Un an après le changement d'émir surprise, le Qatar a-t-il renoncé à jouer avec le feu (des djihadistes) ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le nouvel émir du Qatar, le sheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani.
Le nouvel émir du Qatar, le sheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani.
©Reuters

Double jeu

François Hollande reçoit à l’Élisée ce lundi 23 juin le jeune émir du Qatar, qui a succédé il y a un an à son père. Une année pendant laquelle l'actualité internationale a placé le pays sous le feu des projecteurs.

Nicolas Beau

Nicolas Beau

Nicolas Beau est journaliste. Après une longue carrière au Canard enchaîné, émaillée de nombreux scoops, il est l'auteur de plusieurs best sellers, dont La Reine de Carthage (La Découverte, 2009).

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Atlantico : François Hollande reçoit l'Emir du Qatar, cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani, qui a succédé à son père il y a un de cela, le 25 juin 2013. L'accession au pouvoir du jeune émir laissait présager une rupture relativement à la politique menée par son père. Quels ont été les grands changements impulsés par le nouvel émir ? La Qatar a-t-il rompu par exemple avec ses vieux démons notamment sur la question du soutien financier et militaire qu'il apportait à certains groupes salafistes ?

Nicolas Beau : Je pense que sur le plan intérieur et de l'évolution des libertés publiques et politiques, rien n'a changé par rapport au père. De ce côté-là, le Qatar n'a pas connu son "Printemps". En revanche il y a eu des changements très sensibles en termes de politique étrangère notamment par rapport au dossier syrien où quelques passerelles ont été jetées avec le régime de Bachar el-Assad. Incontestablement les échecs subis par les Frères musulmans égyptiens et libyens, ou le Mujao au Mali, ont amené le Qatar a réduire considérablement la voilure en se faisant moins présent en matière de politique internationale. Ils sont revenus à leur pré carré traditionnel, et doivent affronter l'hiostilité de leurs frères ennemis du Gofle : l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis. Pour cela, ils doivent renforcer les alliances qu'ils ont pu tisser les années antérieures, notamment avec la France.

Sur le dossier syrien, le Qatar a notamment été accusé de jouer un double jeu. Qu'en est-il réellement ? Qu'est-ce que cette attitude révèle de la stratégie de l'émirat ?

Je crois que le Qatar a pris la mesure de la situation. El-Assad a résisté au soulèvement populaire. De plus, ils doivent se mettre en retrait du fait de la pression américaine. Le Qatar en dépend encore beaucoup ; son assurance-vie, c'est la base américaine présente dans le pays. Le Qatar ne peut donc pas se permettre de continuer à soutenir de façon voyante des mouvements djihadistes que son allié américain combat. Et quand le Qatar voit les échanges croissants entre les Etats-Unis et l'Iran – un autre adversaire du Qatar – l'émirat est obligé de changer son positionnement sur le dossier syrien. De manière général le Qatar a donc tendance à se faire plus modeste.

Par ailleurs, le nouvel émir a-t-il su faire preuve de plus d'indépendance que son père vis-à-vis des autres monarchies du Golfe ?

Je crois que malgré les apparences, le père de l'actuel cheikh Tamim était en guerre larvée avec les autres puissances du Golfe. Simplement, la situation internationale ayant changé, les frères ennemis du Golfe se sont ouvertement prononcés contre les intérêts du Qatar, profitant d'ailleurs de la faiblesse de l'émirat. On constate d'ailleurs que le grand prêcheur Al-Qardawi, très proche des Frères musulmans, a dû modérer ses prêches. Cela dénote bien d'une volonté du Qatar de la volonté de se faire plus modeste sur la scène internationale qu'il ne l'était jusque-là.

Aujourd'hui qu'attend François Hollande de cette visite ?

Pour commencer je dirais que dans la situation actuelle – avec notamment le projet de la Coupe du monde 2022 qui prend l'eau de toutes parts – le cheikh Tamim a sans doute plus besoin de François Hollande, qui a même une politique très équilibré dans cette région du monde, que l'inverse. Nous ne sommes plus tout à fait comme dans les belles années du règne de son père où c'est la France qui venait demander de l'aide pour le soutien à l'industrie française.

Cependant les fonds qataris en France sont toujours là et ils pèsent entre 20 et 25 milliards de dollars. Il est certain que dans la conjoncture actuelle, la France est très heureuse d'attirer les capitaux qataris. Elle ne compte pas s'arrêter. Mais les termes du débat sont plus équilibrés qu'avant. 

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