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Le G20 de Hambourg est-il gérable ?
©Daniel Bockwoldt / dpa / AFP

Inconnue

Le monde n’est plus le même, le G20 moins encore peut-être. Les tensions montent partout, les règles et les principes s’oublient, les traités se déchirent. Pourquoi ? Avec quels effets ? Avec quelles réparations possibles ?

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Toutes ces questions vont bientôt se poser les 7 et 8 juillet à Hambourg, quand Angela Merkel recevra le G20, après la Chine l’an dernier. Ce seront ainsi 19 pays (1), plus l’Union Européenne (2), qui vont se réunir autour d’une grande table. Deux tiers de la population mondiale et 80% de son PIB, pour discuter d’un commun futur.

Le G20 précédent, présidé (pour la première fois) par la Chine avait étéun modèle de convergence. C’était le dernier de Barak Obama, avec l’idée d’en faire alors un succès, notamment par la signature conjointe, par la Chine et les Etats-Unis, de la Cop 21. Le communiqué de l’époque était ainsi un très épais document, plein d’engagements de coopérations multiples. Il n’est pas sûr que celui de Hambourg lui ressemble.

Le programme du G20 de Hambourg, traditionnel, comporte trois thèmes : construire la stabilité et la résistance de l’économie aux chocs (buildingresilience), améliorer la soutenabilité (improving sustainability) et assumer ses responsabilités (assuming reponsability). Il commence, comme toujours, par le renforcement économique et financier de l’économie mondiale aux chocs. Pour avancer, l’idée du G20 est toujours de coopérer plus et mieux – notamment en matière financière pour, à la fois, permettre et surveiller les flux de capitaux, renforcer la régulation bancaire, notamment dans le shadow banking. Dans cette même veine, on trouve la transparence et l’équité des conditions de la taxation mondiale, plus le développement des échanges et des investissements internationaux, la formation et l’emploi privé dans une économie plus égalitaire (inclusive), le climat et la croissance durable, l’économie digitale, les migrations, l’égalité homme-femme, le terrorisme et la corruption.

Déjà, avec Donald Trump, le G7 de Taormina (les 26 et 27 mai 2017) avait montré les changements en cours au sein des grands pays industrialisés, face notamment à la question du climat. C’est ce qui devait conduire au retrait des Etats-Unis de la Cop 21. Auparavant, les réunions préparatoires des ministres avaient également montré que les sujets « sensibles » (climat, échanges internationaux notamment) devaient être abordés de façon très générale pour être traités au fond dans la réunion des Chefs d’Etat et de Gouvernement, avec Donald Trump. On a vu le résultat : un texte plus court, des engagements internationaux en retrait, sauf sur le terrorisme, et la sortie annoncée (quelques jours après) des Etats-Unis de la Cop 21.

Les inquiétudes peuvent monter pour le G20, d’abord (et surtout ?) pour l’Europe. On sait que le Royaume-Uni commencera le 24 juillet des discussions pour renforcer ses échanges commerciaux avec les Etats-Unis. La partie britannique dit qu’il s’agit de se préparer pour l’après-Brexit, mais pas du tout (bien sûr !) d’entrer dans des négociations commerciales, ce qui lui est interdit, tant qu’elle est membre de l’Union. Ensuite, Donald Trump se rendra en Pologne le 6 juillet où il rencontrera le président polonais Andrzej Duda et la Première ministre Beata Szydło pour évoquer des « sujets bilatéraux et régionaux », sans doute en liaison avec la Russie et l’immigration. La Maison Blanche a également indiqué que le président américain prononcera alors « un discours majeur » et participera au sommet de « l'initiative de trois mers » (Baltique, Adriatique, mer Noire), qui regroupe des pays d'Europe centrale membres de l'Union européenne (3). La Pologne, et ses voisins de l'Est, s'inquiètent notamment des ambitions de la Russie (Crimée et Ukraine) – sachant que Donald Trump rencontrera Wladimir Poutine. Il n’est pas impossible non plus que certains, dans cette visite, cherchent à obtenir l’appui de Donald Trump sur les problèmes migratoires (très sensibles en Pologne, Hongrie et Autriche).

La question du climat sera également sensible, avec des pays (Russie, Arabie Saoudite) qui sont évidemment favorables à un pétrole cher.

Les échanges internationaux seront sans doute une occasion des affrontements les plus nets(hors les manifestations des opposants au capitalisme). C’est là le risque majeur : celui que les Etats-Unis envisagent de quitter l’OMC. Angela Merkel a ainsi noté le 29 juin que « plus que jamais aujourd’hui, ceux qui croient pouvoir régler les problèmes du monde par le protectionnisme et l’isolationnisme commettent une énorme erreur». On aura compris le message – qui a dû énerver. C’est donc offrir à la Chine une place inouïe de défenseur des échanges, dont elle va bien sûr profiter, qui se profile !

Le G20 chinois de 2016 avait été celui d’un large accord et d’une coresponsabilité entre grandes pays et leaders du monde, Etats-Unis et Chine notamment. Ce G20 pourrait être celui d’une série d’oppositions de la part, a priori, de Donald Trump. On sait qu’il soutient le Brexit et a prédit l’éclatement de l’Union Européenne – sans compter ses relations avec la Russie et l’Arabie Saoudite, contre l’Iran. La question est donc de savoir si le camp des pays industrialisés, et démocratiques, se fissure et s’affaiblit – sous la crainte de Donald Trump, à l’exception nette de l’Allemagne pour l’heure. Compte tenu de la nature des autres invités, et de leurs capacités diplomatiques, ce n’est pas du tout un risque secondaire. Il s’agira donc d’éviter le risque venant des amis.

Gérable ce G20 ? Si Donald Trump l’est : oui ! Si les démocraties sont unies : possible aussi. Si des alliances se nouent avec la Chine en contenant les Etats-Unis, aussi. Mais c’est alors un autre monde qui s’ouvre. Autrement ? C’est grave.

(1) par ordre alphabétique anglais : Argentina, Australia, Brazil, Canada, China, France, Germany, India, Indonesia, Italy, Japan, Mexico, Russia, Saudi Arabia, South Africa, Korea, Turkey, United Kingdom, United States

(2) représentée par le Président de l’Union (Tusk) et le Président de la Commission (Jean-Claude Junker)

(3) Autriche, Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovaquie et Slovénie

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