Non, Cléopâtre n'était pas qu'une bimbo à grand nez<!-- --> | Atlantico.fr
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Cléopâtre était belle, mais elle séduisait plus par son intelligence que par sa beauté.
Cléopâtre était belle, mais elle séduisait plus par son intelligence que par sa beauté.
©DR

Un pic, un cap, une péninsule

La reine d’Égypte, qui a ensorcelé Jules César puis Marc Antoine, avait bien du charme. Mais pas seulement. C'est ce que démontre Catherine Salles. Extrait de "150 idées reçues sur les grands personnages de l'histoire".

Catherine Salles

Catherine Salles

Catherine Salles est professeur à l'université de Paris X Nanterre, où elle enseigne la civilisation romaine.

Elle a collaboré avec la rédaction de la revue Historia à l'écriture du livre "Les 150 idées reçues sur les grands personnages de l'histoire", First Editions.

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Cléopâtre était-elle belle ? Nous n’avons que peu de portraits de la reine égyptienne qui séduisit successivement les deux plus grands généraux de Rome, Jules César, le conquérant des Gaules, et Marc Antoine, le rival d’Octave. Elle s’est fait souvent représenter sous les traits d’une pharaonne de l’époque ancienne ou de la déesse Isis, ce qui fait qu’il n’y a pas de recherche de la ressemblance. En effet, bien que grecque, Cléopâtre, pour plaire à ses sujets égyptiens, a privilégié les portraits se rattachant aux traditions les plus populaires de son royaume.

Nous n’avons qu’une pièce de monnaie et un buste grec reproduisant sans doute assez fidèlement les traits de la véritable Cléopâtre : elle a un beau visage régulier, de grands yeux, une bouche bien ourlée (et un nez bien proportionné !). Tous les écrivains anciens – en particulier Plutarque – ont loué la beauté de la reine, mais ajoutent tous que Cléopâtre était surtout pourvue d’une grâce irrésistible qui séduisait, plus que son aspect physique, tous ceux qui l’approchaient. À cela s’ajoutaient son intelligence, sa culture indéniable, la finesse de sa conversation et surtout un sens aigu de la mise en scène : pour rencontrer César, elle parvient à pénétrer jusqu’à son camp cachée dans un tapis et, lorsqu’elle en sort, le général romain est frappé à la fois par la hardiesse et la beauté de la jeune femme.

Pour captiver Antoine, elle choisit une autre tactique. Maître de l’Orient, il a convoqué à Tarse en Cilicie les souverains des proches royaumes, dont la reine d’Égypte. C’est à bord d’une galère à la poupe en or, aux voiles de pourpre et manœuvrée par les plus belles de ses servantes vêtues en nymphes et en néréides, qu’elle remonte le fleuve menant jusqu’à Tarse. Cléopâtre elle-même est déguisée en Aphrodite et des enfants travestis en Amours la rafraîchissent avec des éventails.

Rien d’étonnant qu’avec de tels arguments, elle ait su faire tomber sous son charme les généraux romains ! D’où vient cette réputation désastreuse sur la longueur de son appendice nasal ? Tout simplement d’une mauvaise interprétation d’une phrase de l’écrivain Blaise Pascal. En effet, celui-ci écrit dans Les Pensées : « Le nez de Cléopâtre : s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait changé. » Dans la partie de son œuvre consacrée à la « Misère de l’homme », Pascal envisage toutes les imperfections de la nature humaine, toutes ces « vanités » qui ont des conséquences incalculables sur l’histoire de l’univers. Parmi elles, se trouve l’amour, qui « remue toute la terre, les princes, les armées, le monde entier », d’où l’exemple de Cléopâtre. Ce que Pascal a voulu dire, c’est qu’une modification, même infime, dans la figure de la reine aurait peut-être fait que Jules César et Marc Antoine ne soient pas tombés amoureux d’elle. Et, bien entendu, toute l’histoire de Rome et, à travers elle, celle du monde entier auraient pris un cours différent. Pascal d’ailleurs n’a jamais dit que le nez de Cléopâtre était trop long, mais bien le contraire !

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Extrait de "150 idées reçues sur les grands personnages de l'histoire", First éditions (19 avril 2012)

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