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Des personnes participent à une marche pour appeler les candidats à la présidentielle à prendre en compte l'urgence climatique à Toulouse, le 12 mars 2022.
Des personnes participent à une marche pour appeler les candidats à la présidentielle à prendre en compte l'urgence climatique à Toulouse, le 12 mars 2022.
©FRED SCHEIBER / AFP

Environnement

Avec la campagne présidentielle se multiplient les comparatifs de programmes, les analyses, les évaluations. L’environnement n’y échappe pas. Mais la récente étude du RAC, le réseau des principales associations écologistes françaises, illustre à la fois des biais méthodologiques majeurs et un parti pris choquant.

Olivier Blond

Olivier Blond

Olivier Blond est conseiller régional, délégué spécial à la santé environnementale et à la lutte contre la pollution de l'air et Président de Bruitparif.

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On ne parle pas assez d’environnement dans cette campagne présidentielle. La protection de notre planète mériterait mieux. Mais elle mériterait mieux, aussi, que les raccourcis trompeurs du Réseau Action Climat, RAC, qui rassemble les principales associations écologiques du pays, dont Greenpeace et WWF. Celui-ci a publié un comparatif des programmes des différents candidats en matière d’environnement. Et pour en résumer la substance, les candidats Jadot et Melenchon bénéficient d’un beau smiley vert, Hidalgo et Roussel décroche un orange, et tous les autres sont affublés d’une méchant rouge. C’est problématique par la méthode et par l’interprétation.

Le premier problème porte sur le principe même de l’étude. Le RAC analyse les programmes des candidats comme s’ils allaient être réellement appliqués. Il prend pour argent comptant les promesses des uns et des autres. Mais en politique comme ailleurs, les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Il suffit pour s’en convaincre d’évaluer le bilan du candidat sortant. Celui-ci a montré un certain talent pour les promesses et les belles formules. Mais on sait bien que « Make the planet great again » ne reste qu’un slogan creux, une belle formule sans application concrète.

Le RAC, comme d’autres organisations écologistes, s’emporte régulièrement contre les fausses promesses, ou greenwashing, et a lancé ou participé à diverses campagnes sur ce thème (comme récemment #stopFakeGreen). Mais il s’abstient ici de le faire.

Quelles sont les conséquences de cette étrange myopie ? C’est d’encourager encore les discours démagogiques et de favoriser une fuite en avant qui est préjudiciable à la qualité du débat, et plus fondamentalement, à l’environnement. Finalement, les smileys de couleur du classement du RAC ne reflètent que sa crédulité en des promesses dont le sérieux reste à apprécier.

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Le deuxième problème de l’étude est plus grave encore. Au lieu d’évaluer les programmes, le RAC ne fait que les comparer à ses propres propositions. Il ne juge pas leur pertinence mais seulement leur orthodoxie. Pourtant, tous les experts s’accordent pour reconnaître l’existence non pas d’un mais de plusieurs scenarios possibles. Les deux études les plus importantes en France, celles de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et celle du Réseau pour le transport de l’énergie (RTE) en comptent respectivement 4 et 6 principaux. Elles pèsent leurs avantages et leurs inconvénients, et leur reconnaissent à tous la capacité de parvenir à la neutralité carbone en 2050 – l’objectif que la France et l’Europe se sont fixées. Il n’y a donc pas qu’une seule vérité. Et les apôtres du RAC sont en fait les prosélytes d’une église bien particulière.

Ce parti-pris se dévoile tout particulièrement sur la question du nucléaire. Les candidats qui soutiennent l’atome comme moyen contre le réchauffement climatique sont systématiquement pénalisés (alors que l’Allemagne rouvre les centrales à charbon pour avoir fermé les nucléaires). D’autres divergences, par exemple en matière de transport ou d’agriculture font jour ; là encore, elles ne sont évaluées qu’au regard d’une orthodoxie.

Or, il se trouve, à chaque fois, que celle-ci correspond à une vision très orientée politiquement des questions environnementales : une vision qui correspond à celles des candidats Jadot et Mélenchon. C’est ainsi qu’ils obtiennent des smileys verts dans toutes les catégories (sauf une) tandis que les candidats à droite de Hidalgo (ce qui laisse de la place !) écopent quant à eux de grimaces rouges dans tous les critères ! Le tableau est absolument caricatural.

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Pour finir, ce parti pris outrancier s’accommode d’approximations choquantes. Ainsi, lorsque que la candidate Valérie Pécresse (que je soutiens dans cette campagne et pour laquelle je manque donc peut-être aussi d’objectivité)) propose de doubler le rythme actuel de rénovation énergétique des logements des Français, en particulier des passoires thermiques, elle reçoit un smiley rouge parce que… ce n’est pas assez détaillé. Sur les transports, autre carton rouge pour la candidate alors qu’elle propose un très large panel d’actions. Le RAC lui reproche l’absence d’action sur le vélo, par exemple, alors que Valérie Pécresse et la région Ile-de-France qu’elle dirige, a gagné le grand prix des villes et territoires cyclables pour son « RER Vélo » unanimement salué par les connaisseurs du sujet...

En conclusion, afficher des préférences ou des convictions est tout à fait légitime et même souhaitable dans le débat démocratique. Mais le RAC a prétendu pendant un certain temps à une image d’expertise sur les questions climatiques et, derrière cette expertise, à une certaine forme d’objectivité et de neutralité – il est même très largement financé par l’État pour ce faire. Mais il a failli. Le biais du RAC aurait pu être léger. Après tout, nul n’est vraiment objectif. Et à chacun de défendre son point de vue. Mais le décalage est ici tellement énorme qu’il jette un discrédit sur le travail du RAC et le fait apparaître comme une officine politique. Le juste combat pour l’environnement a besoin de mieux.

Olivier Blond

Président de l’institut Brunoy pour une écologie des solutions.

www.institutbrunoy.fr

Olivier Blond vient de publier « Plaidoyer pour une écologie de droite », aux éditions Albin Michel

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