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"Le jeu de l'amour et du hasard" de Marivaux est à retrouver au théâtre du Lucernaire.
"Le jeu de l'amour et du hasard" de Marivaux est à retrouver au théâtre du Lucernaire.
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"Le jeu de l'amour et du hasard" de Marivaux.

Alya Aglan pour Culture-Tops

Alya Aglan pour Culture-Tops

Alya Aglan est chroniqueuse pour Culture-Tops. Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.)

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THÈME

  • Cette comédie, qui fait partie du répertoire classique, a été créée en 1730. Sous couvert d’aborder le thème du mariage arrangé par les parents de deux jeunes gens de la noblesse - les pères en l’occurrence qui sont de vieux amis - l’inversion des rôles entre maîtres et valets offre l’occasion d’une satire sociale dont le caractère subversif n’a pas échappé au public de l’époque.

POINTS FORTS

  • La langue de Marivaux sonne juste et porte une modernité jamais éteinte.
  • Les comédiens semblent prendre du plaisir au « marivaudage ».
  • Le propos général sur le mariage demeure très pertinent, de même que la critique des arrangements entre amis concernant leur progéniture reste transposable à notre époque.

QUELQUES RÉSERVES

  • La mise en scène pêche par son incohérence, de même que les costumes hétéroclites masquent mal l’absence de réflexion dans la réactualisation d’une comédie qui tourne à la farce - voire au cirque - dans un décor délibérément cheap, entre le camping et la fête foraine.
  • Les comédiens ont parfois tendance à surjouer par des cris et des mimiques exagérées qui font perdre la finesse de l’interprétation.
  • Les intermèdes musicaux, constitués de “tubes“ sortis d’un mini-juke box, tirent vers la vulgarité une comédie pourtant bien enlevée, et tendent à masquer les rebondissements pourtant attendus.

ENCORE UN MOT...

  • Marivaux enchante toujours aujourd’hui, pourvu que l’on résiste à la tentation de sa “trivialisation“. Son approche emprunte la légèreté pour mieux démontrer l’absurdité des conventions et des hiérarchies sociales ainsi que des privilèges fondés sur la naissance.
  • L’inversion des rôles entre maîtres et valets, outre l’effet comique, vise la remise en cause de cet ordre social inique, bien des décennies avant la Révolution française. 
  • Aussi, quand les valets sont campés sous des traits vulgaires, même quand ils jouent le rôle de leurs maîtres, cela signifie que chacun conserve son caractère intrinsèque malgré les déguisements, et que la hiérarchie sociale ne saurait être remise en cause. La condition ancillaire ne peut donc être prise au pied de la lettre par les parades grotesques de Lisette, qui ne fait que se conformer à l’idée qu’elle se fait de la noblesse de Silvia. De même qu’Arlequin perd en humour ce qu’il gagne en lourdeur burlesque.

UNE PHRASE

• Silvia : « […] dans le mariage, on a plus souvent affaire à l'homme raisonnable qu'à l'aimable homme ; en un mot, je ne lui demande qu'un bon caractère, et cela est plus difficile à trouver qu'on ne pense. On loue beaucoup le sien, mais qui est-ce qui a vécu avec lui ? Les hommes ne se contrefont-ils pas, surtout quand ils ont de l'esprit ? N'en ai-je pas vu, moi, qui paraissaient, avec leurs amis, les meilleures gens du monde ? C'est la douceur, la raison, l'enjouement même, il n'y a pas jusqu'à leur physionomie qui ne soit garante de toutes les bonnes qualités qu'on leur trouve. Monsieur un tel a l'air d'un galant homme, d'un homme bien raisonnable, disait-on tous les jours d'Ergaste : Aussi l'est-il, répondait-on ; je l'ai répondu moi-même ; sa physionomie ne vous ment pas d'un mot. Oui, fiez-vous-y à cette physionomie si douce, si prévenante, qui disparaît un quart d'heure après pour faire place à un visage sombre, brutal, farouche, qui devient l'effroi de toute une maison. Ergaste s'est marié ; sa femme, ses enfants, son domestique, ne lui connaissent encore que ce visage-là, pendant qu'il promène partout ailleurs cette physionomie si aimable que nous lui voyons, et qui n'est qu'un masque qu'il prend au sortir de chez lui. » 

• Dorante à Silvia : « Mon père me pardonnera dès qu'il vous aura vue, ma fortune nous suffit à tous deux, et le mérite vaut bien la naissance : ne disputons point, car je ne changerai jamais. »

• Arlequin à Lisette : « Je n'y perds pas : avant notre connaissance, votre dot valait mieux que vous ; à présent, vous valez mieux que votre dot. »

L'AUTEUR

  • Marivaux (1688-1763), issu d’une famille de petite noblesse, s’essaie à toutes sortes de genres (romans, poèmes, chroniques) avant de donner sa première pièce, L’amour, en 1720. Il se fait connaître dès La Surprise de l’amour (1722), et sa réputation, confirmée par Le jeu de l'amour et du hasard (1730), ne faiblira pas jusqu’à la dernière de ses œuvres, Les Fausses confidences (1737), si caractéristique de cette « métaphysique du cœur » (synonyme de « marivaudage »). On lui doit aussi des pièces plus orientées vers l’utopie, telles que L’île aux esclaves (1725) ou encore La Colonie (1729). 
  • Il demeure l’un des plus grands écrivains français connu, étudié et joué dans le monde entier.

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