Voilà comment la Russie parvient à contourner massivement les sanctions sur le pétrole <!-- --> | Atlantico.fr
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Un marché gris est apparu autour du pétrole russe.
Un marché gris est apparu autour du pétrole russe.
©NATALIA KOLESNIKOVA / AFP

Pétrole russe

Depuis le début de la guerre en Ukraine, des entreprises occidentales se sont retirées du commerce, du transport et de l'assurance du pétrole russe. Ce qui a laissé apparaître un marché noir.

Damien Ernst

Damien Ernst

Damien Ernst est professeur titulaire à l'Université de Liège et à Télécom Paris. Il dirige des recherches dédiées aux réseaux électriques intelligents. Il intervient régulièrement dans les médias sur les sujets liés à l'énergie.

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Atlantico : Au cours de l'année qui a suivi le début de la guerre en Ukraine, des entreprises occidentales autrefois dominantes se sont retirées du commerce, du transport et de l'assurance du pétrole russe. À leur place, de mystérieux nouveaux venus ont commencé à aider à vendre le brut du pays. Comment a pu apparaître ce marché noir (ou commerce gris) autour du pétrole russe ?

Damien Ernst : On a eu un embargo sur le pétrole russe à partir du 5 février 2022. Il y a eu  deux grandes mesures associées à cet embargo. Premièrement, l’Europe ne peut plus importer du pétrole russe. Deuxièmement, toutes les sociétés qui sont impliquées dans le transport de pétrole russe doivent s’assurer que le pétrole transporté est en-dessous du prix de marché, autour de 60 dollars.  Beaucoup de ces compagnies étaient grecques pour le transport physique de pétrole ou  anglaises pour les services d'assurrance. Elle n’avaient pas envie de perdre ce marché-là.

A côté de ça, on a maintenant un commerce gris dans le transport de pétrole et le secteur d’assurance. Des compagnies chinoises et russes basées au Moyen-Orient se sont spécialisées dans le transport du pétrole russe. Il y a aussi  des sociétés créées dans des endroits plus exotiques qui transportent le pétrole russe avec des bateaux qui sont loués et souvent vétustes.

Quels sont les autres acteurs du commerce gris ?

Nous avons des pays spécialisés là-dedans comme la Malaisie, qui exporte beaucoup plus de pétrole qu’elle n’en produit. La Malaisie s’est spécialisée dans le blanchiment du pétrole. Elle achète du pétrole au Venezuela et en Iran et elle l’exporte sous la bannière d’un produit extrait en Malaisie. Un vrai trafic de pétrole se crée.

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La Russie profite-t-elle de ce marché ?

Sur le marché, les Russes mettent un volume similaire qui existait avant l’embargo. Même si les Russes ont du mal à vendre le pétrole, qui vient surtout de l’Oural, au prix du marché (ils le vendent entre 40 et 60 euros). La Russie a quand même réussi à trouver des marchés pour exporter son pétrole.

Dans quelle mesure ce commerce gris impacte les Occidentaux ?

S’il n’y avait pas ce marché noir, le marché du pétrole serait mis sous pression. Donc ce marché noir permet d’avoir un pétrole bon marché pour l’Europe.

Tous les acteurs traditionnels du pétrole ne savent pas très bien se positionner sur le pétrole russe à cause des sanctions occidentales sur le pétrole russe. Avec ces sanctions, on a donc vu une nouvelle industrie de transport et d’assurance. Mais les bateaux sur lesquels elle transporte le pétrole sont anciens, et les compagnies qui opèrent sont nouvelles, et on ne sait pas vraiment quels produits d’assurance elles ont. Cela pourrait avoir des conséquences graves sur l’environnement, avec de possibles marées noires pour lesquelles aucune assurance ne couvrira les dégâts.

Si nous avons pu constater une diminution des marées noires ces dernières années, c’est en raison de l’apparition des doubles coques sur les navires. Avec ces  vieux bateaux qui sont de sortie, le risque est là.

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