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Peut-on encore s’enrichir autrement qu’avec l’immobilier en France ?
©Reuters

Pierre précieuse

C’est bien connu les Français ont une passion pour la pierre à moins que cela soit l’inverse.

Philippe Crevel

Philippe Crevel

Philippe Crevel est économiste, directeur du Cercle de l’Épargne et directeur associé de Lorello Ecodata, société d'études et de conseils en stratégies économiques.

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C’est bien connu les Français ont une passion pour la pierre à moins que cela soit l’inverse. 61 % du patrimoine des ménages est en effet constitué de logements et de terrains. 7039 milliards d’euros sur un total de 11 494 milliards d’euros en 2017 selon les dernières statistiques publiées par l’INSEE.

En quelques générations le patrimoine des ménages a fortement progressé, c’est avant tout à la pierre qu’il le doit. En effet, en vingt ans le prix de la pierre a doublé et le patrimoine net des ménages est passé de 5,6 à 8,5 fois le revenu disponible brut annuel. A la sortie de la Seconde guerre mondiale, la fortune des ménages ne dépassait pas quelques mois de revenus. Tous les Français ne sont pas égaux devant la hausse du patrimoine. Les 20 % les plus modestes ne sont guère concernés par ce phénomène qui concerne les 20 et surtout les 1 % les plus aisés. Ce sont les propriétaires urbains vivant dans les grandes villes ou à proximité d’un littoral, plutôt âgés. Le patrimoine, c’est une question de patience. Il se construit par accumulation. Or, avec une population vieillissante, il est logique que le patrimoine augmente. Mais, un propriétaire d’un appartement à Paris ou au bord de la mer ne fait pas de lui un riche. C’est avant la conséquence d’une rareté.

Bien évidemment, la montée en puissance du patrimoine immobilier est le produit d’une préférence répétée des Français pour la pierre. Ainsi, près de 59 % des ménages sont propriétaires ou accédants à la propriété de leur logement, alors que cette proportion s’établissait à moins de 55 % quinze ans plus tôt. Mais, ce taux n’explique pas tout loin de là. En effet, dans bien d’autres pays, le taux de propriétaires est supérieur, en Espagne, en Italie ou au Royaume-Uni. Cette surreprésentation de l’immobilier est avant tout la conséquence d’un phénomène de rareté des biens immobiliers et de la faiblesse du patrimoine financier. L’immobilier est cher en France, du moins dans certaines villes car tout le monde veut habiter au même endroit. La métropolisation et la tertiarisation du pays ont accentué ce phénomène. Par ailleurs, de plus en plus de Français veulent habiter près de la mer. La façade atlantique comme celle de la Méditerranée sont de plus en plus prisés favorisant la hausse des prix dans ces régions. Il en est de même pour les cœurs des grandes agglomérations Dans le même temps, la réglementation sur le foncier, les normes dans le bâtiment ont réduit les possibilités de construction et ont en renchéri les coûts. L’existence depuis plus de vingt ans d’une crise du logement est la preuve d’un déséquilibre structurel du marché. De nombreux rapports ont souligné que les aides aux logements loin de résoudre le problème contribuaient à la hausse des prix.

Les Français privilégient la pierre car elle est à leurs yeux une valeur refuge. Ils ont oublié qu’elle pouvait connaître d’amples fluctuations. Ainsi, de 1993 à 1997, le prix des logements à Paris, après une forte hausse, a baissé de 50 %. Plus près de nous, la crise de 2008 / 2009 a entraîné un fort recul des prix aux Etats-Unis comme en Espagne.

Malgré les taxes, l’IFI, les normes, la pierre reste une valeur refuge. Les Français se méfient en revanche des placements financiers, par crainte de la survenue inopinée d’un krach, d’un changement de fiscalité, etc. De ce fait, les placements financiers ne font pas recettes et encore moins les actions. Depuis quarante ans, les pouvoirs publics tentent de réorienter une partie du patrimoine des ménages vers les entreprises. A cette fin, de nombreux mécanismes ont été inventés, le Compte d’Epargne en Actions par René Monory en 1978, le Plan d’Epargne en Actions de Pierre Bérégovoy, les contrats DSK et NSK, les fonds euro-croissance, etc. Jusqu’à maintenant, les Français privilégient la pierre qui est censée à tort ou à raison être moins sensibles aux évolutions de l’économie et de la politique. L’épargne est un acte de confiance, une renonciation au présent et donc un pari dans le futur. Le changement des habitudes, des comportements repose donc sur la diffusion d’un climat pérenne de confiance. Pour cela, la stabilité des normes, de la fiscalité est indispensable. Or, ces vingt dernières années, les changements de législation ont été incessants

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