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Pourquoi la question des investitures aux législatives promet une belle bataille à droite
©Reuters

J’y suis (chef de parti), j’y reste

Selon différentes sources, Nicolas Sarkozy entendrait attribuer les investitures aux législatives de 2017 dès l'été 2016, soit plusieurs mois avant la primaire des Républicains. Un projet qui provoque déjà des tensions avec ses concurrents aux primaires.

Philippe Goulliaud

Philippe Goulliaud

Rédacteur en chef du service politique du Figaro, il a co-écrit avec Marie-Benedicte Allaire "L'incroyable septennat" en 2002 (Fayard). 

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Atlantico : Selon différentes sources, Nicolas Sarkozy entendrait attribuer les investitures aux législatives de 2017 dès l'été 2016, soit plusieurs mois avant la primaire des Républicains. N'est-il pas légitime pour Nicolas Sarkozy de permettre aux candidats d'avoir plus de temps pour préparer leur campagne ? Ou, comme le dénoncent ses concurrents, s'agit-il d'une manœuvre pour imposer ses fidèles parmi les candidats ? 

Philippe Goulliaud : Il est effectivement légitime que le président du parti veuille désigner les candidats aux législatives le plus tôt possible pour leur permettre de mener campagne et, pour les nouveaux, de se faire connaître. Il y a en outre des questions liées au financement des campagnes qui impliquent une désignation assez en amont. Mais bien sûr, il y a un calcul politique de la part de Nicolas Sarkozy. Le président des Républicains sait, mieux que quiconque, que celui qui décerne les investitures, détient un pouvoir colossal. Les candidats à la primaire doivent être parrainés par 20 parlementaires. Pour lui, pour les anciens premiers ministres et pour Bruno Le Maire qui entretient soigneusement ses réseaux, ce chiffre est facile à atteindre. Pour d’autres candidats, comme Hervé Mariton, Nathalie Kosciusko-Morizet ou Nadine Morano, par exemple, c’est un objectif plus difficile à atteindre. On imagine mal un député, réinvesti grâce à Nicolas Sarkozy, apporter son parrainage et encore moins son soutien à ses rivaux. Les investitures sont donc un outil précieux entre les mains de Nicolas Sarkozy face à ses concurrents. Mais après tout, il a fait le choix de revenir en politique en se faisant réélire à la tête du parti, il faut bien qu’il en tire quelques avantages. Néanmoins, il y a aussi pour lui, un risque, celui de ne pas pouvoir prendre suffisamment de hauteur pour préparer la primaire et d’être trop longtemps les mains dans le cambouis de la politique politicienne.

Lors des dernières élections législatives, l’UMP a été gratifiée d’une amende de 4 millions d’euros pour non-respect de la parité au sein de ses candidats. L’état des finances du parti des Républicains devrait forcer le parti à investir un très grand nombre de nouvelles candidates, ayant besoin d’un temps de campagne suffisamment long pour se faire connaître. N’est-ce pas un argument permettant à Nicolas Sarkozy d’imposer cette solution ?

L’UMP naguère, le RPR avant elle, Les Républicains aujourd’hui ont toujours eu du retard en ce qui concerne les investitures accordées aux femmes. Quel que soit le moment où seront désignés les candidats aux législatives, LR devra faire un effort important de féminisation. Des investitures avancées permettraient sans doute de faciliter cet effort, mais à la marge. Les vieux réflexes ont la vie dure. Que risquent concrètement les concurrents de Nicolas Sarkozy si les investitures des législatives se déroulent avant la primaire ? Les candidats à la primaire dénoncent une manœuvre politique. La confiance règne, ils craignent que les sarkozystes imposent des fidèles au détriment des autres courants des Républicains et, surtout, fassent pression sur quelques esprits faibles, menacés de se voir retirer leur investiture s’ils devaient soutenir un candidat autre que l’ancien chef de l’Etat. Alain Juppé, François Fillon, Bruno Le Maire et les autres ont déjà fait savoir qu’ils s’opposeraient farouchement à des investitures précipitées. Pour eux, le candidat qui sortira vainqueur de la primaire devra avoir la haute main sur cette question sensible.

Dans le cas où Nicolas Sarkozy perdrait la primaire, y a-t-il un handicap pour son concurrent élu candidat LR de n'avoir pas désigné lui-même les candidats aux législatives de son parti ? 

Chacun se souvient qu’en 2012, c’est Martine Aubry, patronne du PS, qui avait négocié les investitures, que François Hollande ne les avait pas remises en cause. Et que, du coup, il s’est retrouvé avec quelques élus qui, très vite, ont contesté son autorité, estimant sans doute ne devoir leur élection qu’à Martine Aubry. Sans parler des investitures négociées par la première secrétaire avec les Verts, alliés indociles qui ont mené la vie dure au président avant, pour certains, d’entrer en rébellion. Les présidentiables de droite ne voudront sûrement pas connaître une telle situation.   

N'y a-t-il pas également l'inquiétude de connaître - en cas de victoire à l'élection présidentielle - les mêmes difficultés que François Hollande avec les frondeurs ? C'est à dire de disposer certes d'une majorité à l'Assemblée nationale, mais composée d'un nombre important d'opposants politiques venus de sa propre famille politique... 

C’est sans doute un risque majeur. Entre 1995 et 1997, Alain Juppé a effectivement connu une majorité où les balladuriens se taillaient la part du lion. Et, au fond, François Hollande depuis 2012 n’a pas la majorité correspondant à sa politique. Le prochain président de la République, quel qu’il soit, devra être extrêmement attentif à ne pas tomber dans le même écueil.

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