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Vers une 9e vague Covid : à quoi s’attendre si nous sommes tous omicronés à nouveau cet hiver ?
©AFP / Loic VENANCE

Elle approche

Alors que nous semblons être à l'aube d'une 9ème vague de Covid-19, à quoi faut-il vraiment s'attendre si nous sommes tous omicronés cet hiver ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : L’année dernière l’arrivée du variant Omicron a changé le cours de la pandémie. Alors nous nous approchons d’une période favorable au Covid, faut-il craindre une neuvième vague ?

Antoine Flahault : Depuis presqu’un an qu’Omicron a émergé et s’est imposé dans le monde entier, je ne crois pas que l’on puisse réellement parler d’une période plus “favorable” qu’une autre dans l’année. Les sous-variants d’Omicron ont déjà provoqué quatre vagues en Europe et en effet une cinquième est en train de démarrer à nouveau en cette fin d’automne. Il y a deux éléments qui ont changé profondément le cours de cette pandémie, le vaccin et l’émergence d’Omicron. La forte couverture vaccinale en Europe a permis de contrôler l’engorgement des hôpitaux et celui notamment des réanimations. Cet engorgement avait caractérisé les premières vagues pandémiques, et conduit à la mise en œuvre de mesures fortes, inédites, qui combinaient alors un contrôle des frontières, à des quarantaines, des couvre-feux, des mesures de confinement, et le port obligatoire du masque. Lorsqu’Omicron est arrivé dans un contexte de couverture vaccinale élevée, les fortes vagues de contaminations - que le vaccin ne savait pas empêcher - n’ont plus été associées à des tensions hospitalières majeures. Le vaccin a alors permis la levée rapide de toutes les mesures sanitaires. Le taux de mortalité s’est certes effondré, mais la transmissibilité d’Omicron ayant explosé parallèlement, le nombre absolu de décès est resté très élevé, de 65’000 morts du Covid-19 en 2020, 60’000 en 2021, la France en rapportait encore 33’000 à la mi-novembre 2022. Une pandémie dans la pandémie est par ailleurs en train d’émerger. Elle concerne les Covid longs et toutes les manifestations post-infectieuses du Covid, comme le diabète, les maladies cardiovasculaires ou neurologiques qui risquent de peser très lourd sur l’état de santé de la population, longtemps après la pandémie. La pandémie reste donc mal contrôlée même si la vaccination a permis, comme nous l’avons vu, d’éviter de saturer le système de santé. Nous nous dirigeons aujourd’hui vers une nouvelle vague, la neuvième de cette pandémie de Covid-19, mue par un nouveau sous-variant d’Omicron, appelé BQ.1.1, très transmissible et qui semble se comporter un peu comme BA.5, dont il provient lui-même, et auquel il succède.

Sommes-nous dans la même situation que l’année dernière face au Covid ?

La répétition des quatre précédentes vagues d’Omicron comporte en effet de grandes similitudes. Si la performance de la veille sanitaire s’est beaucoup dégradée en douze mois un peu partout en Europe, chacune des quatre vagues que l’on vient de connaître se ressemblait en réalité beaucoup, tant en taille qu’en impact. Un grand nombre de contaminations, désormais très sous-estimées par les chiffres officiels, un faible taux de formes sévères nécessitant l’hospitalisation, des taux de létalité très bas, sauf chez des personnes très vulnérables (personnes âgées et immunodéprimées), et enfin une proportion de l’ordre de 20% de Covid longs, touchant toute la population infectée mais plus fréquents chez les femmes et les jeunes adultes. Sans qu’il soit facile de prévoir les caractéristiques du nouveau sous-variant BQ.1.1 qui semble s’imposer rapidement dans le paysage épidémiologique de cette neuvième vague, il semble probable que l’on s’oriente vers un scénario où les conséquences sur la morbi-mortalité seraient très voisines de celles que l’on vient de connaître ces derniers mois.

A quoi s’attendre si nous sommes tous « omicronés » à nouveau cet hiver ? Quels sont les risques ?

