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Le glyphosate : un produit d’avenir
©DENIS CHARLET / AFP

Contre-intuitif

A l'occasion de la fin de l'année 2019, Atlantico a demandé à ses contributeurs les plus fidèles de s'interroger sur l'année à venir. A quoi pourrait bien ressembler 2020 ? Gil Rivière-Wekstein évoque les questions de l'agriculture, de l'environnement et du glyphosate.

Gil Rivière-Wekstein

Gil Rivière-Wekstein est rédacteur pour la revue Agriculture et Environnement. Il est l'auteur du livre "Panique dans l’assiette, ils se nourrissent de nos peurs". 

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Pour l’agriculture française, la décennie 2010-2019 aura été marquée par la montée en puissance d’une stupéfiante chimiophobie, ayant pour conséquence la mise en cause radicale de certaines pratiques agricoles. Instrumentalisées notamment par le lobby du bio, qui s’articule autour de quelques grands noms du secteur, les peurs alimentaires liées à l’usage de la chimie sous toutes ses formes ont fini par convaincre les consommateurs qu’il était indispensable de « sortir des pesticides ». Un thème repris à l'envi par la classe politique, visiblement prête à abandonner des pans entiers de notre agriculture au profit de nos compétiteurs, qui s’en frottent déjà les mains.

Dans ce contexte, la publication le 20 mars 2015 de l’avis du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), concernant la classification du glyphosate, utilisé dans plus de 750 formulations, dans la catégorie 2A, c’est-à-dire « cancérogènes probables », a sans aucun doute constitué l’un des événements majeurs de la dernière décennie. Qu’importe que, l’année suivante, le CIRC ait également rangé dans cette même catégorie les boissons très chaudes (supérieures à 65°), car le simple fait d’avoir associé au glyphosate les termes de « cancérogène probable » a suffi pour déclencher une avalanche de réactions. D’autant que cette nouvelle classification représentait une aubaine inespérée pour la mouvance anti-OGM. Comme l’a parfaitement résumé le journaliste du Monde Stéphane Foucart, « ce n’est pas une simple substance chimique dont l’innocuité est mise en cause par le CIRC, mais la pierre angulaire de la stratégie du secteur des biotechnologies ».

En France, le glyphosate reste le pesticide de synthèse le plus utilisé – environ 8000 tonnes –, mais avec des doses largement inférieures à ce qu’on peut observer dans le reste du monde. Herbicide redoutablement efficace, il est cependant inoffensif pour la faune, et, ne résistant pas au chlore, il est totalement absent de l’eau potable. Bref, c’est certainement l’un des produits sanitaires les moins toxiques pour l’environnement, et de surcroît les plus accessibles aux agriculteurs, étant donné que, la licence ayant expiré depuis 20 ans, plusieurs firmes se partagent le marché. Ce sont très certainement ces atouts évidents qui ont amené le Danemark – pays dont la conscience écologiste n’est pas à mettre en doute – à voter en faveur de la poursuite de son utilisation dans l'Union européenne pour cinq ans, allant jusqu'à se prononcer en faveur d'un allongement de cette période à dix ans. Ce pays a d'ailleurs doublé son usage entre 2014 et 2017, passant de 626 tonnes à 1 241 tonnes en trois ans.

Surfant sur la vague verte, le président Macron a pour sa part fait du cas du glyphosate son « marqueur écologiste ». La machine administrative s'est mise en branle pour que l’interdiction totale de son usage soit effective dès que possible, tandis qu’outre-Atlantique, une affaire judiciaire tient les médias en haleine, tel un véritable thriller. Le dernier épisode en a été l’arrestation du « Tombeur de Monsanto », l’homme qui a défendu le jardinier Dewayne Johnson face à Monsanto, en août 2018   à savoir l’avocat Timothy Litzenburg. Protagoniste de cette saga, il est, d’une part, à l’origine des fameux « Monsanto papers » – une fable qui tente d'attribuer à Monsanto des pouvoirs de corruption qu’elle n’a jamais eus, et qui demeure aujourd’hui encore l’une des accusations majeures à l’encontre de la firme de Saint-Louis –, et c’est également sous son impulsion, que le cabinet d’avocats d’affaires The Miller Firm – accompagné notamment de Lundy, Lundy, Soileau & South, Baum, Hedlund, Aristei & Goldman (BHAG) ou encore de Weitz & Luxenberg, – s’est lancé dans une guerre effroyable contre la firme de Saint-Louis, dépensant des millions de dollars, notamment en campagnes publicitaires dans le but d’attirer des clients potentiels.

L’arrestation, le 17 décembre 2019, du brillant avocat, inculpé pour avoir tenté d'extorquer la somme exorbitante de 200 millions de dollars à une entreprise, dont l’un des produits entrait dans la fabrication du fameux Roundup, représente peut-être un tournant dans cette affaire. Elle met en effet en lumière les pratiques peu vertueuses de ces « avocats prédateurs », prêts à tout pour augmenter leurs fortunes personnelles. Et cela, au détriment des prétendues victimes. Timothy Litzenburg comparaîtra lundi 6 janvier sur le banc des accusés. Pour l’instant, seul l’hebdomadaire Le Point a couvert l'événement, le reste des médias français ayant unanimement opté pour… le silence !

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