Top 5 des mèmes les plus cultes d'Internet<!-- --> | Atlantico.fr
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Avec Chuck Norris et Trololo, Nyan cat fait partie des mèmes les plus célèbres du web.
Avec Chuck Norris et Trololo, Nyan cat fait partie des mèmes les plus célèbres du web.
©DR

mer il sont fou

Les JO à peine achevés, les geeks se sont déjà emparés de quelques photos d'athlètes pour en faire des "mèmes", ces icônes ou blagues récurrentes d'Internet. Bienvenue dans un monde d'initiés...

 Olivier  Mauco

Olivier Mauco

Docteur en science politique, spécialiste des jeux vidéo, Olivier Mauco est aussi directeur de la création de médias ludiques chez Antidox et membre de l'Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines. Il tient un blog www.gameinsociety.com

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1. Le rickroll

Le rickroll, repris par Barack Obama sur Twitter, ce qui avait fait grand bruit. Lors d’une discussion sur internet, on envoie un lien hypertexte vers une autre source qui mène généralement à un clip vidéo de Rick Astley. Cela signifie que vous avez été « rickrollé ».

2. Trololo

Trololo est un peu l'équivalent russe du rick-roll. Il s'agit de l'interprétation, par Eduard Anatolyevich Khil, d'un tube de l'ère soviétique : "Je suis content d'être enfin rentré à la maison". De nombreuses parodies ont été été publiées sur le réseau. Khil a appris sa célébrité soudaine sur le réseau en entendant son petit-fils fredonner le morceau.

3. Chuck Norris

Les faux exploits attribués à Chuck Norris qui sous-entendent que Chuck Norris est plus fort que tout.

4. Nyan Cat

Nyan Cat, un chat avec un arc-en-ciel dans le dos en 8 bits, qui parle à la culture jeux vidéos.

5. Pedo Bear

PedoBear, un ours censé être pédophile, qui apparaît à chaque fois que quelqu’un a des propos tendancieux ou qui prêteraient à confusion.

 Vous les trouverez tous sur l’encyclopédie du mème : KnowYourMeme.

Atlantico : Comment un mème se propage-t-il ?

Olivier Mauco : Plusieurs séquences sont à distinguer. L’émergence du mème tout d’abord, en général sur un forum dont l’un des utilisateurs s’amuse à bricoler une image ou y ajouter une petite phrase.

Si l’image rencontre du succès, les autres membres de la discussion se l’approprient sur tout espace de discussion : les forums, les chats, sur twitter, etc. Plutôt que d’utiliser des mots, ils y substituent cette image. De substitution en substitution, les non-initiés sont de moins en moins susceptibles de comprendre, d’autant plus que ce phénomène a en général lieu sur des plateformes  spécialisées. Le mème n’émergera que s’il est utilisé par des plateformes dont l’audience est conséquente, de telle sorte qu’il soit visible par des gens qui n’étaient pas dans la discussion initiale. Par exemple sur 4Chan  (attention, le contenu est peu recommandable), une espèce de forum  de discussion où il y a énormément de trafic et où on parle de tout et n’importe quoi. En général, si un mème apparaît sur ce site, il est diffusé car repris par de nombreux internautes. De plus certains sites se spécialisent dans les mèmes.

C’est là la manière la plus traditionnelle pour qu’un mème émerge.  Par ailleurs, il y a les mèmes qui sont produits par l’industrie, notamment les agences de communication, qui créent des images et logos qui font le buzz et seront repris par le public. Mais cela est plus rare et leur succès est plus limité.

Existe-t-il des mèmes régionaux ?

Evidemment. En France, le premier est né de l’intervention d’un journaliste sur France 2 dans Télématin, qui avait réalisé une chronique sur les MMORPG (NDLR : Massively Multiplayer Online Role Playing Games, les jeux de rôle massivement multijoueurs), et qui a dit « meuporgue » plutôt que MMORPG, une expression reprise par toute la communauté des joueurs en ligne, ce qui était une manière pour eux de répondre au traitement négatif des jeux vidéo, en soulevant l’inculture.

L’autre mème français est apparu sur le forum de Gamekult, site dédié aux jeux vidéos, lors d’une discussion. Un jeune utilisateur dont l’orthographe était assez catastrophique avait répondu « mer il et fou » au lieu de « mais il est fou ». Ainsi, « mer il et fou » est devenu l’un des premiers memes français.

