agriculture, c’est la même chose : vous pensez bien qu’occuper deux fois plus d’espace pour produire la même quantité de céréales, avec de surcroît des passages de tracteur bien plus nombreux afin de procéder aux désherbages,a un impact bien plus fort sur les émissions de carbone que lorsqu’on adopte par exemple les techniques de sans labour. Et si on utilise des semences résistantes à un herbicide, c’est encore plus efficace contre les émissions de carbone, puisqu’on peut encore réduire le nombre de passages.

Dans l’élevage, c’est pareil : les grandes exploitations intensives ont un bien meilleur bilan carbone que les élevage extensifs. C’est tellement vrai que le député LRM Jean-Baptiste Moreau a défendu un amendement pour supprimer la référence à l’analyse du cycle de vie (AVC) dans l’élaboration de l’affichage environnemental des produits car, appliquée aux produits de l’élevage, « elle favorise les viandes issues d’élevages intensifs ». 

Certains veulent par exemple taxer la viande. Taper dans le portefeuille des consommateurs, est-ce une bonne idée ?

Dois-je vous rappeler que, selon l’observatoire des inégalités, « 800 millions de personnes sont sous-alimentées dans le monde, soit une personne sur dix ». Certes, c’est 200 millions de moins qu’il y a dix ans, mais cela reste considérable. Et la question de la malnutrition touche également la France, puisque, d‘après le baromètre 2018 du Secours populaire, « 21 % des Français ont du mal à se procurer une alimentation saine pour assurer trois repas par jour ». Ce baromètre indique aussi que « 48 % de personnes, dont le revenu mensuel net du foyer est inférieur à 1 200 euros, éprouvent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine pour faire trois repas par jour ». Alors, soyons sérieux ! Notre défi, c’est de nourrir l’ensemble de l’humanité, qui continuera sa croissance encore au moins pendant les cinq prochaines décennies, avec des produits de qualité et pour un prix abordable. Et la viande reste un aliment essentiel. Ainsi, 2 milliards de personnes – soit plus de 30% de la population mondiale – souffrent d'anémie, principalement en raison d'une carence en fer. En France, 25 % des femmes non ménopausées présentent un déficit en fer et 5 %, une anémie. Diminuer la consommation de viande n’est pas toujours un bon plan…

Enfin, il est utile de préciser qu’aujourd’hui, les bons morceaux de viande, les morceaux nobles, ou encore les bons poissons sont devenus trop cher pour de nombreux citoyens qui sont déjà en train de diminuer leur consommation.

Au vu de l'augmentation de la population dans des zones comme l'Afrique, que pouvons-nous faire, face aux défis climatiques à venir en termes d'agriculture et de consommation ?

Nous devons procéder à une nouvelle révolution dans l’agriculture en privilégiant tout ce qui va permettre d’optimiser la production agricole, tout en préservant l’environnement et en réduisant les diverses formes de gaspillage (à la production comme à la consommation). C’est-à-dire, notamment, poursuivre le développement de nouvelles variétés plus résistantes à divers stress, des variétés plus productives ou des variétés dont les valeurs nutritionnelles auront été améliorées. Ainsi, les carences en vitamine A représentent selon l’OMS «  un grave problème de santé publique dans le monde entier, affectant plus de 100 pays ».

Ensuite, il est indispensable d’appliquer partout dans le monde les méthodes de l’agriculture de précision, ce que va nous faciliter la double révolution qui a lieu actuellement dans la robotique et le big data. 

Enfin, grâce à une meilleure connaissance des besoins alimentaires, nous allons pouvoir proposer aux consommateurs des produits alimentaires plus adaptés à nos besoins réels. Cette évolution est d’ailleurs déjà en cours depuis de nombreuses années partout dans le monde, d’où l’augmentation de l’espérance de vie en bonne santé, qui continue à s’accroître (avec le problème que cela entraîne pour, par exemple, le financement des retraites, comme en témoigne l’actualité).

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