J’aime assez bien votre expression. Certains auraient probablement même osé “ré-omicronné” car nous avons quasiment tous été déjà “omicronnés” durant les premiers mois de 2022 ! Mais, nous allons l’être très probablement à nouveau, j’en conviens, et je ne vois pas trop comment nous y échapperions avec la politique du tout vaccinal actuelle qui ne cherche pas à tenter de freiner les contaminations par des mesures complémentaires. Les risques sont pour chacun de nous de rester malade à la maison pendant plusieurs jours, donc de manquer l’école ou le travail et parfois d’avoir la malchance de sortir de l’hiver avec des séquelles post-infectieuses, par exemple un diabète, une maladie du cœur, un AVC, ou encore une forte fatigue voire une dépression. Il y a un risque aussi de formes graves voire de décès chez les personnes très âgées ou les personnes immunodéprimées, ou encore les personnes ayant des comorbidités (diabète, hypertension, obésité) mais insuffisamment vaccinées, c’est-à-dire dont la dernière dose vaccinale remonte à plus de six mois.

Faut-il craindre la possibilité qu’un sous variant d’Omicron, ou un autre variant, profite de la forte circulation pour s’imposer, avec potentiellement des caractéristiques plus graves ?

Il circule aujourd’hui dans le monde plus de 500 sous-variants identifiés de la famille Omicron. Personne ne sait très bien ce qu’il va sortir de cette soupe de variants, dont certains se positionnent déjà pour venir remplacer les variants dominants actuels. Il est clair que le critère de sélection évolutive est la transmissibilité et l’échappement vaccinal, et non la plus forte sévérité. Mais rien n’interdit que, par le fait du pur hasard, un jour émerge un variant plus transmissible ET plus sévère. C’est certes un scénario catastrophe, et peut-être un peu catastrophiste aujourd’hui, mais il est plausible et pas assez envisagé par les autorités sanitaires des différents pays. On reste très mal préparés à un tel scénario, en grande partie parce que la politique est l’art de gérer les crises plutôt que de les anticiper.

Avec l’expérience de l’année passée, y a-t-il des moyens de se prémunir contre une nouvelle vague ?Avons-nous anticipé cette période ?

Merci de me demander de proposer à nos politiques de mieux anticiper l’évolution de cette pandémie, alors que je viens d’expliquer qu’ils ne sont justement pas très rompus à cet exercice ! En effet, il y aurait aujourd’hui des moyens de se prémunir efficacement d’un virus dont la transmission quasi exclusive se fait par les aérosols contaminés de notre respiration en lieux clos, bondés et mal ventilés. Il s’agirait d’abord et en priorité de chercher à améliorer notablement la qualité de l’air intérieur dans ces situations critiques. La priorité pourrait revenir aux écoles, aux transports publics, aux bars et aux restaurants, puis l’ensemble du bâti serait concerné tour à tour. En associant le port obligatoire du masque lors des vagues épidémiques, puisqu’on a prouvé aujourd’hui l’efficacité de cette mesure, on réduirait alors drastiquement le niveau de contaminations, et arithmétiquement celui des hospitalisations, décès et Covid longs. Certains variants de très grande transmissibilité continueraient peut-être à passer parfois à travers les mailles d’un tel filet mais il éviterait dans une large mesure l’engorgement des hôpitaux, la surmortalité, tous ces Covid longs et l’absentéisme dont on souffre depuis 2020. L’effet d’une meilleure ventilation et filtration de l’air aurait des bénéfices allant très au-delà de la transmission du Covid-19, cela concernerait aussi les bronchiolites des nourrissons et les grippes sévères des personnes âgées. Il faudrait aussi s’atteler à améliorer la qualité de l’air extérieur dont on sait qu’elle est également l’un des déterminants importants de notre santé respiratoire. Nous négligeons depuis trop longtemps l’air que nous respirons, or c’est un bien commun aussi précieux que l’eau que nous buvons et pour laquelle nous avons passé le vingtième siècle à la rendre potable partout où nous vivons. Le vingt-et-unième siècle pourrait bien devenir celui de la qualité de l’air intérieur et extérieur.

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