Les mèmes régionaux sont souvent basés sur des fautes de langages, donc écrits. La culture de la langue est très forte.

Au contraire, les mèmes uniquement visuels ont une vocation à devenir mondiaux, puisque la barrière de la langue n’existe pas.

A titre de comparaison, on peut même imaginer qu’il y ait des mèmes dans un groupe d’amis. Ce serait l’équivalent de la blague récurrente du groupe, la bêtise reprise à plusieurs reprises. Le mème, c’est la même chose en format numérique et à plus grande échelle.  C’est la petite phrase en politique, le gimmick en musique, le slogan publicitaire. Dans la culture pub, on se souvient de « pas de bras, pas de chocolat » ou « sans alcool, la fête est plus folle ».

 Comment les mèmes sont-ils nés ?

La naissance du terme est un peu floue, dans les années 2000 peut-être, voire 2008. En tout cas, cela s’inscrit dans la filiation des flame wars sur usenet et des LolCat, avec le même format visuel : une image assortie d’une petite citation ou d’une petite phrase, sauf que cette fois ce ne sont pas des chats, cela peut être tout et n’importe quoi.

Mais pour aller plus loin, c’est une pratique populaire et c’est proche du refrain en musique, deux ou trois notes reprises dans un morceau, qui restent en tête et sont fredonnés et sifflotées. Le mème fonctionne de la même manière : c’est une image, une phrase, une vidéo qui est reprise, généralement très courte.

Les mèmes existent du fait de la culture particulière propre à internet. On ne peut pas comprendre un mème si l’on ne maîtrise pas la culture qui est derrière, parce qu’il fait toujours référence soit à d’autres mèmes, soit à des pratiques culturelles en ligne. Généralement, les mèmes n’ont du sens que pour les initiés et sont très liés à leur espace de discussion original. C’est ce qui explique que certains puissent être quelque peu pantois ou sceptiques face à cette culture.

Par ailleurs, le mème est l’exemple même de ce qu’est le digital, le numérique. Il faut le voir comme une situation dans une discussion en ligne, donc fondée sur de l’oral, mais aussi sur de l’écrit, avec une image qui va être répétée et dupliquée. Les personnes qui communiquent feront ainsi toujours appel à la même « icône » en situation d’interaction. 

Le mème permet, en une seule image, de résumer un argumentaire. C’est un mode de communication assez particulier lié à la fois à la culture populaire, donc très irrévérencieuse, et à la culture de l’image, le tout dans une pratique du numérique. Le mème ne respecte absolument pas la propriété intellectuelle, ce qui a d’ailleurs posé problème avec le mème qui reprenait une séquence du film La Chute, le biopic d’Hitler, où l’on voit Hitler qui s’énerve. A chaque déclaration politique, économique ou grands événements, cette vidéo apparaissait, comme une manière de critiquer et se moquer d’une discussion polémique dans le monde réel. Or, les détenteurs des droits sur le film ont voulu retirer cette vidéo.

Les internautes modifient l’image, la décontextualisent, y ajoutent du texte et créent une œuvre différente. Ce n’est donc pas du copiage mais de la reconstruction sur des données existantes (une image, une séquence vidéo). Mais cela est assez compliqué d’un point de vue légal, et les pouvoirs publics ont du mal à comprendre cette culture et à légiférer. Pour ce qui est de La Chute, la pression a été telle que la vidéo a été remise en ligne. Ce qui a d’ailleurs profité au film, comme cela fut le cas pour Des serpents dans l’avion, un navet qui est devenu culte grâce aux mèmes qui le parodiaient. En fait le même illustre bien ce qu’est l’esprit d’internet : des bases de données, ouvertes à tous, et pouvant être réutilisées.

Y a-t-il un "supermème", le plus culte de tous ?

Le mème le plus culte est peut-être le rickroll, puisqu’il a même été repris par Obama, qui a ainsi acquis  une visibilité sans commune mesure. Mais la grande question est de savoir pour qui le mème est-il culte. Pour qu’un mème soit culte aux yeux du grand public, il doit passer par un autre média que le forum en ligne, être porté par une personne faisant autorité (leader d’opinion, leader politique, etc.), de même que lorsque les émissions de télévision finissent par reprendre les vidéos populaires sur Youtube.

Propos recueillis par Ania Nussbaum

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